Il y a 40 ans, les Matapédiens descendaient dans la rue

Les manifestations étaient menées par le Ralliement populaire matapédien qui réclamait une papeterie avec des emplois payants à la clé.
Photo : Société d’exploitation des ressources de la Vallée (SERV)
Il y a quatre décennies, des milliers de personnes de la vallée de la Matapédia descendaient dans la rue. Ces manifestations étaient menées par le Ralliement populaire matapédien qui réclamait l'implantation d'une papeterie avec des emplois payants à la clé.
Pour l’ancien manifestant René Canuel, il était primordial d’améliorer le sort de la population et ce projet était la solution.
À ce moment-là, le taux de chômage n’était pas loin de 40 %. Il y avait 51 % des personnes sous le seuil de la pauvreté. À ce moment [c’était] criant
, se rappelle-t-il.
Il était aussi important pour l’ancien président de la Société d’exploitation des ressources de la Vallée (SERV), Jean-Guy Gagné, d’être en première ligne à cette époque. La situation du monde forestier empirait tout le temps. Les propriétaires avaient de la misère à vendre leurs produits. Et puis, les scieries avaient de la misère à écouler leurs copeaux, et tout ça… ça ne marchait pas.
Le projet de papeterie donnait espoir.
Le problème pour les Matapédiens cependant, c'était que Matane était dans la course. Tous les indices leur indiquaient que Matane serait la ville choisie pour l'implantation de la papetière et des emplois qui y étaient rattachés. Pour eux, il n’en était pas question.
Les manifestations se sont multipliées, attirant des milliers de personnes dans la rue. Pendant l'une d’entre elles, 14 personnes ont été arrêtées.
Souvent, ce sont des actions un peu dures qui éveillent le monde et qui font cheminer les décideurs. Il y a eu les blocages de la [route] 195, la 132, les blocages de la voie ferrée. Ce sont des gestes qui ont frappé.
Il y a eu plusieurs coups d’éclat. Par exemple, les manifestants ont occupé le poste de police d’Amqui. Ils ont également monopolisé les ondes de la station de radio locale pendant une journée. Toutefois, c’est le blocage de la voie ferrée qui a le plus marqué René Canuel. J’avais des enfants de cinq à neuf ans. Le matin, j’ai dit à mes enfants : ce soir, papa va être en prison.
M. Canuel n’a pas été en prison, mais ce geste a eu des échos partout dans la province.
C’était très important parce que quand un peuple est en train de mourir, on ne se pose pas beaucoup de questions. On se dit : "on se ramasse" et j’ai vu là presque des miracles.
Comme ils le craignaient, Matane a hérité de la papeterie. Cependant, peut-être pour calmer la grogne selon les anciens manifestants, le gouvernement a annoncé l'ouverture d'une usine de fabrication de panneaux à Sayabec.
Aujourd’hui, l’usine, qui est propriété de l’entreprise Uniboard, fonctionne à plein régime offre de l’emploi à plus de 400 travailleurs.
Cette usine est une victoire absolue aux yeux de René Canuel : on a gagné, mais pour une cause comme ça, il faut avoir un objectif solide, concret, et nous autres, c’était la « papeterie à Causapscal et pas ailleurs
Jean-Guy Rioux serait prêt à descendre à nouveau dans la rue aujourd'hui s'il le fallait. On n’a pas perdu parce que la papeterie, elle a [eu des difficultés] tandis que Panval, non seulement ça ne ferme pas, mais ça grossit tout le temps. C’est un très beau projet.