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Université Ryerson : un changement d'image pourrait s'avérer payant

Un groupe de travail fera bientôt des recommandations relatives à l'histoire d'Egerton Ryerson en matière de racisme et de pensionnats pour Autochtones

La statue d'Egerton Ryerson, couverte de peinture, est au sol devant le piédestal sur lequel elle reposait. Une femme s'apprête à frapper sa tête à l'aide d'une massue.

La statue d'Egerton Ryerson, considéré comme l'un des architectes du système de pensionnats pour Autochtones au Canada, a été déboulonnée en juin dernier.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Avant que les étudiants de l'Université Ryerson ne commencent les cours à l'automne, un groupe de travail dévoilera les mesures qu'il estime devoir être prises par l'établissement torontois pour faire face à l'héritage controversé de l'homme en l'honneur duquel elle a été nommée, Egerton Ryerson.

Le lien entre Egerton Ryerson et l'idéologie raciste est une source de préoccupation pour l'Université et trouble les étudiants, le personnel et les membres de la communauté des Premières Nations depuis des années. Ministre méthodiste et éducateur ayant vécu au XIXe siècle, Ryerson a joué un rôle important dans le développement du système de pensionnats pour Autochtones.

Au cours de l'été, alors que les restes de centaines d'enfants autochtones ont été découverts sur les sites d'anciens pensionnats au Canada, les pressions se sont intensifiées pour que l'Université change de nom.

Dans une société qui met en évidence le pouvoir des noms et des symboles, des experts estiment qu'un changement d'image pourrait être bénéfique pour l'école à quatre égards : réputation, dons, marketing et nouveaux partenariats.

Sur le campus, beaucoup pensent qu'un changement est la seule façon d'avancer.

Je n'ai pas l'impression que ce qu'Egerton Ryerson défendait – ou ce qu'il en est venu à représenter – soit en phase avec le travail que nous faisons ici, dit Michael Mihalicz, professeur adjoint et conseiller autochtone à l'École de gestion Ted Rogers de l'Université Ryerson.

Michael Mihalicz prend la pose sur le campus de l'université.

Michael Mihalicz participe aux discussions pour changer le nom de l'Université Ryerson.

Photo : Evan Mitsui/CBC

Plus tôt cet été, plus de 300 membres du personnel de l'Université Ryerson ont signé une lettre ouverte demandant à l'établissement de changer de nom. En mai, certains enseignants ont commencé à utiliser le nom Université X en signe de protestation.

Le groupe de travail Standing Strong (Mash Koh Wee Kah Pooh Win) a mené des recherches historiques et des échanges au sein de la communauté, en plus d'examiner les résultats de quelque 6000 sondages. Toutefois, il ne sait pas encore s'il recommandera un changement de nom.

Après que la statue d'Egerton Ryerson ait été démolie début juin, l'Université a déclaré qu'elle ne serait ni restaurée ni remplacée.

Réputation et pertinence

Changer de nom aidera l'Université Ryerson à protéger sa réputation et à rester pertinent dans le monde de l'enseignement supérieur, soutient Jennifer Taback, qui est originaire de la Première Nation Shawanaga et présidente de Design de Plume à Sudbury, en Ontario.

Mme Taback croit que les professeurs et les étudiants de l'Université Ryerson qui s'expriment exposent un écart irréconciliable entre les valeurs exprimées par l'école – qui comprennent la diversité, le respect mutuel et le bien-être – et les croyances racistes de son homonyme.

Les noms font l'objet d'une plus grande attention alors que l'histoire est envisagée d'un œil de plus en plus critique. La province canadienne la plus à l'ouest, la Colombie-Britannique, fait l'objet d'un examen minutieux pour avoir commémoré le colonialisme; la rue Dundas à Toronto est en passe d'être renommée en raison des liens de son homonyme avec l'esclavage; et l'équipe d'Edmonton dans la Ligue canadienne de football (LCF) a récemment changé de nom pour se défaire de son caractère racial.

Dans ce contexte social, les attentes à l'égard de l'Université Ryerson sont élevées et la marque pourrait être endommagée si l'école n'est pas perçue comme suivant le mouvement, déclare Mme Taback.

Estimer le prix d'un éventuel changement de nom est un autre défi. En 2012, le changement de nom de l'Université de Western Ontario pour celui de l'Université Western a coûté 200 000 $.

