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Comment prévenir des éclosions dans les écoles, selon une experte du MIT

Sans mesures pour améliorer la qualité de l’air, le nombre de cas dans les écoles sera difficile à contenir.

Deux fenêtres ouvertes

Les autorités recommandent d'ouvrir les fenêtres des salles de classe pour améliorer la qualité de l'air et réduire le risque de propagation de la COVID-19.

Photo : Radio-Canada / Guillaume Croteau-Langevin

Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Ouvrir les fenêtres d'une salle classe peut diminuer les risques d'éclosion, mais une experte du Massachusetts Institute of Technology (MIT) avertit qu’il faut prendre en considération plusieurs autres éléments pour garder les jeunes en sécurité cet automne.

Depuis plusieurs années, Lydia Bourouiba étudie la dynamique de la transmission des fluides des maladies au MIT. Elle s’inquiète pour la rentrée scolaire aux États-Unis et au Canada puisque les jeunes ne sont pas vaccinés et qu’ils passeront de longues heures dans des salles de classe.

« Il s'agit d'une maladie respiratoire hautement contagieuse. À ce stade, c'est vraiment naïf de croire que les salles de classe ne seront pas infectées à des taux élevés sans l'ajout de mesures préventives suffisamment efficaces. »

— Une citation de  Lydia Bourouiba, MIT

Il faut rappeler que les études indiquent que les personnes infectées par le variant Delta, qui est maintenant la souche dominante, peuvent porter une quantité de virus 1000 fois plus élevée que ceux qui ont la souche initiale.

Cette chercheuse déplore le fait que les autorités ne se sont pas suffisamment préparées pour améliorer la qualité de l’air dans les bâtiments scolaires avant la rentrée. Avec l’arrivée du vaccin, plusieurs ont cru que la pandémie était terminée, déplore-t-elle. Ils ont été complaisants. Clairement, il y a eu un relâchement immédiat des préparatifs au moment où le vaccin était disponible. Ils se sont dit : pourquoi investir maintenant?

Lydia Bourouiba est estomaquée, qu'en cette deuxième rentrée en temps de pandémie, de voir que plusieurs écoles aux États-Unis et au Canada n’ont pas ajouté des mesures supplémentaires pour diminuer les risques de propagation par l’air et certaines n’ont même pas pris la peine de vérifier leurs systèmes de ventilation avant l'arrivée des élèves. Ce sont des mesures préventives de base [...] Ces choses auraient dû être vérifiées à la fin de la dernière année scolaire et même avant. Cela aurait dû être une grande priorité.

Des pistes de solutions

C’est pourquoi cette experte a publié un guide, intitulé Healthy Teachings Recommendations (Nouvelle fenêtre) – basé sur de nombreuses études scientifiques – pour aider les parents, les directions d’écoles et les autorités en santé publique à améliorer la qualité de l’air.

D’abord, le guide recommande non seulement de séparer les bureaux l'un de l'autre de deux mètres, mais aussi de les décaler. Cela réduit les risques que l’air expiré par un élève n'atteigne celui qui est devant lui.

Image montrant comment l'air se propage selon la configuration d'une salle de classe.

Le guide recommande de ne pas mettre les bureaux l'un derrière l'autre.

Photo : Healthy Teaching Recommendations, Lydia Bourouiba, MIT

Prof. Bourouiba rappelle qu’un nuage d’air peut atteindre de 7 à 8 mètres pour un éternuement, de 4 à 6 mètres pour une toux et de 1 à 3 mètres pour une expiration normale.

Pour les mêmes raisons, on recommande que les élèves qui mangent dans une cafétéria le fassent côte à côte plutôt que l’un devant l’autre.

Trois graphiques montrant comment les élèves devraient être placés pour manger.

Le guide recommande d'éviter de manger face à face pour réduire les risques de transmission.

Photo : Healthy Teaching Recommendations, Lydia Bourouiba, MIT

Ouvrir les fenêtres ou ajouter des filtres ou un ventilateur sont tous de bons moyens pour faire circuler et filtrer l’air, dit Prof. Bourouiba. Il faut toutefois faire attention de ne pas créer d’endroits où l’air circule moins bien et où le virus peut s’accumuler.

Elle précise qu'aucun étudiant ou membre du personnel ne devrait être à moins deux mètres de la source d'entrée d’air frais ou de la sortie de l'air vicié.

Si une personne est très proche de la source [d’air ou de ventilation], le courant d’air va récupérer tout ce qui vient de cette personne – potentiellement infectée – et va le distribuer très, très efficacement à tous ceux qui sont en aval. Nous l'avons vu dans un cas bien documenté dans un restaurant où il y a eu une éclosion. Le flux directionnel [de l’air] a déterminé quels individus ont été infectés.

Ainsi, si une personne non infectée est proche de la source d'air ou de ventilation, ça peut être bon pour elle, puisqu’elle reçoit tout l’air frais. Par contre, si elle est contaminée, elle risque d'infecter tout le monde derrière elle.

