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Michael Spavor jugé en deux heures en Chine, après 830 jours de détention

Le premier ministre Justin Trudeau dénonce le « manque de transparence » entourant les procès des « deux Michael », et assure qu'Ottawa travaille « sans relâche » pour qu'ils reviennent au pays.

Michael Spavor, devant un calendrier chinois.

L'homme d'affaires canadien Michael Spavor, lors d'une entrevue accordée par Skype depuis Yangi, en Chine, le 2 mars 2017.

Photo : La Presse canadienne / AP

Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Après 830 jours de détention en Chine, Michael Spavor a finalement comparu vendredi devant un tribunal de Dandong pour une séance qui a tout juste duré deux heures. Son sort n'a pas encore été décidé.

L'homme d'affaires canadien de 45 ans, connu pour avoir développé des relations d'affaires en Corée du Nord, située à un jet de pierre du tribunal où il a comparu, est accusé d'avoir volé et transmis des secrets d'État.

Le verdict sera annoncé à une date ultérieure, a indiqué le tribunal sur son site web, mais l'issue de la procédure ne soulève guère de doute : 99 % des prévenus qui comparaissent en Chine sont reconnus coupables.

La comparution de Michael Spavor s'est déroulée derrière des portes closes. Ni le public ni les médias n'ont été admis dans la salle d'audience. La nature exacte des accusations portées contre lui n'a pas été divulguée.

Contraint de faire le pied de grue devant le tribunal, le numéro deux de l'ambassade canadienne en Chine, Jim Nickel, dit avoir appris de l'avocat de l'homme d'affaires que la procédure a duré deux heures.

« Le processus n'a pas été transparent. […] Nous n'avons pas pu avoir accès à la salle d'audience. Nous n'avons pas pu parler à Michael Spavor avant le procès. »

— Une citation de  Jim Nickel, chef de mission adjoint à l'ambassade du Canada à Pékin
Deux hommes et une femme sont debout devant la porte fermée d'un immeuble.

Le chef de mission adjoint à l'ambassade du Canada à Pékin, Jim Nickel, a tenté d'entrer dans le tribunal de Dandong où était jugé Michael Spavor, mais en vain.

Photo : Reuters / CARLOS GARCIA RAWLINS

Le diplomate canadien n'a donné aucun autre détail sur ce qui s'est déroulé à l'intérieur du tribunal, conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels.

« Il y a un flou par rapport à ce qui est ressorti dans la salle d'audience. Nous sommes frustrés de ça. »

— Une citation de  Jim Nickel, chef de mission adjoint à l'ambassade du Canada à Pékin

Selon M. Nickel, les Chinois ont refusé tout accès au tribunal en plaidant que le droit chinois a préséance sur le droit international dans les dossiers de sécurité nationale.

En fait, ce n'est pas le cas. La Chine a l'obligation de permettre un accès consulaire en vertu du droit international, a-t-il dit.

Michael Spavor, aux côtés de Dennis Rodman, à l'aéroport de Pékin.

Michael Spavor (à gauche) était établi dans le nord-est de la Chine. Il organisait des voyages vers la Corée du Nord, notamment pour la vedette américaine du basketball Dennis Rodman. Il a été reçu par le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un.

Photo : Getty Images / AFP/WANG ZHAO

Sortant de son silence, la famille de Michael Spavor a jugé nécessaire de s'exprimer et d'exiger sa libération inconditionnelle.

Son maintien injuste et continuel en détention qui le prive de sa liberté est à la fois inéquitable et déraisonnable, surtout compte tenu du manque de transparence de l'affaire, soulignent ses proches.

M. Spavor, font-ils valoir, aimait vivre et travailler en Chine et n'aurait jamais fait quoi que ce soit pour offenser les intérêts chinois ou le peuple chinois.

« C'est un moment rempli d'émotion pour sa famille, pour lui-même, pour les Canadiens et pour le gouvernement canadien. »

— Une citation de  Jim Nickel, chef de mission adjoint à l'ambassade du Canada à Pékin

À Ottawa, le premier ministre Justin Trudeau a assuré une fois de plus que son gouvernement faisait tout en son pouvoir pour obtenir la libération de M. Spavor et de son compagnon d'infortune, Michael Kovrig, qualifiant leur détention d'inacceptable.

C’est désolant de voir que non seulement la Chine a utilisé la détention arbitraire contre nos deux citoyens canadiens, mais aussi que ce processus se passe dans la non-transparence, avec même des représentants consulaires, des diplomates [qui] n’ont pas accès à ce processus, a-t-il commenté en conférence de presse.

Quand il n’y a pas de transparence par rapport au processus, c’est difficile d'évaluer ou de passer [un] commentaire, a-t-il ajouté quand on lui a demandé si le procès avait été juste à son avis.

« La Chine doit comprendre que leur approche de diplomatie coercitive ne fonctionne pas et continue de ne pas être bien reçue par des pays – beaucoup plus que le Canada – à travers le monde. »

— Une citation de  Justin Trudeau, premier ministre du Canada

Des pays alliés solidaires du Canada

La comparution de Michael Spavor a donné lieu à une ostensible démonstration de solidarité de la part de nombreux pays alliés du Canada.

Des diplomates de nombreux autres pays, dont les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, la Suède, le Danemark et l'Australie, sont venus de Pékin pour l'occasion.

Jim Nickel, entouré d'hommes et de femmes, parfois masqués, dans une rue.

