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Rapport sur la réalité policière : « Le modèle actuel a atteint ses limites »

Le document demande à ce que les comités de sécurité publique comptent un tiers de membres civils non élus.

Deux autos-patrouilles immobilisées dans une rue.

Le rapport recommande notamment de fusionner des services de police pour améliorer leur efficacité.

Photo : Radio-Canada / Stéphane Grégoire

Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Réduction du nombre de corps de police au Québec, intégration de l'UPAC à une nouvelle entité, meilleure intégration des civils dans les instances décisionnelles policières : le rapport du Comité consultatif sur la réalité policière contient plus d'une centaine de recommandations pour accroître l'efficacité des forces de l'ordre.

Dans le cadre d'un volumineux rapport rassemblant pas moins de 138 recommandations, les cinq membres du Comité achèvent ainsi des travaux lancés en décembre 2019, sous l'égide de la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault.

Celle-ci a brièvement réagi sur Twitter, disant saluer le travail consciencieux du Comité consultatif.

La ministre se prononcera sur le fond du rapport mercredi à l'Assemblée nationale.

Le constat est clair : aux dires des auteurs du rapport, les services de police du Québec, dans leur forme actuelle, ne sont pas en mesure de lutter efficacement contre un monde criminel qui est en transformation constante.

Le document rendu public mardi matin propose ainsi la création d'une unité spécialisée en cybercriminalité et en crimes économiques. C'est à cette unité que serait rattachée l'UPAC, l'Unité permanente anticorruption, pour justement faire profiter les autorités de l'expertise de ce groupe en matière de lutte contre la corruption, peut-on lire dans le rapport.

Aux dires de l'ex-maire de Sherbrooke Bernard Sévigny, l'un des cinq membres du comité consultatif, la très grande majorité des crimes numériques ne sont pas rapportés aux autorités; et à peine une personne sur 1000 victimes de ce genre d'acte criminel se tournerait ensuite vers la police.

Cette même unité s'attaquerait aussi à la fraude, au blanchiment d'argent et à l'extorsion.

Le Québec n'a pas les moyens de scinder ses ressources et de travailler en silos, a déclaré M. Sévigny.

Une nouvelle carte des services policiers

Outre la création de la nouvelle unité, l'une des principales propositions du rapport consiste à faire passer de 31 à 13 le nombre de corps policiers au Québec.

Le document mentionne que lors des consultations auprès des intervenants du milieu policier et d'ailleurs, il est apparu que la disparité en ce qui a trait aux services rendus par les différents services de police inquiète plusieurs parties prenantes.

Comment en effet escompter que la capacité des services de police à répondre aux exigences de leur niveau de service respectif soit partout la même, alors que certains d’entre eux comptent à peine plus de 20 policiers et d’autres plus de 200, écrivent ainsi les auteurs.

Cette disparité aurait des effets bien réels, notamment du côté des centres d'aide aux victimes d'actes criminels, pour qui les différences en matière de couverture territoriale peuvent engendrer un sentiment d'insécurité et d'iniquité.

« Le modèle actuel a atteint ses limites. »

— Une citation de  Extrait du rapport du Comité consultatif

Cette fusion aurait déjà reçu l'aval de l'ADPQ, l'Association des directeurs de police du Québec, qui estime que le regroupement permettrait une rationalisation des ressources, [en plus] d'augmenter la robustesse des équipes de manière générale dans toutes les sphères d'activités.

Les changements seraient particulièrement importants dans la grande région de Montréal. Ainsi, deux nouveaux services de police de grande envergure pourraient assurer la couverture du territoire de la rive nord, en compagnie du Service de police de Laval, tandis qu'un seul service de même taille couvrirait la rive sud, en collaboration avec le Service de police de l'Agglomération de Longueuil.

Plusieurs autres services de police de moindre envergure, comme ceux de Bromont, de Granby ou encore de Saint-Jérôme, seraient rattachés à la Sûreté du Québec et cesseraient d'exister en tant qu'organisations indépendantes.

Cette volonté a été rapidement rejetée par la Fédération québécoise des municipalités (FQM).

Réagissant par voie de communiqué, la FQM dit s'inquiéter de la disparition de plusieurs services policiers municipaux et des possibles augmentations de coûts que pourrait occasionner la réforme du système policier.

Plusieurs communautés ont fait le choix de conserver leur service pour desservir leur communauté et pour en contrôler les coûts. Or, le rapport suggère la disparition de ce service de proximité. À titre de porte-parole des régions, la FQM ne peut accepter cette proposition, soutient ainsi Jacques Demers, président de la FQM et maire de Sainte-Catherine-de-Hatley.

