Le docteur Armand Frappier : figure marquante de la vaccination au Canada
Le docteur Armand Frappier dans un laboratoire de l’Institut de microbiologie et d’hygiène de Montréal.
Photo : Radio-Canada
Il y a 30 ans, le 18 décembre 1991, mourait le Dr Armand Frappier. À travers nos archives, découvrez comment le docteur Armand Frappier a contribué à éradiquer des maladies comme la tuberculose et la poliomyélite par la recherche et la production de vaccins.
Un objectif : combattre la peste blanche
Armand Frappier naît en 1904 dans le village de Salaberry-de-Valleyfield. Brillant élève, il se passionne autant pour la chimie que pour la musique. La perte d’êtres chers l’amènera à consacrer sa vie au combat contre la tuberculose.
L’animateur Charles Tisseyre brosse un portrait de cet important chercheur dans ce reportage diffusé à L’histoire des sciences le 27 août 2000.

Cet épisode rappelle les travaux d’Armand Frappier, en épidémiologie et en immunologie. Narration : Charles Tisseyre
La tuberculose emporte la mère d’Armand Frappier alors qu’il n’a que 19 ans. Il perd également son frère et sa grand-mère des suites de cette maladie. Durant les années 1930, la tuberculose est baptisée la peste blanche
et fait des ravages au sein des communautés les plus pauvres.
Armand Frappier s’inscrit à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal en 1924. Il finance ses études en fondant l’orchestre Les Carabins
dans lequel il joue du violon. Le groupe se produit chez Dupuis frères, dans les restaurants et sur les bateaux de croisière de la Canadian Steamship Line.
Le docteur Frappier se spécialisera en microbiologie et étudiera dans les laboratoires américains après être devenu boursier de la fondation Rockefeller. Il séjournera également à l’Institut Pasteur de Paris.
Au début des années 1930, l’Institut Pasteur développe le vaccin BCG contre la tuberculose. Le vaccin est baptisé ainsi des noms de ses fondateurs : les docteurs Calmette et Guérin. Le vaccin vivant, préparé à partir d'une souche atténuée de bacille tuberculeux bovin, demeure très controversé en Amérique du Nord.
Bien décidé à éradiquer la maladie au Canada, Armand Frappier rapporte une souche de BCG de l’Institut Pasteur en 1933. Il poursuit ses travaux, malgré certaines critiques. Il développera et vendra les vaccins contre la tuberculose aux hôpitaux.
« Le Québec deviendra le bassin le mieux couvert par la vaccination anti-tuberculose, encore contestée ailleurs dans le monde. »
La fondation de l’Institut d’hygiène et de microbiologie de Montréal
C’est en 1938 que le docteur Frappier fonde l’Institut d’hygiène et de microbiologie de Montréal affilié à l’Université de Montréal.
L’Institut participe à l’effort de guerre lorsqu’à partir de 1939, il se charge de la lyophilisation (séchage à froid) du sérum sanguin pour les Forces armées canadiennes et pour ses alliées. 150 000 unités de sérum seront envoyées à la Croix-Rouge.
Au début des années 1950, les recherches de l’Institut se concentrent sur la poliomyélite. Cette terrible maladie qui s’attaque aux poumons et paralyse parfois pour la vie ceux qui en sont atteints.

Le docteur Armand Frappier fait une déclaration sur l’'Institut de Microbiologie et d'Hygiène de l'Université de Montréal qui occupe ses nouveaux locaux à Laval-des-Rapides; on y fait la production du vaccin Salk contre la poliomyélite.
Frappier a l’appui du premier ministre Duplessis pour développer des vaccins. Dans cet extrait du 15 mars 1956, il remercie le gouvernement pour l’octroi d’une subvention pour le développement de l’Institut de microbiologie et d’hygiène de Montréal.
L’argent servira à la construction de nouveaux laboratoires à Laval-des-Rapides, où des animaux, nécessaires à la recherche, pourront être élevés directement sur le terrain de l’Institut. Le gouvernement finance également la production du vaccin Salk contre la poliomyélite.
À l’émission Aujourd’hui du 21 novembre 1968, le journaliste Jean Ducharme s'entretient avec le Dr Armand Frappier, le Dr Adrien G. Borduas et le Dr Vytautas Pavilanis au sujet des recherches menées à l'Institut.

Le journaliste Jean Ducharme s'entretient avec le Dr Armand Frappier, le Dr Adrien G. Borduas et le Dr Vytautas Pavilanis sur les travaux menés à l'Institut de microbiologie et d'hygiène de l'Université de Montréal.
À l’époque, les travaux permettaient 2 millions de vaccinations par année au pays. 150 chercheurs et techniciens travaillaient à la production des vaccins.
Armand Frappier a joué un rôle fondamental tant dans la formation des médecins que dans la sensibilisation des politiciens aux questions d’hygiène, de santé publique et de financement de la recherche biomédicale.
« Nous avons donné à notre province tous les vaccins dont elle avait besoin, et en temps d’urgence, elle peut compter sur l’Institut. »
L’institut de microbiologie et d’hygiène a également fabriqué des vaccins contre la coqueluche, la rougeole et l’influenza.
Le docteur Frappier a été maintes fois récompensé au cours de sa carrière et après sa retraite, qu’il a prise en 1974, à l’âge de 70 ans. L’Institut de microbiologie et d’hygiène a été rebaptisé Institut Armand-Frappier en 1975.
Malgré sa solide réputation au Canada comme à l’étranger, l’Institut Armand Frappier est démantelé au début des années 1990 et cesse la production des vaccins. En 1998, il est rattaché à l'Institut national de la recherche scientifique (INRS).
Le Centre Armand Frappier relié à l'INRS s’intéresse aujourd’hui à la prévention et à la recherche de solutions à des problèmes de santé publique comme le cancer, la résistance aux antibiotiques et la maladie d’Alzheimer.
Le 21 mars 2012, le Dr Armand Frappier a été intronisé au Temple de la renommée médicale canadienne à Toronto. Il est décédé le 18 décembre 1991, à l’âge de 87 ans.