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Afghanistan : « Les talibans ont gagné », déclare le président en fuite

Des militants islamistes ont pénétré dans le palais présidentiel, selon des images diffusées par la chaîne d'information Al-Jazeera.

Un hélicoptère militaire survolait Kaboul le 15 août 2021.

Un hélicoptère militaire survolait Kaboul le 15 août 2021.

Photo : Reuters

Agence France-Presse
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Le président afghan Ashraf Ghani a déclaré dimanche avoir fui son pays pour éviter un « bain de sang », reconnaissant que « les talibans ont gagné ».

Le mouvement islamiste radical s'apprête à revenir au pouvoir, 20 ans après en avoir été chassé par une coalition menée par les États-Unis en raison de son refus de livrer le chef d'Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001.

Dans un entretien avec Al-Jazeera, le porte-parole du bureau politique des talibans a insisté sur la souveraineté du nouveau gouvernement et sur sa position farouchement opposée aux interventions étrangères. Nous n'intervenons pas dans les affaires des autres et nous n'accepterons pas d'ingérence dans les nôtres, a lancé Mohammad Naeem.

Ce dernier a ajouté du même souffle que le régime allait garantir la sécurité des citoyens et des missions diplomatiques et qu'il état prêt à adresser les inquiétudes de la communauté internationale à travers le dialogue.

Étant donnée la situation sécuritaire qui se dégrade, nous plaidons et travaillons à assurer – et appelons toutes les parties – à respecter et faciliter le départ sécurisé et ordonné de tous les citoyens étrangers et afghans qui souhaitent quitter le pays, peut-on lire dans une déclaration écrite signée par une soixantaine de pays, dont le Canada et les États-Unis.

Président en exil

Le président de l'Afghanistan, Ashraf Ghani, en compagnie de son ministre de la Défense, Bismillah Khan Mohammadi.

Le président de l'Afghanistan, Ashraf Ghani, en compagnie de son ministre de la Défense, Bismillah Khan Mohammadi

Photo : Reuters / gouvernement afghan

L'ancien président a quitté l'Afghanistan, laissant les gens dans cette situation. Il rendra ses comptes devant Dieu et les gens rendront leur jugement, a déclaré l'ancien vice-président Abdullah Abdullah, également chef du Haut Conseil pour la réconciliation nationale.

Ce départ parachève la déroute des dernières semaines, après sept années au pouvoir au cours desquelles il ne sera pas parvenu à rebâtir son pays, contrairement à ses promesses.

Le principal intéressé a indiqué dans une publication Facebook que d'innombrables patriotes auraient été tués et que la capitale aurait été détruite s'il était resté.

« Les talibans ont gagné [...] et sont à présent responsables de l'honneur, de la possession et de la préservation de leur pays. »

— Une citation de  Ashraf Ghani, président de l'Afghanistan

Le ministre de la Défense, Bismillah Khan Mohammadi, n'a pas mâché ses mots pour dénoncer la fuite du président. Ils nous ont lié les mains dans le dos et ils ont vendu le pays, a-t-il déclaré sur Twitter. Maudits soient Ghani et sa bande.

Des leaders afghans se sont réunis pour créer un conseil qui veillera à la passation des pouvoirs aux talibans. L'ancien président Hamid Karzai a annoncé sur les réseaux sociaux qu'il fera partie de ce groupe aux côtés des chefs du Haut Conseil pour la réconciliation nationale et du parti Hezb-e-Islami.

Craintes d'exactions

Des unités militaires de l’Émirat islamique d’Afghanistan sont entrées dans la ville de Kaboul pour y assurer la sécurité, a annoncé sur Twitter un porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid.

Les talibans ont aussi promis qu'ils ne chercheraient à se venger ni des militaires ni des fonctionnaires ayant servi sous le gouvernement actuel, ni de qui que ce soit.

Un porte-parole des militants islamistes, Suhail Shaheen, a confirmé au réseau BBC qu'ils escomptaient un transfert pacifique du pouvoir dans les prochains jours. Nous voulons un gouvernement inclusif […] ce qui veut dire que tous les Afghans en feront partie, a-t-il assuré.

