Denis Coderre : « Je suis prêt à mettre tous les efforts pour retrouver Montréal »

« C’est sûr que vous allez me revoir », avait conclu Denis Coderre le 8 novembre 2017, lors de sa dernière conférence de presse, après sa défaite au terme de son unique mandat à la mairie de Montréal.
Photo : Radio-Canada / Christian Côté
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Dans son livre qui paraît le 24 mars en librairie, l’ancien maire de Montréal mêle bilan de son action depuis le début de sa carrière, autopsie de sa défaite en 2017 face à Valérie Plante et esquisse d’un programme de reconquête du pouvoir.
C’est sûr que vous allez me revoir
, avait conclu Denis Coderre le 8 novembre 2017, lors de sa dernière conférence de presse, après sa défaite au terme de son unique mandat à la mairie de Montréal.
Le contenu de son livre de 328 pages, intitulé Retrouver Montréal, laisse peu de doute sur les ambitions de l’homme politique. Des ambitions collectives pour la métropole qui s’interprètent également comme des ambitions personnelles, bien que Denis Coderre ne se déclare pas ouvertement candidat aux élections du 7 novembre prochain.
Le livre s’ouvre sur un acte de contrition : il ne devrait son sort politique qu’à son propre désintérêt.
Il faut avouer que la dernière campagne électorale (ou la non-campagne) que je venais de vivre avait été désastreuse, ne serait-ce qu’au plan personnel. Problèmes de santé, perte d’intérêt pour la politique, tempérament irrité et irritable, plus rien ne passait […]. Je n’aurai jamais été le candidat de ma réélection. J’étais le maire qui achevait son mandat et qui maintenant avait hâte de le finir.
Une défaite électorale est presque toujours multifactorielle, mais nombre d’observateurs ont lié le destin de Denis Coderre dans les urnes à son obstination à justifier la tenue d'une course du championnat de formule E, un événement qui s’est révélé un échec financier. L’ancien maire ne fait aucune allusion à ce dossier dans l’autopsie de sa défaite.
Sans jamais nommer Valérie Plante au cours des cinq chapitres qui composent le livre, il distille néanmoins certaines critiques sur la gestion des affaires municipales sous Projet Montréal. Il fustige notamment l’étroitesse de perspective concernant l’envergure internationale de la métropole, qui serait sacrifiée au bénéfice d’une politique des quartiers.
En choisissant l’esprit de quartier comme unique donnée dans l’équation des solutions à apporter, nous mettons de côté le rôle crucial et vital qui revient d’emblée à la constitution d’une métropole rayonnante.
Dans la préface du livre, son ex-homologue parisienne, Anne Hidalgo, vante pourtant la nécessité d’une gouvernance de proximité : Parce qu’ils sont les mieux placés pour dire ce qui est bon pour eux, nous voulons agir au plus près des citoyennes et des citoyens et, surtout, avec eux. C’est notamment l’ambition de la ville du quart d’heure pour laquelle je milite à Paris.
Denis Coderre s’étend longuement sur la notion du vivre-ensemble, que ce soit pour plus de proactivité dans le dossier de l’itinérance ou pour être plus audible dans les demandes de financement destiné au logement social.
Accepter l’existence du racisme systémique n’implique pas que tous les gens sont racistes
, écrit par ailleurs l’ancien maire, pour qui les questions de discrimination pourraient avoir une incidence sur la direction du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), en l’intégrant plus directement à la structure municipale : Il serait pertinent à tout le moins d’étudier la possibilité que le directeur du Service de police puisse également faire partie du leadership de l’appareil administratif, devenir directeur général adjoint de la Ville, en lien avec certains aspects du développement social de notre communauté.
Un chapitre entier est consacré à la mobilité durable et à l’environnement. Et si l’ancien maire reconnaît qu’il n’était pas le champion des transports actifs, il explique ne plus pouvoir se passer de son vélo et de ses promenades dans l’arrondissement de Ville-Marie, où il habite.
Mais il met en garde contre une approche dogmatique de la mobilité urbaine. Pour arriver à une métropole verte, fluide et efficiente, il nous faudra être courageux, intelligents et surtout pragmatiques, inclusifs. […] L’approche et la méthode ne doivent pas être à la merci de doctrines radicales. Nous pouvons construire dans le respect, en étant ouverts sur les besoins et les réalités de toutes et tous. Et il n’est pas souhaitable d’être à la merci d’un groupe quelconque
, écrit Denis Coderre.
Comme un écho à l’implantation parfois critiquée du Réseau express vélo, il ajoute, un peu plus loin : L’élargissement des trottoirs, la piétonnisation de rues et la mise en service de pistes cyclables ne doivent donc pas être conçus et aménagés de manière rigide et dogmatique. Des stratégies punitives ou régressives visant à exacerber [sic] une partie de la population ne peuvent être bonnes.
D’un autre côté, il affiche des objectifs très ambitieux en matière de transports structurants.
Tant mieux si M. Coderre voit la lumière et considère que le transport collectif, c’est important.
L'ouvrage contient une carte des lignes et des stations de métro (ou d'autres modes) envisagées par l’ancien maire.
On y trouve notamment un axe diagonal
qui suit peu ou prou le tracé de la ligne rose, projet porté par son ancienne adversaire. Un axe qui serait moitié souterrain, moitié aérien.

