Des lacunes administratives au Nunavut menacent le bien-être des enfants, selon un rapport

Un rapport pointe les lacunes de différents ministères du Nunavut pour ce qui est de la collecte de données sur les enfants et les jeunes.
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La représentante de l’enfance et de la jeunesse du Nunavut, Jane Bates pointe du doigt le fait que les Ministères échouent à collecter des données précises sur ce public, un facteur qui selon elle contribue aux abus dont sont victimes les enfants et les jeunes sur le territoire.
Jane Bates, la représentante de l’enfance et de la jeunesse au Nunavut a dû, pendant deux jours, répondre à des questions sur le rapport annuel 2019-2020 préparé par son bureau lors d’une audience du comité qui supervise les opérations gouvernementales et les comptes publics.
Mme Bates a soutenu pendant ces journées que les abus sexuels commis envers les enfants sont une crise
au territoire et que le manque de données collectées par le gouvernement empêche de voir s’opérer des changements positifs.
Son rapport a pour objectif de mettre le doigt sur les faiblesses dans les services proposés et sur les problèmes systémiques auxquels font face les enfants du Nunavut.
Le document affirme, par exemple, que 70 % des délinquants sexuels enregistrés au Nunavut ont commis des offenses envers des enfants. Même si lors de l'audience Mme Bates a affirmé que ce pourcentage se situe actuellement autour de 50 %, il n’en reste pas moins très choquant.
Elle affirme que, selon le Centre canadien de protection de l’enfance, seulement 7 % des cas d’abus d'enfants sont signalés à la police ou aux agences de protection de l’enfance.
En mars 2020, la ministre des Services à la famille du Nunavut, Elisapee Sheutiapik, a avoué que son ministère ne possédait pas de statistiques complètes sur le nombre d’appels reçus concernant des abus d'enfants, mais qu’elle pouvait affirmer avec confiance qu’ils en recevaient environ deux par semaines.
Reprenant cette déclaration, Janes Bates a donc calculé que cela en ferait 104 par an, mais elle déplore qu’il n’y ait aucun moyen d’avoir un chiffre exact, vu que le ministère ne garde aucune trace de ces appels.
Dans son rapport elle signale que plusieurs cases sont laissées vides pour le nombre de renvois que les services familiaux reçoivent en lien avec des personnes signalant des abus d'enfants et le type d’abus rapporté. Une situation qu'elle juge inquiétante.
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Une technologie défaillante et un manque d’employés
La sous-ministre des Services à la famille, Yvonne Niego, blâme ces absences de données sur la mauvaise technologie et affirme que son bureau travaille à mettre sur pied un meilleur système de suivi.
Pendant plus de 17 ans, j’ai travaillé sans avoir accès à un système électronique de gestion des dossiers ou un système d'information sur les clients à la pointe de la technologie, mais nous avons tout de même pu collecter des données
, lui a rétorqué Jane Bates.
Toujours selon le rapport, le ministère des Services à la famille n’est pas le seul qui échoue à récolter des informations de base. Le ministère de l’Éducation est incapable de communiquer le nombre moyen d’élèves par classe en fonction du niveau et le ministère de la Santé ne sait pas combien de jeunes Nunavummiut se sont suicidés dans l’année précédente.
Ce genre d'informations que nous demandons devrait être en la possession du gouvernement
, a fait remarquer Mme Bates, dont le bureau dépend de ces données pour son travail.
Elle affirme que si les ministères travaillaient à récolter ne serait-ce qu’un an de données, celles-ci pourraient mieux informer le gouvernement sur le bon fonctionnement des services et sur les besoins en ressources humaines pour les offrir.
Les sous-ministres de l’Éducation, de la Santé et de la Justice, qui étaient tous présents à l’audience, ont fait valoir que leurs échecs étaient dus à la difficulté de recruter, retenir et loger des employés.
Janes Bates pense qu'avoir plus d’employés ne sert à rien si les procédures et la législation ne sont pas respectées.
Elle rappelle que ce genre de données est nécessaire pour que les ministères soient tenus responsables de leurs décisions et que sans celles-ci, elle est incapable de se justifier auprès d’un enfant ou d’une famille sur la raison pour laquelle son bureau n’est pas intervenu dans un cas.
L’environnement et les expériences de l’enfance ont un impact majeur sur la trajectoire de vie
, assure Mme Bates en rappelant que son objectif est d’assurer que les services gouvernementaux soient équitables, éthiques et consistants
.
Le comité fera ses recommandations aux différents ministères, basés sur ce qu’il a entendu à l'audience. Ces recommandations seront par la suite déposées à l’Assemblée législative, en septembre.
Avec des informations de Jackie McKay