Certaines personnes dont Mme Taback ont déclaré à CBC News que renommer l'Université Ryerson coûterait certainement plus cher, impliquant des phases de consultation, de conception et de mise en œuvre qui pourraient prendre quelques années.

Les 40 bâtiments de l'école, ses 141 programmes et ses équipes sportives interuniversitaires sont concernés par le projet.

Le gouvernement de l'Ontario a déclaré que l'Université Ryerson devrait payer pour un changement de nom à partir de son propre budget de fonctionnement.

Les collectes de fonds se porteraient mieux

S'il a été rapporté que l'Université Ryerson a perdu des donateurs à cause de la controverse, des experts affirment que le choix de s'éloigner des liens avec le colonialisme, le racisme et les pensionnats pour Autochtones aiderait probablement la collecte de fonds.

Mon instinct me dit qu'il y a beaucoup plus de gens qui veulent soutenir financièrement ces changements que ceux qui pourraient s'abstenir, dit Guy Mallabone, président-directeur général de Global Philanthropic Inc, une société de conseil en collecte de fonds basée à Calgary.

Les donateurs sont très attentifs aux préoccupations de la communauté et aux idées progressistes, souligne M. Mallabone.

Les concepts d'inclusion, diversité et équité sont des valeurs que de plus en plus de donateurs veulent voir, dit-il, ajoutant que les donateurs s'attendent à ce que les établissements d'enseignement soient des leaders dans le support de ces principes.

CBC News a contacté 10 donateurs de l'Université Ryerson – des particuliers, des entreprises, des fondations et des syndicats – mais un seul a accepté d'accorder une entrevue au sujet de la controverse.

La courtière immobilière Vivian Risi, qui a fait un don important à l'équipe de soccer de l'Université Ryerson en 2016, dit qu'elle aimerait voir un changement de nom. Des changements doivent avoir lieu, c'est inévitable, souligne-t-elle.

Marketing et produits dérivés

Des jeunes traversent la rue sous une passerelle qui relie deux bâtiments de l'Université Ryerson.

L'Université Ryerson à Toronto.

Photo : La Presse canadienne / Chris Young

L'Université Ryerson peut transformer sa crise de marque en une bénédiction si elle crée une nouvelle marque authentique qui correspond aux valeurs actuelles de l'Université, avance Fang Wan, professeur de marketing à l'École des affaires I.H. Asper de l'Université du Manitoba.

Cela donnerait à l'école une nouvelle occasion de convaincre les Canadiens qu'elle est une organisation cool – elle est très ouverte, très diversifiée, ajoute-t-elle.

Le changement de nom pourrait même aider l'Université à vendre davantage de tasses à café et de chandails à capuchon, ajoute Mme Wan, car les marques qui embrassent des valeurs progressistes peuvent avoir une puissante portée idéologique, ce qui peut étendre leur attrait au-delà de leur propre communauté.

Les Elks d'Edmonton, l'équipe récemment rebaptisée de la LCF, est un exemple de la façon dont les changements de marque progressistes peuvent porter fruit. L'équipe a déclaré à CBC News que ses ventes de produits dérivés ont augmenté de façon substantielle par rapport à la saison dernière et que les ventes lors du match d'ouverture de la saison ont rivalisé avec celles d'un match de la Coupe Grey.

Nouveaux partenariats

Un changement de marque donnerait également à l'Université Ryerson l'occasion d'examiner son processus de sélection de fournisseurs sous l'angle de la réconciliation, lance Mark Rutledge, président de la Société des graphistes du Canada.

Il y a beaucoup d'agences autochtones au Canada, beaucoup de designers autochtones talentueux au Canada, dit-il.

Basé à Whitehorse, Mark Rutledge est le concepteur principal d'Animikii Inc, une entreprise technologique entièrement autochtone. Il est Ojibway, de la Première Nation de Little Grand Rapids, au Manitoba.

Les designers et experts autochtones pourraient non seulement aider l'Université Ryerson à créer une meilleure image de marque, mais l'école pourrait aussi se poser comme un exemple brillant de réconciliation en travaillant avec des artistes autochtones.

M. Mihalicz pense également qu'il est temps que les voix autochtones soient entendues. L'opinion publique évolue sur ces questions, et je pense que nous devons l'écouter, dit-il.

Et si un changement de marque inclusif prend du temps et de l'argent, M. Taback estime que le jeu en vaut la chandelle.

Quel que soit son coût, c'est un investissement dans la réconciliation.

D'après les informations de James Dunne de CBC

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