Avec les vaccins, la vie reprend son cours en CHSLD
Épicentres de la pandémie, les CHSLD retrouvent un peu de vie depuis que les résidents et le personnel ont pu se faire vacciner. Les sourires sont au rendez-vous, même derrière les masques.
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Marc-André Laveault, préposé aux bénéficiaires, avec une résidente.
Photo : Radio-Canada / Pasquale Harrison-Julien
Pour pénétrer dans les couloirs d'un tel établissement et y réaliser un reportage, les règles sont strictes : test de dépistage effectué en amont, jaquette, masque et lunettes. Jusqu’à tout récemment, il était impossible pour les journalistes d’y mettre les pieds.
Arrivés dans la salle à manger, on assiste à une scène qui peut sembler banale, mais qui n’existait plus avant le vaccin. Cinq résidents du CHSLD
de Saint-Henri se retrouvent ensemble, dans la pièce baignée de soleil.Certaines précautions demeurent : chacun reste à sa table, à une distance de deux mètres, et le personnel continue de porter des équipements de protection.
Mais ces quelques moments de plaisir
groupés représentent un semblant de retour à la normale pour ces résidents, confinés dans leurs chambres ces derniers mois, même s’ils ont pu profiter d'activités dans leurs chambres et de quelques sorties accompagnées.
« La socialisation est très importante pour les résidents. On les encourage à sortir de leur chambre, tout en préservant la sécurité de l’intervention. »
Le centre d’hébergement Saint-Henri, qui se trouve dans le quartier montréalais du même nom, a connu des éclosions de COVID-19. Huit résidents en sont morts.
L’endroit accueille environ 175 résidents âgés de 50 à 85 ans. Certains sont en perte d’autonomie physique, d’autres souffrent de démence ou de la maladie d’Alzheimer.
En tout, 5615 personnes sont mortes de la COVID-19 dans les CHSLD
du Québec, sur les 10 334 décès totaux. En cette fin de deuxième vague, les décès se produisent désormais davantage à la maison.Seuls ensemble
Maracas, coloriages, activités motrices; les préposés aux bénéficiaires sortent l’attirail complet pour stimuler les cinq résidents présents.
D’un côté, l’un d’eux tente de stimuler la mémoire d’une personne âgée. Est-ce que ça vous dit quelque chose cette image? C’est un animal qui va dans l’eau et sur la terre. Une tor…? Une tor…? Une tortue!
En toile de fond musicale, Mais puisqu'il faut se quitter, une chanson de Dean Edwards des années 1950.
Plus loin dans la même pièce, Marc-André Laveault aide une autre personne à faire des coloriages à grand renfort d’encouragements. Issu de la troisième cohorte de nouveaux préposés aux bénéficiaires, il est arrivé au CHSLDJ’avais besoin d’aider, de donner à ma façon du mieux que je pouvais
, explique-t-il.
Pour lui, l’arrivée du vaccin se voit dans les yeux des résidents, ce qui n’a pas de prix
.
« Je pense qu’ils recommencent à avoir un peu de joie, de vie et d’espoir. Et nous, on essaie de les encourager là-dedans. Ça n’a pas été facile pour eux autres. »
Pamela Audette est bien placée pour en témoigner, elle qui a reçu sa première dose avec les autres résidents avant Noël.
Il y a quelques jours, elle a accepté de recevoir la visite de sa sœur, elle aussi vaccinée. Elle préférait ne pas la voir pour ne pas la mettre en danger. Dimanche, nous avons été capables d’aller en bas. C’était une magnifique journée. J’étais dans mon fauteuil roulant. Elle, avec une chaise.
Être avec elle, simplement. Un moment simple, dont la pandémie la privait.
Un cadeau de Noël convoité
Fatima Salhi, gestionnaire responsable du CHSLD
Saint-Henri, se remémore le moment où elle a appris que son centre d’hébergement deviendrait le premier du CIUSSS du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal à recevoir une première ronde de vaccins, tout juste avant Noël.« Quel bonheur! On sentait même l’effervescence bien avant qu’on annonce la date. De la part de nos résidents, de leur famille et de nos employés. »
En décembre dernier, 89 % des résidents et 56 % du personnel avaient accepté de se faire vacciner. Depuis, certains qui avaient refusé le vaccin ont manifesté de l'intérêt pour le recevoir lorsque la deuxième dose arrivera, bientôt, dans le centre d’hébergement.
Les résidents sont contents. Les proches aidants aussi, car on a pu en vacciner certains en respectant les critères du gouvernement, explique-t-elle. En plus, le printemps s’en vient, on a des journées ensoleillées.
Son équipe prévoit une activité cabane à sucre, et a surtout pu ramener la messe, à laquelle les résidents tenaient beaucoup.
La pandémie laisse toutefois des traces durables. Même la capitaine du navire a la voix qui tremble et les larmes qui lui montent aux yeux au fil de l’entrevue. C’était une épreuve… C’était une année difficile. C’est sûr qu’on passe plus de temps ici qu’à la maison. Et psychologiquement, voir nos résidents décéder, ce n’était pas facile. Pour les résidents. Leurs familles également
, évoque Mme Salhi.
Elle ajoute : Le pire est derrière nous, et c’est comme un mauvais rêve. Mais on ne baisse pas la garde.
À écouter :
- Retour à une vie (presque) normale pour les résidents vaccinés d'un CHSLD : le reportage de Pasquale Harrison-Julien diffusé à l'émission L'heure du monde