Des talibans dans la ville de Herat.

En 10 jours, les talibans ont virtuellement conquis l'entièreté de l'Afghanistan.

Photo : Reuters

Or, certains gestes commis par les talibans dans des régions récemment conquises envoient un message bien différent. Le mois dernier, après s'être emparés du district de Malistan, des combattants talibans sont allés de porte en porte pour dénicher des personnes ayant collaboré avec le gouvernement et piller des demeures, tuant 27 civils et faisant une dizaine de blessés, selon la Commission indépendante des droits de la personne de l'Afghanistan.

Human Rights Watch, pour sa part, souligne que les talibans menacent et arrêtent régulièrement des journalistes, surtout des femmes et les reporters qui critiquent le groupe militant extrémiste.

Une prise de contrôle totale en à peine 10 jours

En à peine 10 jours, les talibans, qui avaient lancé leur offensive en mai à la faveur du début du retrait final des troupes américaines et étrangères, ont pris le contrôle de quasiment tout le pays.

La débâcle est totale pour les forces de sécurité afghanes, pourtant financées pendant 20 ans à coups de centaines de milliards de dollars par les États-Unis, et pour le gouvernement.

Ashraf Ghani a demandé aux forces de sécurité de garantir la sécurité de tous les citoyens. C'est notre responsabilité et nous le ferons de la meilleure manière possible. Quiconque pense à créer le chaos ou à piller sera traité avec force, a-t-il déclaré dans une vidéo diffusée avant l'annonce de sa fuite.

Les talibans avaient peu auparavant pris le contrôle de deux prisons proches de la capitale, libérant des milliers de prisonniers, et les autorités craignaient que des criminels n'en viennent à troubler l'ordre public.

Panique dans la capitale

Dimanche soir, la panique qui s'est installée dans la capitale afghane tout au long de la journée a atteint l'aéroport. Des centaines de personnes ont mis le cap sur l'endroit dans l'espoir de pouvoir fuir le pays, même si aucun avion commercial ne peut décoller ou atterrir sur le tarmac.

Des séquences vidéo montrent d'ailleurs des foules qui marchent vers les appareils cloués au sol à l'aéroport Hamid Karzai.

Les États-Unis ont annoncé qu'ils prenaient une série de mesures pour sécuriser l'aéroport de Kaboul

Au fil de la journée, les magasins ont fermé, des embouteillages monstres sont apparus, des policiers ont été vus troquant leur uniforme pour des vêtements civils.

À la tombée de la nuit, la chaîne locale 1TV faisait état de plusieurs explosions dans la ville, qui avait été jusque-là relativement silencieuse. Le réseau a aussi indiqué que des coups de feu avaient retenti près de l'aéroport.

Des Afghans font la queue devant une banque de Kaboul.

La cohue s'est emparée de la capitale afghane avec l'arrivée des talibans, dimanche.

Photo : Associated Press / Rahmat Gul

Le groupe d'aide humanitaire Emergency a noté que 80 blessés avaient été transportés à l'hôpital de Kaboul, qui fonctionne au maximum de sa capacité.

Une énorme cohue était visible près de la plupart des banques, les gens cherchant à retirer leur argent tant qu'il en était encore temps.

Nous apprécions le retour des talibans en Afghanistan, mais nous espérons que leur arrivée mènera à la paix et non à un bain de sang. Je me rappelle, quand j'étais enfant, très jeune, les atrocités commises par les talibans, a déclaré Tariq Nezami, commerçant de 30 ans.

Il y avait des signes perceptibles que les gens étaient déjà résignés à changer de vie. Ainsi, dimanche, dans un quartier de Kaboul, un ouvrier badigeonnait le panneau publicitaire d'un salon de beauté montrant une mariée glamour.

Lorsque les talibans dirigeaient le pays, entre 1996 et 2001, ils avaient imposé leur version ultra-rigoriste de la loi islamique.

Les talibans ont maintes fois promis que, s'ils revenaient au pouvoir, ils respecteraient les droits de la personne, en particulier ceux des femmes, en accord avec les valeurs islamiques.

Avec les informations de l'Associated Press et de Reuters

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