Le chef de mission adjoint à l'ambassade du Canada à Beijing, Jim Nickel, était entouré de diplomates de pays alliés devant le tribunal de Dandong où a lieu l'audience de Michael Spavor. « Nous apprécions ce soutien international », a-t-il dit.

Photo : Reuters / CARLOS GARCIA RAWLINS

J’ai été encouragé, touché, de voir le nombre de diplomates de différents pays, incluant les États-Unis, qui se sont présentés à Dandong pour le procès, a commenté Justin Trudeau.

« Même s’ils n’[y] ont pas eu accès, ils étaient là pour démontrer leur solidarité non seulement avec les deux Canadiens détenus, mais aussi pour les principes de droit et de justice qui doivent être respectés dans le monde. »

— Une citation de  Justin Trudeau, premier ministre du Canada

M. Spavor a été arrêté en décembre 2018, en même temps que l'ex-diplomate canadien Michael Kovrig, également accusé d'espionnage. M. Kovrig comparaîtra lundi devant un tribunal de Pékin.

En mars 2019, l'agence de presse officielle Chine nouvelle avait allégué que M. Spavor était l'une des principales sources d'information de M. Kovrig.

Le sort réservé à ceux qu'on appelle les deux Michael est considéré par Ottawa comme une mesure de représailles à l'arrestation de la directrice financière de Huawei, Meng Wanzhou.

Plusieurs hommes se pressent autour d'un fourgon de la police, sous le regard de policiers chinois.

Des journalistes et le diplomate Jim Nickel (avec un béret, au centre) se pressent autour d'un fourgon cellulaire dans l'espoir d'y apercevoir Michael Spavor, à son arrivée au tribunal de Dandong.

Photo : La Presse canadienne / AP/Ken Moritsugu

La fille du fondateur du géant chinois des télécommunications a été arrêtée le 1er décembre 2018 à Vancouver, à la demande de Washington, qui l'accuse d'avoir contourné les sanctions américaines contre l'Iran.

La procédure d'extradition visant Meng Wanzhou est entrée dans sa dernière phase. Les dernières audiences avant une décision canadienne sont prévues en mai.

Pékin dément tout lien entre ces deux affaires.

Jeudi, un porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Zhao Lijian, a insisté sur le fait que les causes des deux Canadiens ont été traitées conformément aux lois chinoises et à leurs droits individuels.

Des policiers chinois font des gestes pour repousser une petite foule, devant une entrée grillagée.

Des policiers chinois éloignent les journalistes de l'entrée du tribunal de Dandong, après l'arrivée du fourgon cellulaire transportant Michael Spavor.

Photo : Getty Images / AFP/NOEL CELIS

Il y a deux semaines, le premier ministre canadien Justin Trudeau a plutôt accusé Pékin d'avoir fabriqué de toutes pièces les accusations déposées contre MM. Spavor et Kovrig.

Il est évident que les deux Michael ont été arrêtés sous de fausses accusations [...] après que nous nous sommes acquittés de nos responsabilités envers le traité d'extradition et envers notre allié, les États-Unis, a-t-il dit.

Ottawa espère une intervention de Washington

Le procès de M. Spavor s'est ouvert alors qu'une rencontre entre de hauts dirigeants chinois et américains a débuté en Alaska dans une atmosphère glaciale, pour la première prise de contact directe à ce niveau sous l'administration de Joe Biden.

À Ottawa vendredi, le premier ministre Trudeau a dit être très confiant que le sort des deux Michael sera un enjeu abordé lors de ce sommet.

Plus tôt, un porte-parole de la diplomatie chinoise avait soutenu qu'il n'y avait aucun lien entre ce sommet et le début du procès de deux hommes.

« Il n'y a aucun lien avec le dialogue stratégique de haut niveau entre la Chine et les États-Unis. »

— Une citation de  Zhao Lijian, porte-parole du ministère des Affaires étrangères

Le Wall Street Journal avait rapporté début décembre que Huawei discutait d'un accord avec l'administration américaine qui permettrait à Meng Wanzhou de regagner la Chine.

M. Biden avait pris la défense de MM. Spavor et Kovrig en février, lors d'un sommet virtuel avec le premier ministre Trudeau, affirmant que les êtres humains ne sont pas des jetons.

La même semaine, le secrétaire d'État américain Anthony Blinken avait promis une solidarité absolue avec le Canada après sa propre conférence virtuelle avec le ministre Garneau.

Michael Spavor et quatre autres femmes, agenouillés devant une école.

Michael Spavor, photographié avec des étudiantes nord-coréennes, en 2012. « Michael n'est qu'un homme d'affaires ordinaire, qui a fait des choses extraordinaires pour bâtir des liens constructifs entre le Canada, la Chine et la Corée du Nord », affirme sa famille.

Photo : Reuters / JAMES PEARSON

Les conditions de détention des deux Michael n'ont rien à voir avec celles de Mme Meng, placée en résidence surveillée dans une villa cossue de Vancouver, où elle peut se déplacer munie d'un bracelet électronique.

Par contraste, les deux Canadiens n'ont aucun accès à leurs avocats ni à leurs proches, et n'ont de contact qu'avec des représentants de leur ambassade, une fois par mois.

Selon Jim Nickel, la dernière rencontre de responsables canadiens a eu lieu le 3 février et des requêtes pour le voir avant son procès n'ont pas abouti.

Ces contacts ont été interrompus l'an dernier pendant neuf mois au nom de la lutte contre l'épidémie de COVID-19.

Avec les informations de Agence France-Presse, La Presse canadienne, et Reuters

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