3000 préposés aux bénéficiaires toujours attendus dans les CHSLD au Québec

Le reportage d'Olivier Bachand.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Après l'hécatombe dans les CHSLD au printemps dernier, le gouvernement Legault a mis sur pied un programme de formation accélérée pour recruter 10 000 préposés aux bénéficiaires. Huit mois plus tard, on en compte un peu plus de 7000 dans ces établissements.
Lucie Pépin fait partie de ceux qui ont répondu à l'appel lancé par le gouvernement. C'est tout un changement de carrière pour la Montréalaise, qui a été secrétaire juridique pendant plus de 20 ans.
Elle venait de terminer un contrat quand la pandémie a frappé et s'est donc retrouvée sans emploi. Elle a décidé de poser sa candidature sur le site web Je contribue
et a été retenue.
Depuis la mi-décembre, elle travaille au CHSLD Louis-Riel, dans le quartier Pointe-Saint-Charles, à Montréal. Elle y avait déjà fait le stage requis dans le cadre de sa formation.
Je ne savais pas si j'étais pour aimer ça ou non, ou si c'était pour fonctionner, alors je me suis lancée dans la gueule du loup et je ne regrette aucunement mon choix
, dit-elle.
Ce qu'elle préfère, c'est le contact humain.
Les résidents sont merveilleux, ils sont charmants. Ils sont drôles, on s'amuse avec eux, on joue avec eux, on chante, on danse. Ça fait tout mon bonheur de leur rendre un petit moment de bonheur dans la journée.
Elle admet que c'est un travail difficile, mais pense qu'elle a la vocation. C'est un travail qui est très physique, qui est quand même dur. Ce n'est pas tout le monde qui est fait pour ce métier-là. Mais moi, je suis faite pour ce métier-là, je mets l'effort requis pour prendre soin des résidents et ça fait mes journées.
Le recrutement se poursuit
Selon des données fournies par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), 7014 candidats ayant suivi la formation accélérée de 12 semaines travaillent présentement comme préposés aux bénéficiaires dans les CHSLD de la province.
Il manque donc environ 3000 préposés pour atteindre l'objectif des 10 000 fixé par le gouvernement Legault. Selon le MSSS, l'écart pourra être comblé par les nouveaux préposés qui sont en formation cet hiver. Un millier de candidats sont actuellement sur les bancs d'école et d'autres vont s'ajouter d'ici mars.

La formation de 12 semaines permet d'obtenir une attestation d'études professionnelles.
Photo : Radio-Canada / Annie-Claude Luneau
L'immense majorité des préposés embauchés jusqu'à présent ont suivi la formation l'été dernier. Le rythme a ensuite ralenti cet automne. C'est ce qu'a constaté le directeur du Centre de formation Antoine-de-Saint-Exupéry, François Lemire.
On a démarré 18 à 20 groupes à partir de juin à juillet. Ensuite, il y a eu une deuxième vague pour les gens qui étaient aides de service dans les établissements de santé. L'inscription a été un peu moindre pour eux. Alors, le recrutement est possible à nouveau.
La formation de 12 semaines permet d'obtenir une attestation d'études professionnelles. Les candidats doivent ensuite travailler pendant au moins un an en CHSLD et être disponibles pour effectuer des quarts de jour, de soir et de nuit.
Un faible taux d'abandon
Selon François Lemire, les candidats retenus pour la formation de préposé aux bénéficiaires se démarquent par le sérieux de leur démarche. En formation professionnelle, on retrouve parfois jusqu'à 20 % d'abandon. Jusqu'à maintenant, dans la formation courte de préposé, c'est autour de 10 %, ce qui est quand même très bon.
Le portrait est similaire dans l'ensemble de la province. Des 1929 candidats qui ont commencé la formation depuis cet automne, 113 ont abandonné le programme et 44 ont été expulsés, ce qui représente 8 % du total.
Durement éprouvés par la pandémie, les CHSLD privés non conventionnés pourront embaucher une centaine de candidats qui recevront leur formation au cours des prochains mois. Les établissements privés n'avaient pas eu accès aux préposés formés cet été.
Est-ce que 129 préposés est un nombre suffisant pour les 4000 places en privé non conventionné? Assurément pas. Mais on est quand même contents qu'ils nous incluent, c'est un début.
La question salariale n'est toujours pas réglée
Lors de l'annonce de la mise sur pied de la formation accélérée, Québec a promis aux préposés aux bénéficiaires un salaire de 26 $ l'heure, ce qui équivaut à 49 000 $ par année.
Or, le véritable salaire horaire varie toujours de 20,55 $ à 22,35 $. Il est possible d'atteindre 26 $ l'heure en cumulant des primes qui ont été instaurées temporairement en raison de la pandémie.

Jeff Begley, président de la FSSS-CSN, en conférence de presse
Photo : Radio-Canada
Ils sont toujours sur le décret ministériel qui met leur salaire à 26 $ l'heure. Dès que l'urgence sanitaire est terminée, il faut une entente pour maintenir leur salaire
, indique Jeff Begley, le président de la Fédération de la santé et des services sociaux de la Confédération des syndicats nationaux (FSSS-CSN).
Il a bon espoir que le gouvernement honorera son engagement, mais déplore la lenteur des négociations pour en arriver à une entente. C'est possible de régler ça demain matin. Maintenant, il faut que ça soit intégré dans la convention collective, mais il faut régler l'ensemble de la convention collective.
Avec la collaboration de Daniel Boily