Un groupe d'experts mandaté par le gouvernement pour proposer des pistes de réforme de la police au Québec a déposé son rapport. Il propose de réduire le nombre de corps policiers et remet l'existence de l'UPAC en question. Reportage de Pascal Robidas.

Revoir la gouvernance pour ramener la confiance

Autre point essentiel mis de l'avant dans le rapport, l'importance de revoir la formule de la gouvernance des services policiers.

Après tout, c'est par la confiance que lui porte le public que la police obtient sa légitimité d'action et ses pouvoirs d'intervention, peut-on y lire. Et pourtant, de toutes les provinces canadiennes, c'est au Québec que l'on accorde le moins de place aux citoyens dans les structures de gouvernance policière.

Il est ainsi recommandé qu'au moins le tiers des membres des comités de sécurité publique soient des citoyens non élus représentant les populations desservies.

Le rapport propose aussi que chaque instance de gouvernance, au sein des corps policiers, effectue une reddition de comptes publique sous la forme d'un rapport annuel.

Enfin, les auteurs suggèrent que tous les policiers et constables spéciaux du Québec soient soumis à un seul et même code de discipline. Une idée à combiner avec une transformation du code de déontologie policière, jugé adapté à la réalité du travail par à peine 25 % des personnes ayant participé à la grande enquête du Comité consultatif, qui a consulté 4000 personnes.

Le profilage doit être banni explicitement par la loi

Les auteurs du rapport estiment que la formation générale des policiers doit également servir à évaluer la personnalité des candidats, selon l'ex-directeur du Service de police de la Ville de Québec et membre du comité Alexandre Matte.

Les résultats scolaires et les tests physiques sont souvent les seuls éléments de sélection. Nous recommandons qu'une mesure d'évaluation des aptitudes personnelles et des habiletés interpersonnelles soit intégrée, a-t-il souligné.

De plus, les auteurs proposent d'utiliser la Loi sur la police pour mettre fin au profilage racial par le biais des interpellations aléatoires.

Le comité propose d'interdire explicitement, dans la Loi sur la police, l'interpellation de piétons ou de passagers dans un véhicule basée sur un motif discriminatoire , a expliqué l'ex-députée fédérale et membre du comité Marlene Jennings.

Poudre aux yeux

Dans une première réaction, la Ligue des droits et libertés (LDL) et la Coalition contre la répression et les abus policiers (CRAP) ont estimé que les recommandations relatives à la question des interpellations policières sont de la poudre aux yeux.

Dans un communiqué, les deux organismes déplorent vivement que la grande réforme du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) que le Québec doit entreprendre ne soit pas au rendez-vous dans le rapport.

Cinq ans après son entrée en fonction, le BEI n’est toujours pas un organisme d’enquête véritablement indépendant, transparent et impartial. Il faut donner un coup de barre rapidement et entreprendre une réforme en profondeur du BEI pour restaurer la confiance de la population et des familles des victimes , affirme Lynda Khelil, porte-parole de la LDL.

Par ailleurs, la LDL réitère sa demande d’un moratoire sur les interpellations policières partout au Québec.

La FPJQ satisfaite, mais veut plus

Michaël Nguyen travaille à l'ordinateur.

Le président de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, Michaël Nguyen.

Photo : Radio-Canada

Quant à la Fédération professionnelle des journalistes (FPJQ), elle salue par communiqué le dépôt du rapport et la présence de recommandations favorisant une meilleure transparence dans la communication d'informations relatives aux enquêtes.

La fédération applaudit la recommandation du comité d'uniformiser les procédures en communication des différents corps policiers, qui sont actuellement très inégales.

Elle espère toutefois que le ministère de la Sécurité publique donnera suite à la recommandation de mettre sur pied un comité de travail ayant pour objectif d’établir des règles de communication policière claires et communes concernant les contraintes et le partage d’informations sur les enquêtes et les dépôts d’accusations.

La FPJQ se dit disponible et disposée à collaborer avec le ministère de la Sécurité publique, le directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) de même que toute autre instance compétente pour travailler à améliorer les communications publiques des différents corps policiers.

Toutefois, la FPJQ estime que d'autres chantiers restent à entamer sur le sujet, notamment l'ouverture d'un dialogue quant à l'accessibilité des ondes policières cryptées par les médias d'information.

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