Envoyée spéciale
Donald Trump, citoyen : son public l'aime et il aime son public
Des milliers de personnes s'étaient rassemblées sur la route du cortège transportant Donald Trump de l'aéroport de West Palm Beach à sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride.

Donald Trump a salué les milliers de personnes rassemblées sur la route du cortège à West Palm Beach, en Floride.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
À 11 h 19, ils ont vu les voitures approcher. Ils se sont mis à hurler, à applaudir, à pleurer. « Bienvenue chez toi, Donald! » « Merci, merci. »
Les gens étaient heureux. Ils sautaient. Ils dansaient. Le cortège a ralenti, histoire de permettre à Donald Trump de saluer ses fans, pour ne pas dire ses adorateurs.
L'homme leur souriait derrière la vitre; ses émotions étaient difficiles à lire. Il a envoyé à la foule des baisers de la main, des gestes d'amour comme des offrandes à ses fidèles qui avaient parcouru de longues distances et attendu des heures pour obtenir ces quelques secondes d'attention.
Ronald Salomon a 60 ans. Comme des dizaines de personnes, il est arrivé dès l'aube dans l'immense stationnement de l'épicerie Publix de Southern Boulevard pour voir [son] président
rentrer à Mar-a-Lago. Donald Trump est la meilleure chose qui soit arrivée à notre pays. Et il est là pour rester!
Ronald Salomon vend toute une panoplie de souvenirs. Des casquettes, des drapeaux, des t-shirts... Si son vrai travail est dans la finance, il voulait contribuer à la popularité de ce qu'il appelle un mouvement
en mettant sur le marché ces objets à l'effigie de Donald Trump.
Ce sont les meilleures casquettes, la meilleure qualité.
Il les vend 20 $ pièce. Ronald Solomon a fait faire pour l'événement d'aujourd'hui des casquettes sur lesquelles on peut lire : « Donald Trump, 2024 ».
C'est certain qu'il va revenir. Trump est le symbole, mais c'est beaucoup plus que sa personne; c'est le symbole d'un mouvement, ce sont 70 millions de personnes qui croient en sa vision des choses
, résume-t-il.
Comme beaucoup d'autres personnes sur le boulevard, Solomon porte un t-shirt où Joe Biden est caricaturé en Adolf Hitler. Sur le visage du nouveau président des États-Unis, on a dessiné une petite moustache noire et on peut lire : Not my dictator
(pas mon dictateur).
Considéré comme un sauveur
Pour moi, Donald Trump, c'est Dieu sur terre
, dit Jennifer Eady, 49 ans, les larmes aux yeux. Elle porte une casquette Make America Great Again
géante et une broche en or qui indique qu'elle est une Trump Girl
.
Son amie Mary Tulko tient dans sa main un mouchoir. Elle nous dit qu'elle pleure depuis ce matin et qu'elle doit se moucher beaucoup.
Ce sont comme des funérailles pour nous, même si nous savons qu'il reviendra, qu'il sera de retour pour nous sauver
, dit-elle, émue. La dame, qui travaillait comme préposée aux bénéficiaires, ne vit pas très loin de Palm Beach. Elle n'aurait manqué l'arrivée de Donald Trump pour rien au monde.
Un peu plus loin sur le trottoir, Carol Hass, 46 ans, tient une immense banderole sur laquelle on peut lire : Fuck Biden
. Biden ne sera jamais mon président
, dit-elle. Elle aussi porte un t-shirt qui représente Biden en Adolf Hitler. Je lui demande pourquoi. Ben, parce que c'est un dictateur!
me répond-elle, comme s'il s'agissait d'une évidence.
Sur le trottoir, la majorité des milliers de partisans de Donald Trump qui sont présents ce matin sont des femmes d'un certain âge. Beaucoup ont d'ailleurs amené de petites chaises de camping pour ne pas avoir à rester debout trop longtemps au soleil.
Tout comme Mary, beaucoup sont très émotives. Elles ont peur. Peur que les États-Unis deviennent, sous l'administration de Joe Biden, un pays communiste. Elles croient toutes en la thèse mensongère de leur idole qui leur a dit que l'élection leur avait été volée
.
Avec le regard coquin, Patty Berry, 74 ans, avoue même avoir un léger béguin pour Trump. Je le trouve très attirant, très beau. Ce type d'homme me fait de l'effet.
Elle ajoute, avec humour, que Melania Trump lui fait beaucoup d'ombre. Ses amis éclatent de rire.
La scène, comme toute cette matinée, est plutôt bon enfant. Il n'y a pas ici de partisans armés ou agressifs. Des gens sont déguisés, parlent, mangent, prennent une bière. Ils ont amené leurs chiens, leurs enfants. Ils évoquent l'amour, se saluent chaleureusement comme s'ils faisaient partie d'une même famille.
I love him so much
(je l'aime tellement), me dit d'ailleurs Mary Kay Montroy, arrivée d'Orlando hier soir pour être certaine de voir cet homme qu'elle adore. C'est le meilleur président que nous ayons eu
, ajoute-t-elle, le trémolo dans la gorge.
En retrait, Drew McKnight observe la scène. Il porte un couvre-visage, alors que la plupart des partisans de Trump, eux, n'en portent pas. Il n'a pas de chapeau ni de drapeau.
Je ne suis pas un "trumpiste", mais je suis venu voir; j'étais curieux. Je ne comprends pas cette folie collective; ça me dépasse
, me dit-il assez fort pour que les partisans autour de nous l'entendent.
Un homme ridé, sans masque, lui dit alors, sèchement, de partir. Vous n'avez rien à faire ici! Vous n'êtes pas un Américain, pas un vrai.
McKnight, qui est le paradigme même d'un Américain, lui répond : Mais je suis né ici, je vis ici, je suis Américain aussi; j'ai le droit d'être ici!
Voilà. La messe est dite. Même chez lui, même déchu, Donald Trump force toujours les gens à se définir les uns contre les autres.