Trois rencontres marquantes dans le parcours de la journaliste et auteure Lucie Pagé
La série Artiste sous influence met en lumière les gens et événements qui ont façonné le parcours de créatrices et créateurs de la grande région de la capitale nationale.

La journaliste et auteure Lucie Pagé met en lumière trois personnes qui ont façonné son parcours.
Photo : Avec la gracieuseté de Libre Expression
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Du moment où Lucie Pagé a commencé à écrire, elle n’a plus arrêté. D’abord à titre de journaliste et documentariste, puis en tant qu’auteure en bonne et due forme. Elle s’apprête d’ailleurs à revenir à Gatineau, à la fin de février, en tant qu’invitée d’honneur du Salon du livre de l’Outaouais, avec sous le bras son plus récent roman, Marie-Lumière. Sa trajectoire d’écrivaine s’inscrit dans une suite à la fois logique et organique, du révélateur à la formatrice, en passant par celui qui sert de fondation à son œuvre littéraire.
Née en Nouvelle-Écosse en 1961, Lucie Pagé a souvent déménagé, puisque son père travaillait au sein des Forces armées canadiennes. Elle a 12 ans quand, après avoir vécu en Ontario et au Manitoba, sa famille s’installe en Outaouais, région pour laquelle elle garde un attachement particulier depuis ses études secondaires et collégiales.
Depuis 1990, elle vit à cheval entre le Québec et l’Afrique du Sud, pays où elle s’est initialement rendue en tant que journaliste, où elle s’est enracinée par amour et qui imprègne aujourd’hui ses romans.
Le déclencheur : Claude Marcil
Après un DEC en psychologie décroché au Cégep de l’Outaouais, Lucie Pagé se destine à des études universitaires en enseignement des mathématiques, portée par ses fortes notes en la matière. Elle prend toutefois un an de pause pour partir en voyage autour du monde, envoyant des articles au journal étudiant du Cégep.
Son potentiel journalistique latent
lui donne envie de poursuivre dans cette voie à son retour au pays. Lucie Pagé obtient un baccalauréat en journalisme de l’UQAM en 1985, et un premier stage à Radio-Canada dans la foulée. Or, elle doute, ne se fait pas confiance du tout. Jusqu’au jour où son chemin croise celui de Claude Marcil.
Le plus grand recherchiste au Québec
, comme elle le qualifie, voit le potentiel qu’elle-même ignore posséder. Il fouette son ego, au point où elle veut lui prouver qu’elle est capable de pratiquer le métier. Car c’est une chose d’avoir un bac en poche, c’en est une autre de s’en servir!
évoque Lucie Pagé.
« C’est à cause de Claude que je suis sortie, vraiment sortie, de mon cocon. [...] Il faut parfois quelqu’un pour nous réveiller et moi, ç’a été Claude. »
Cinq ans plus tard, M. Marcil convainc sa protégée de soumettre sa candidature pour rejoindre les rangs de l’émission Nord-Sud, de Télé-Québec. Je rêvais de devenir correspondante à l’étranger
, fait valoir la reporter.
Son rêve devient réalité lorsqu’on l’envoie en Afrique du Sud pour couvrir la libération de Nelson Mandela, survenue le 11 février 1990.
Le fond : Nelson Mandela
Au fil des entrevues menées sur le terrain à cette occasion, Lucie Pagé tombe amoureuse de celui qui deviendra ministre dans le cabinet de Nelson Mandela lorsque ce dernier sera élu président en 1994 : le militant antiapartheid Jay Naidoo.
En épousant Jay, la Québécoise a donc l’occasion de non seulement croiser Nelson Mandela dans la sphère publique, mais aussi de le fréquenter dans l’intimité.
« Je n’écrirais pas ce que j’écris aujourd’hui si je n’avais pas connu Nelson Mandela. Si je n’avais pas été sa voisine, son amie. Il me fallait ce fond-là pour me lancer. »
Il m’a donné le goût d’écrire. Et pour écrire sur lui, entre autres, j’avais besoin de plus que trois feuillets [un feuillet équivaut à 25 lignes de texte pour un article, NDLR]!
dit en riant la Québécoise aux racines sud-africaines.
Il lui parle d’écriture, lui qui a écrit des centaines de lettres au cours de ses 27 années d’emprisonnement. Elle lui apprend à faire face aux journalistes pendant ses années au pouvoir.
Mandela a été à la fois mon élève et mon prof de vie
, souligne Lucie Pagé.
Celui qu’elle avait le privilège de pouvoir appeler Madiba est décédé le 5 décembre 2013, à l'âge de 95 ans.
La forme : Johanne Guay
Le premier lui a transmis le désir de raconter le monde par le biais de l’écriture journalistique.
Le deuxième lui a donné envie d’écrire sa vie et sur la vie en Afrique du Sud autrement que par le biais de reportages.
C’est la troisième, son éditrice Johanne Guay, qui a fait d’elle une écrivaine à part entière, soutient Lucie Pagé.
« Sans Johanne, je ne serais pas auteure. »
L’éditrice la guide d’abord dans la rédaction de Mon Afrique, livre dans lequel Lucie Pagé raconte comment sa trajectoire de vie, à titre de journaliste comme à titre de femme, a été chamboulée par son affectation en Afrique du Sud en 1990. Du récit, Johanne Guay la mène ensuite au roman. Ainsi naît Eva, publié en 2005. Suivront Encore un pont à traverser (2010), Sexe, pot et politique (2016) et son plus récent, Marie-Lumière, fraîchement arrivé en librairies.
À travers ses romans, elle signe aussi Notre Afrique, puis Demain, il sera trop tard, mon fils, avec son mari, Jay, et le deuxième de ses fils, Kami.
Une version précédente de cet article stipulait que le mari de Lucie Pagé avait écrit avec elle Notre Afrique. Il s'avère qu'il a plutôt contribué à Demain, il sera trop tard, mon fils.
Avec Johanne, j’ai fleuri. Elle s’est donnée pour moi et a fait de moi un arbre
, conclut Lucie Pagé.