Dans son livre, Denis Coderre propose un axe diagonal qui suit peu ou prou le tracé de la ligne rose portée par Valérie Plante.
Photo : Radio-Canada
Mais cette ligne disparaît quelques pages plus loin, lorsque Denis Coderre présente sa vision du métro à Montréal en 2040 : 176 stations au total, dont 73 stations du Réseau express métropolitain (REM), qui n’en compte pour l’instant que 49 pour ses phases 1 (vers l’ouest) et 2 (vers l’est).
Avec le REM, une porte s’est ouverte sur un monde de possibilités, dont la participation d’institutions parapubliques comme la CDPQ au montage financier de projets. En particulier avec les fonds d’investissement et les caisses de retraite qui se retrouvent aujourd’hui avec des capitaux considérables et qui peinent à trouver des projets à la hauteur de leurs capacités financières.
Il défend par ailleurs l’option aérienne du REM de l’Est en reprenant les arguments de rentabilité de la Caisse, tout en souhaitant un débat sur le sujet. Un [métro] majoritairement aérien, réduisant significativement les coûts de construction par kilomètre, diminuant les coûts d’exploitation par l’automatisation et permettant une plus grande fréquence.
On peut aussi noter que son tracé du REM de l’Est est légèrement modifié au centre-ville, puisqu’il desservirait aussi la Cité-du-Havre (qui pourrait accueillir un éventuel stade de baseball), puis la place D’Youville, dans le Vieux-Montréal, avant de reprendre l’axe du boulevard René-Lévesque.

Une carte du métro de Montréal, vision 2040, qui se trouve dans le livre de Denis Coderre
Photo : Gracieuseté
Pour améliorer les finances et la marge de manœuvre de la Ville, Denis Coderre souhaite aussi ajouter une ligne dans la colonne des revenus pour Montréal, qui puise ses ressources financières dans la taxation foncière. Selon lui, obtenir un point de pourcentage de la taxe de vente du Québec (TVQ) serait légitime, étant donné l’apport de la région métropolitaine à l’économie québécoise. Pour une ville qui contribue à près de 50 % du PIB [produit intérieur brut], cela me semble logique. Un point de TVQ représente un peu plus de 1,5 milliard de revenu, soit 25 % du budget total de la Ville.
Diplomatie urbaine, mesures pour le commerce de détail, hauteur des gratte-ciel et statut particulier pour les artisans du secteur culturel sont autant de sujets passés au crible dans ce livre-programme qui donnera sans aucun doute du grain à moudre à la campagne municipale s'annonçant comme un deuxième round pour lui, après avoir été au tapis en 2017.
Ce n’est pas pour rien que Denis Coderre a mis la boxe au centre de sa stratégie de remise en forme depuis quatre ans. Et comme le disait Churchill, cité en épigraphe : Le succès n’est pas final. L’échec n’est pas fatal. C’est le courage de continuer qui compte.