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Envoyé spécial

COVID-19 : le cauchemar indien

Une foule de voyageurs dans une station de bus à New Delhi.

Une foule de voyageurs se presse à une station de bus pour rejoindre leur lieu d'origine quelques heures avant l'entrée en vigueur d'un nouveau confinement d'une semaine ordonné par le gouvernement de Delhi, à New Delhi, le 19 avril 2021.

Photo : Getty Images / JALEES ANDRABI

  • Philippe Leblanc

NEW DELHI, Inde - La pandémie de COVID-19 se propage à une vitesse folle en Inde, le deuxième pays le plus touché du monde. Le pays a enregistré plus de 273 000 nouveaux cas et 1600 décès lundi. La deuxième vague y est si forte que la courbe de transmission est presque une ligne verticale depuis deux semaines.

Après le confinement de la capitale financière Mumbai la semaine dernière, la situation est maintenant critique à Delhi et dans la région de l'Uttar Pradesh. Des confinements d'une semaine ont d'ailleurs débuté à Delhi et à Lucknow lundi soir.

Philippe Leblanc en Inde

Pendant six semaines, notre nouveau correspondant en Asie sillonne l'Inde pour nous raconter le deuxième pays le plus peuplé de la planète.

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En journée, des centaines de travailleurs faisaient la file à la gare d'autobus de Lucknow. L'exode des grandes villes confinées a commencé la semaine dernière. Les scènes d'exode rappellent les débuts de la pandémie en Inde.

Je travaillais dans une usine à Delhi, mais on s'attendait à un confinement, explique un jeune travailleur assis à l'arrière d'un autocar, en escale. Je n'avais plus d'emploi, ni d'argent, ni de nourriture. Je retourne dans mon village pour pouvoir survivre sans mendier. J'en ai pour 12 heures de voyagement.

Philippe Leblanc en Inde

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Philippe Leblanc devant le Taj Mahal.

Fermer les commerces avant la décision gouvernementale

Des magasins fermés en Inde.

La zone de Burail dans le secteur 45 a l'air déserte pendant le confinement de la fin de semaine imposé à Chandigarh.

Photo : Getty Images / Hindustan Times

Samedi, les boutiques du marché de Lucknow étaient déjà fermées, même si le confinement n'avait pas encore été annoncé. C'est une initiative des commerçants.

Ils ont peur pour leur santé et ils ont choisi de tout fermer pour quatre jours, explique une vendeuse de tabac au coin d'une rue. Ils n'en pouvaient plus d'attendre après le gouvernement qui ne se branche pas.

Le centre-ville était désert même avant le confinement. Ses ventes de tabac avaient chuté des deux tiers.

Le virus se répand comme le vent, dit-elle, le regard hagard. J'ai peur moi aussi, mais je dois continuer de travailler pour aider ma famille.

Contrôle policier en Inde

Des policiers de Delhi contrôlent les voyageurs à la frontière entre Delhi et Gurugram pendant le couvre-feu imposé en fin de semaine.

Photo : Getty Images / Hindustan Times

Un bilan effroyable et sous-évalué

À quelques coins de rue de là, l'Hôpital universitaire de Lucknow ne traite que des patients contaminés par le virus. Jusqu'à 700 lits sont libres.

La docteure et cheffe d'équipe Zeba Siddiqui explique que l'amphithéâtre de l'établissement a été converti en salle de surveillance des patients. Des caméras ont été installées dans toutes les pièces pour limiter les interactions entre le personnel et les patients. Les médecins ont à l'oeil les signes vitaux et autres données, en plus de voir les patients à la caméra.

Officiellement, le nombre d'infections quotidiennes a été multiplié par plus de 6,5 en un mois en Inde, mais la réalité serait bien pire.

Il y a un grand écart entre ce que les données disent et ce qu'est la réalité, confirme la Dr Siddiqui. Beaucoup de personnes ne sont pas testées, surtout dans les régions rurales.

En bordure de la rivière au coeur de Lucknow, un grand panache de fumée s'échappe dans le ciel. Les défunts hindous sont couverts de fleurs, puis brûlés conformément à leur religion. Des bûchers funéraires supplémentaires ont été aménagés à Lucknow. Ce qui ne fait qu'alimenter les rumeurs sur le bilan réel de la pandémie en Inde.

Les jeunes victimes de la deuxième vague

Le relâchement des mesures sanitaires, les grands rassemblements religieux et la pénurie de vaccins sont blâmés pour cette deuxième vague.

Tendance inquiétante dans un pays où les deux tiers de la population ont moins de 35 ans, les patients infectés sont plus jeunes que l'an passé.

Nous voyons maintenant des jeunes de 20 et 25 ans sous respirateur artificiel, dit la docteure Siddiqui.

Les hôpitaux indiens sont débordés. L'établissement universitaire de Lucknow songe même à prodiguer des soins à domicile à certains patients.

Nous pouvons leur fournir des bouteilles d'oxygène, explique la docteure Farzana Mahdi qui dirige l'hôpital. Nous en avons acheté récemment.

L'établissement a réussi à se procurer ces bouteilles d'oxygène convoitées. À Delhi, par exemple, plusieurs hôpitaux vivent une pénurie inquiétante au moment où le nombre de patients explose.

Le variant indien qui fait peur

Inquiétude supplémentaire, la récente découverte d'un variant indien qui se propage particulièrement dans les villes les plus touchées de l'Inde.

À Mumbai et Delhi, il aurait été détecté dans plus de 50 % des tests positifs. On appelle aussi ce variant indien double mutant. Il serait plus contagieux et plus résistant aux anticorps, donc potentiellement aux vaccins. On en sait peu sur ses risques réels, mais l’Inde pourrait devenir un incubateur géant de COVID-19, si ce n'est déjà fait.

Il est déjà trop tard, croit la docteure Farzana Mahdi. Les confinements et couvre-feux en vigueur à certains endroits depuis la semaine dernière ont été imposés trop tard. Le mal est déjà fait. C'est avant la fête des couleurs, il y a trois semaines, qu'il fallait agir.

Dans le sous-continent indien qui se croyait immunisé contre la pandémie pas plus tard qu'il y a deux mois, l'inquiétude et le désespoir progressent encore plus rapidement que la deuxième vague.

  • Philippe Leblanc

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