Bois d'œuvre canadien : les États-Unis cherchent à doubler les tarifs
Un entrepôt de bois d'oeuvre
Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose
La volonté des États-Unis de doubler les tarifs imposés sur le bois d'œuvre en provenance du Canada ferait augmenter les coûts pour les producteurs et grugerait leurs profits, mais n'affecterait probablement pas la facture des consommateurs, selon des analystes.
La décision du département américain du Commerce de faire passer les droits compensateurs et antidumping de 8,99 % à un taux préliminaire de 18,32 %, vendredi, a suscité des critiques de l'industrie canadienne et du gouvernement canadien, mais a reçu des applaudissements au sud de la frontière.
Il est peu probable que cette augmentation entraîne une hausse des prix, car ils ont déjà plus que doublé au cours de la dernière année pour atteindre des niveaux sans précédent, relève Kevin Mason, directeur général chez ERA Forest Products Research.
Comme il s'agit d'un taux préliminaire, les taux actuels des dépôts en espèces continueront de s'appliquer jusqu'à ce que les taux finaux soient publiés, probablement en novembre.
Les droits de douane américains sur les produits canadiens de bois d'œuvre résineux constituent une taxe pour les consommateurs américains
, a réagi la ministre de la Petite Entreprise, de la Promotion des exportations et du Commerce international, Mary Ng par voie de communiqué.
Nous continuerons à contester ces droits de douane injustifiés et préjudiciables par tous les moyens possibles. Nous demeurons convaincus qu'une solution négociée à cet enjeu commercial de longue date est non seulement possible, mais aussi dans l'intérêt de nos deux pays
, a-t-elle promis.
Dans un avis aux investisseurs, l'analyste Paul Quinn, de RBC Marchés des capitaux, a dit croire que des taux plus élevés motiveront les producteurs pour chercher une résolution du différend sur le bois d'œuvre, ce qui pourrait débloquer des liquidités importantes
. Il a aussi évoqué une estimation selon laquelle les dépôts douaniers perçus auprès des producteurs canadiens s'élèvent à plus de 4 milliards de dollars.
L'impact des taux proposés vendredi varie selon l'entreprise, a-t-il souligné, avec une légère hausse de 9 à 11,4 % prévue pour West Fraser; de 4,2 à 15,8 % pour JD Irving; de 4,6 à 21 % pour Canfor; et de 20,3 à 30,2 % pour Produits forestiers Résolu.
L'administration de l'ex-président américain Donald Trump avait imposé un tarif de 20 % sur le bois résineux canadien en 2018, mais avait dû l'abaisser à près de 9 % à la fin de l'année dernière après une décision favorable de l'Organisation mondiale du commerce.
Proposition troublante
et odieuse
La présidente du conseil du commerce du bois d'œuvre de la Colombie-Britannique, Susan Yurkovich, a qualifié l'augmentation proposée de troublante
et particulièrement odieuse
dans le contexte actuel de prix records.
Alors que les producteurs américains restent incapables de répondre à la demande intérieure, les actions de l'industrie qui se traduisent par ces tarifs injustifiés finiront par nuire encore davantage aux consommateurs américains en augmentant leurs coûts
, a-t-elle avancé dans un communiqué.
Mme Yurkovich a exhorté l'industrie américaine à cesser d'alléguer, comme elle le fait depuis plusieurs décennies, que le bois d'œuvre canadien est injustement subventionné, l'invitant plutôt à travailler avec les producteurs canadiens pour répondre à la demande mondiale de produits à faibles émissions de carbone.
Dans un communiqué de presse, le coprésident de la U.S. Lumber Coalition, Jason Brochu, a pour sa part applaudi l'engagement du département américain du Commerce à appliquer les lois commerciales contre les importations de bois canadien, qui seraient selon lui subventionnées et soutenues par des pratiques commerciales déloyales
.
La coalition affirme que l'industrie américaine reste ouverte à un nouvel accord commercial sur le bois d'oeuvre à condition que le Canada démontre son sérieux en vue d'éventuelles négociations.