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Ronald Weinberg a caché des millions à l’étranger, selon l’Agence du revenu du Canada

Le fraudeur Ronald Weinberg aurait soumis de fausses déclarations de revenus et caché des millions aux Bermudes et en Floride, selon les autorités fiscales canadiennes, a appris Enquête. L’ex-PDG du studio d’animation Cinar soutient qu’il n’avait rien à déclarer, car les fonds n’étaient pas à son nom.

Portrait de Ronald Weinberg.

Ronald Weinberg, cofondateur de la firme d'animation Cinar, en 2006.

Photo : La Presse canadienne / Paul Chiasson

Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Quelques mois à peine après avoir été reconnu coupable de fraude envers les actionnaires de Cinar en 2016, Ronald Weinberg s’est retrouvé dans la ligne de mire de l’Agence du revenu du Canada (ARC).

Les autorités fiscales soutiennent qu’il a intentionnellement caché toute information relative à ses activités commerciales et à ses placements à l’étranger, selon des documents obtenus par Enquête et The Fifth Estate.

L’ARC lui réclame plus de 348 000 $ en pénalités pour ne pas avoir divulgué des millions de dollars dans des comptes en Floride. Selon l’Agence, il aurait également refusé de fournir des explications au sujet de transferts de près de 4 millions de dollars provenant de banques aux Bahamas et aux Bermudes.

Édifice en pierre de l'Agence du revenu du Canada.

L'administration centrale de l'Agence du revenu du Canada, à Ottawa.

Photo : Radio-Canada

Dans des documents déposés à la Cour canadienne de l’impôt, l’avocat de Ronald Weinberg, Jean Groleau, déclare que son client n’a pas pu répondre à la requête du fisc, car son procès était alors en cours et que les documents pertinents étaient situés à l’extérieur du Canada.

Il ajoute que son client n’était pas le titulaire des comptes étrangers, contrairement aux allégations de l’ARC, et que le comptable de Ronald Weinberg ne lui avait jamais dit qu’il devait remplir des formulaires déclarant ces actifs.

Son avocat a demandé au tribunal de rejeter les pénalités imposées par l’ARC contre son client. Aucune date de procès n’a encore été déterminée.

Jean Groleau n'a pas répondu aux nombreux appels téléphoniques de CBC/Radio-Canada. Lors d'un appel, son partenaire, Jacques Plante, a déclaré que ni lui ni Jean Groleau ne pouvaient parler en raison du secret professionnel.

Ronald Weinberg n'a pas répondu à de nombreuses demandes d'entrevue.

Il a obtenu sa libération conditionnelle totale en 2019. Selon ses conditions de remise en liberté, il doit payer ses impôts et faire preuve de transparence quant à ses revenus.

Le reportage Les millions disparus du journaliste Frédéric Zalac et des réalisateurs Paul Émile d'Entremont et Harvey Cashore est diffusé à Enquête le jeudi 25 février à 21 h à ICI Télé. À ICI RDI, ce sera le dimanche à 18 h 30.

Où sont passés les millions disparus?

En 1999, Ronald Weinberg avait transféré aux Bahamas, sans l’autorisation du conseil d’administration de Cinar, 120 millions de dollars américains amassés auprès d’investisseurs lors d’une émission publique d’actions.

Cet argent avait été placé dans des sociétés liées aux fonds d’investissement montréalais Norshield et Mount Real, des fonds qui se sont révélés par la suite n’être qu’une gigantesque fraude à la Ponzi.

Au moment où les avocats mandatés par Cinar ont tenté de récupérer les millions envoyés aux Bahamas sans autorisation, les fonds se sont envolés vers d’autres paradis fiscaux.

Des milliers de petits investisseurs canadiens y ont perdu leurs économies. Plus de 500 millions de dollars ont disparu. À ce jour, la plupart de ces fonds restent introuvables.

C'est l'une des fraudes les plus importantes dans l'histoire du Canada, selon Matthew Ferguson, le procureur aux poursuites pénales et criminelles pendant le procès criminel de Ronald Weinberg.

Des sociétés-écrans à l'île de Man

Enquête, en collaboration avec The Fifth Estate, a trouvé des nouvelles pistes à l'île de Man, un paradis fiscal situé entre l’Irlande et l’Angleterre.

Portrait de Ronald Weinberg.

Ronald Weinberg, cofondateur de la firme d'animation Cinar, en 2006.

Photo : La Presse canadienne / Paul Chiasson

Au registre des entreprises, nous avons trouvé quatre sociétés-écrans portant des noms d’armes anciennes – Katar, Sceax, Shashqua et Spatha. Les actionnaires de ces sociétés sont des prête-noms.

