D'occupant du parc Strathcona à locataire de chambre
Des centaines de sans-abri avaient élu domicile sous la tente dans le parc municipal Strathcona dans le quartier Downtown Eastside de Vancouver.
Photo : Radio-Canada / Ben Nelms/CBC
Pendant près d’un an, les piquets de tente des campeurs étaient bien enfoncés au parc Strathcona, à Vancouver. Ils étaient des centaines à avoir élu domicile sur ce carré de verdure urbaine. Le 30 avril dernier, ils ont été évincés. Plusieurs ont délaissé les murs de toiles pour des murs de bois et de plâtre, posant leurs bagages dans une chambre.
Un après-midi de mai, Russell Seeber, vélo en main, s’arrête devant le Cow'aa, anciennement appelé hôtel Ramada Inn. Il a le goût de jaser de son nouveau chez lui.
Russell Seeber est l'un des anciens occupants du parc Strathcona. Il a abouti au 435, West Pender après le démantèlement du campement.J’ai ma propre chambre d’une bonne taille. J’ai une salle de bain avec une douche, dit-il d’un ton léger. J’ai un lit grand format. Un lit très confortable, une télévision à écran plat.
« J’essaie de m’habituer à être à l’intérieur à nouveau. C’est difficile, mais je ne veux pas être sans-abri pour le reste de ma vie. »
L’homme de 37 ans a été sans abri pendant 5 ans. Il a passé environ neuf mois au parc Strathcona. Je suis chanceux et reconnaissant, affirme-t-il. On a tous besoin de se sentir en sécurité dans ce monde. Ça fait du bien. J’ai été itinérant pendant cinq ans, c’est un peu difficile de m’adapter à une vie normale, mais je le fais.
Il admet toutefois que le fait de quitter le parc Strathcona et ses amis a été difficile pour lui.
Une bonne nuit de sommeil
Il y a des périodes où je ne me sentais pas en sécurité au [parc Strathcona], mentionne de son côté David Bruce, 53 ans. C’est bien de ne plus être à la rue et de pouvoir avoir une bonne nuit de sommeil.
L’objectif est de créer un esprit de communauté dans l'immeuble, selon Kevin Eaton, directeur de la Société Lu’ma Native Housing, qui gère Cow aa.
M. Eaton ajoute que du personnel de soutien est aussi mis à la disposition des locataires. Nous fournissons des programmes culturels, explique-t-il. Nous offrons de l’appui sur place afin de les aider à prendre des rendez-vous médicaux, dentaires et psychologiques. Nous les assistons dans le chemin et l'avenue qu'ils veulent emprunter et nous essayons de suivre cette voie avec eux.
Les chambres Cow aa ont été attribuées à des personnes qui se définissent comme Autochtone. Les locataires déboursent 375 $ par mois.
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Des moins chanceux?
Pour d'autres, la transition à l’intérieur a été moins facile. Fiona York, bénévole auprès des occupants du parc Strathcona, croit que la date limite du 30 avril a mis beaucoup de pression sur les gens.
Il y en a qui se sont retrouvés avec des punaises de lit ou qui ne sont pas contents parce qu’ils sont près de quelqu’un avec qui ils ont un conflit
, dit-elle à titre d'exemple. Rester sobre devient également plus difficile pour d’anciens occupants du parc. Fiona York pense aussi que le fait que des logements qui ont été assignés soient temporaires occasionne une pression supplémentaire.
Près de 300 anciens occupants à l’intérieur
BC Housing mentionne que la santé et le bien-être des locataires sont une priorité. La Société d'État ajoute qu'elle n'a aucune connaissance d'épidémie de punaises de lit dans les immeubles accueillant d'anciens campeurs. Elle affirme que ses partenaires et elle ont travaillé pendant des mois afin de placer ceux qui vivaient dans le parc dans des espaces disponibles correspondant le mieux à leurs besoins.
Selon BC Housing, d’octobre 2020 au 1er mai 2021, 296 anciens occupants du camp de Strathcona ont trouvé refuge à l’intérieur.
Il n'y a pas de date limite au-delà de laquelle un ancien campeur ne pourra rester dans un logement avec soutien, précise BC Housing. C’est une première étape pour les amener à l’intérieur et leur permettre de recevoir des services. Lorsque les besoins de base sont satisfaits, logement chaud, repas quotidiens et hygiène, nous voyons de nombreuses personnes trouver un emploi et stabiliser leur vie.
Un pas dans la bonne direction
Selon la professeure à la faculté de planification communautaire et régionale de l’Université de la Colombie-Britannique Penny Gurstein, l'approche gouvernementale est une assez bonne stratégie. Il y avait un besoin pour que ces gens quittent le campement, note-t-elle. Cela devenait non sécuritaire.
À son avis, la meilleure solution serait d’avoir des logements permanents, sûrs et adéquats pour les gens. Ce sont des hôtels en ce moment, souligne-t-elle. On prévoit de les réaménager en appartements on en unités pour les gens. Mais, pour le moment, ce ne sont que des chambres d'hôtel. Il y a donc cette limite à cela.
Un regard vers l’avenir
Même s’il n’y a pas de date butoir, David Bruce et Russell Seeber espèrent pouvoir quitter le 435, West Pender un jour. C’est un tremplin
, dit David Bruce qui souhaite faire de la place pour d’autres personnes.
La tête remplie d'espoir, Russell Seeber croit que la prochaine étape pour lui sera peut-être de retourner à l’école, de décrocher un emploi ou même de se rapprocher de sa famille.