De plus, un étudiant placé en plein dans la zone où l’air vicié est expulsé de la classe est beaucoup plus à risque d’être contaminé puisque toutes les particules de la classe arrivent dans sa direction.

Si vous êtes la personne qui est la plus proche de cette zone où l'air est aspiré, alors vous êtes plus exposé que tout le monde. C'est le pire endroit.

Animation montrant un courant d'air traverser une salle de classe.
Agrandir l’image (Nouvelle fenêtre)

Comme le montre cette animation, être assis trop près des sources d'air peut augmenter les risques de transmission.

Photo : Healthy Teaching Recommendations, Lydia Bourouiba, MIT

Quant aux systèmes de ventilation mécanique des bâtiments, Prof. Bourouiba estime que les standards de base ne sont pas suffisants pour réduire les risques de contamination du SRAS-CoV-2.

« Les normes pour les bâtiments sont établies pour gérer la chaleur et éliminer les odeurs, les particules. Elles sont établies pour assurer un niveau de confort, pas pour réduire la transmission de maladies respiratoires infectieuses. »

— Une citation de  Lydia Bourouiba, MIT

Elle dit que les personnes qui entretiennent les bâtiments doivent vérifier les systèmes de ventilation beaucoup plus fréquemment, même s’il n’y a pas de problèmes apparents, et devraient envisager d'ajouter des filtres MERV de cote 13 ou 14 (la cote MERV va de 1 à 16).

Lorsqu’il fait trop froid pour ouvrir les fenêtres et que la ventilation n’est pas suffisante, Prof. Bourouiba recommande l’utilisation de filtre à air de type HEPA.

L’Ontario a d’ailleurs commencé à équiper les classes avec ces filtres. Au Québec, le gouvernement mise sur les capteurs de CO2 pour mesurer la qualité de l’air, mais ceux-ci ne seront pas tous disponibles avant la fin de l’automne et, dans certains cas, pas avant 2022.

L’hiver dernier, les autorités avaient affirmé que les filtres à air de type HEPA n’étaient pas utiles pour réduire les risques d’éclosion. Prof. Bourouiba est complètement en désaccord.

Les filtres de type HEPA sont efficaces. Ce n'est pas une nouvelle technologie qui doit être prouvée. C'est donc un outil très utile, surtout pour les endroits qui n'ont pas de très bons systèmes de ventilation comme dans les vieux bâtiments, dit-elle, en rappelant de ne pas placer les filtres trop proches des élèves pour ne pas les placer dans une zone où les particules virales peuvent s’accumuler.

Elle suggère aussi d’utiliser plusieurs petites unités à travers la classe, plutôt qu’une seule grosse unité, pour atténuer la création de forts courants d'air directionnels.

Une autre solution est l'installation de ventilateurs dans les fenêtres qui forcent l'évacuation de l’air à l’extérieur.

Bien que les séparateurs soient efficaces pour bloquer les grosses gouttelettes, ils n'empêchent pas complètement toutes les particules virales de flotter autour et au-dessus de la cloison, rappelle le guide. De plus, ces séparateurs empêchent une bonne circulation de l'air, créant des poches de contaminants concentrés à cet endroit​​. De plus, elle ajoute que ces écrans protecteurs devraient être désinfectés régulièrement, sans quoi, ils peuvent devenir des vecteurs de transmission.

Animation montrant comment l'air circule entre des panneaux de plexiglas.
Agrandir l’image (Nouvelle fenêtre)

Les séparateurs doivent être utilisés avec précaution : ils peuvent éviter la propagation de certaines gouttelettes vers l'avant, mais ils empêchent l'air de circuler, ce qui crée des « pièges de contaminants ».

Photo : Healthy Teaching Recommendations, Lydia Bourouiba, MIT

Elle recommande par ailleurs :

  • le maintien du concept de bulles;

  • d’ouvrir les fenêtres le plus longtemps possible quand la salle est occupe et entre les classes;

  • de pratiquer les activités sportives et parascolaires à l’extérieur;

  • de porter des masques de haute qualité qui ne permettent pas l’entrée ou la sortie d’air sur les côtés.

Si plusieurs écoles n’ont pas encore pris les mesures nécessaires pour réduire les risques de transmission, Prof. Bourouiba dit qu’il n’est jamais trop tard pour agir. Même si l'autorisation des vaccins pour les enfants se fait dans les prochaines semaines, leur déploiement prendra plusieurs mois avant d'atteindre un taux suffisamment élevé pour avoir un impact, avertit Prof. Bourouiba. Ainsi, les mesures qu’elle propose dans son guide sont utiles pendant plusieurs mois à venir. Sans intervention, elle craint que trop de classes soient fermées.

Nous espérons tous d'avoir le meilleur scénario. Mais il faut néanmoins prévoir le pire.

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