Les documents officiels révèlent cependant qu’elles ont été mises sur pied pour des Canadiens.

Ces quatre sociétés ont été créées en décembre 2001, la même semaine où Ronald Weinberg et ses complices tentaient de fuir leurs créanciers. Trois d’entre elles, Katar, Sceax et Spatha, ont été dissoutes au moment où la fraude des fonds de Norshield et Mount Real a été révélée au grand jour en 2005.

Le moment choisi est trop fortuit pour n'être qu'une coïncidence, croit Wes Voorheis, un des avocats qui a tenté de retrouver les fonds de Cinar.

Wes Voorheis assis à une table.

L’avocat Wes Voorheis s’est rendu aux Bahamas en 2004 afin de tenter de retrouver les millions de dollars de Cinar.

Photo : Radio-Canada / CBC

Si j'avais eu cette information pendant que nous étions toujours sur la piste, nous aurions essayé d'aller au fond des choses, ajoute-t-il.

La quatrième société, Shashqua, était administrée par Michael Morris, un Canadien qui était aussi le banquier de Ronald Weinberg aux Bahamas.

La professeure de droit fiscal et députée du Parti libéral du Québec Marwah Rizqy croit elle aussi qu’il ne s’agit pas d’une coïncidence.

« Moi, je ne crois pas aux coïncidences, je crois beaucoup plus au travail et à la préparation, et ici ils étaient clairement préparés. »

— Une citation de  Marwah Rizqy

Lorsqu’il avait été interrogé en 2006 par les avocats de Cinar, Ronald Weinberg avait admis qu’un compte avait été mis sur pied pour lui par le banquier Michael Morris.

Il avait alors déclaré sous serment que ce compte n’était pas à son nom, mais qu’il en était le bénéficiaire. Il a affirmé n’avoir aucun contrôle sur ce compte et a prétendu n’avoir reçu aucun document ni aucun relevé bancaire.

Je ne connais personne normalement constitué qui va transférer à quelqu’un situé à l'extérieur du pays des millions de dollars sans recevoir aucun écrit, aucune confirmation écrite, aucun relevé bancaire, soulève Marwah Rizqy.

Marwah Rizqy, porte-parole libérale pour la Capitale-Nationale

La fiscaliste Marwah Rizqy occupe maintenant un siège d'élue à l'Assemblée nationale.

Photo : Radio-Canada

Dix ans plus tard, le 21 septembre 2016, l’Agence du revenu du Canada a transmis à Ronald Weinberg un avis de cotisation pour les millions de dollars à l’étranger qu’il n’avait pas déclarés.

Exactement le même jour, à l'île de Man, des procédures pour liquider la société Shashqua ont été enclenchées.

Ronald Weinberg a nié être au courant des sociétés de l'île de Man. L’avocat fiscaliste de M. Weinberg, Jean Groleau, n’a pas répondu à notre courriel au sujet de ces sociétés.

Michael Morris n'a pas répondu à notre demande d'entrevue.

Maison d’hôte de luxe au Panama

Interrogé sous serment par les avocats de Cinar en 2007, Ronald Weinberg a admis être allé au Panama à plusieurs reprises, mais il a nié y avoir eu des relations d'affaires. Il avait alors affirmé que ses parents avaient assumé les coûts de ses voyages.

Une maison sur pilotis

La maison d’hôte Sweet Bocas au Panama

Photo : sweetbocaspanama.com/Alfonso de Bejar

Selon un article récemment rédigé par sa conjointe, Annick Bélanger, et publié l’été dernier dans le magazine Private Islands, Ronald Weinberg se serait rendu au Panama en 2005 parce qu’il avait une occasion d’affaires.

Elle dévoile que le couple a acheté une île privée dans le populaire archipel de Bocas del Toro et l'a transformée en complexe touristique ultra haut de gamme appelé Sweet Bocas.

On peut y louer une villa en teck sur pilotis situé au-dessus d'un récif de corail pour la somme de 20 000 $ US par semaine.

La liste ultraconfidentielle des invités comprend un producteur et réalisateur lauréat d’un Oscar, des acteurs, des vedettes de la mode, des titans de l'immobilier, des banquiers de Wall Street, des entrepreneurs en haute technologie et des philanthropes, selon le magazine.

Annick Bélanger n’a pas répondu aux questions de Radio-Canada au sujet du rôle de son époux dans l’achat de cette propriété.

Avec la collaboration de Mark Kelley.

Contactez-nous

Vous avez des renseignements à nous faire parvenir sur ce sujet? Vous pouvez joindre Frédéric Zalac par courriel à frederic.zalac@radio-canada.ca ou par téléphone au 604 662-6882

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