Il y a 50 ans, le Grand Théâtre de Québec faisait sensation
Le Grand Théâtre de Québec se reconnaît par sa sobre architecture brutaliste.
Photo : Radio-Canada
Le 16 janvier 1971, un édifice d’envergure est inauguré sur la colline Parlementaire. Le Grand Théâtre de Québec impressionne et promet d’enrichir la vie culturelle de Québec.
Le Grand Théâtre de Québec est né d’un projet du premier ministre Jean Lesage de construire dans la Vieille Capitale un monument commémoratif pour le centenaire de la Confédération.
C’est aussi le fruit d’un concours d’architecture remporté par le projet de style brutaliste soumis par l’architecte-urbaniste Victor Prus.
Le complexe culturel est destiné à abriter deux salles de spectacles polyvalentes ainsi qu’un conservatoire de musique.
Après un changement de gouvernement et quelques interruptions dans sa construction, le Grand Théâtre de Québec est finalement inauguré le 16 janvier 1971.
Le rendez-vous avec le centenaire du pays, en 1967, a largement été manqué.

Les 2 D, 26 janvier 1971
Le Grand Théâtre de Québec se veut un lieu culturel d’envergure pour le berceau de l’Amérique francophone.
La comparaison avec Montréal n’est cependant jamais loin, comme en témoigne cette entrevue de Richard Joubert avec Guy Beaulne pour l’émission Les 2 D du 26 janvier 1971.
Bien sûr qu’il est question de rivalité!
déclare le premier directeur de la Régie du Grand Théâtre de Québec. Le moment est venu que Québec nourrisse la métropole!
Nous sentions que nous devions composer un instrument pour le talent de la capitale.
Le Grand Théâtre de Québec répond à un besoin culturel à Québec, croit Guy Beaulne. Et ses installations modernes et polyvalentes risquent fort d’y faire converger les artistes.

Les 2 D, 2 mars 1971
La maison leur appartient maintenant, comme elle appartient à tous les gens de Québec!
Les artistes présents à la cérémonie pour l’inauguration du Grand théâtre de Québec donnent raison à Guy Beaulne.
Richard Joubert les interviewe pour l'émission Les 2 D du 2 mars 1971.
Je trouve ça formidable parce que d'abord ce n’est pas prétentieux. Je me sens chez nous!
, exprime le comédien et metteur en scène Paul Buissonneau. Il n'y a pas la prétention de la Place des Arts.
Je crois que c'est un bijou qui va faire rêver bien du monde
, suggère pour sa part la marionnettiste Micheline Legendre, se référant plus particulièrement à la petite salle du complexe culturel.
La murale monumentale de l’artiste-sculpteur Jordi Bonet qui couvre trois des murs intérieurs du Grand Théâtre marque aussi les esprits.
On la découvre, ça nous arrive en pleine gueule. Paf! C'est fantastique!
L’impressionnante murale est façonnée et sculptée à même les murs de béton afin d’intégrer totalement les arts plastiques à l’architecture, suivant la vision de l’architecte Victor Prus.
L’œuvre en triptyque de Jordi Bonet intitulée Mort, Espace, Liberté fait aussi parler d’elle pour les onze mots gravés dans le béton par le poète Claude Péloquin : Vous êtes pas écœurés de mourir, bande de caves! C'est assez!

Le ministre François Cloutier sur l'affaire de la murale
L’inscription du poète Claude Péloquin sur la murale de Jordi Bonet déchaîne les passions. Certains demandent le retrait des paroles litigieuses de la murale, d’autres défendent la liberté d’expression artistique.
Le rôle de l'artiste est d'être un éveilleur
, croit pour sa part le ministre des Affaires culturelles François Cloutier, qui refuse de s’ingérer dans ce choix créatif de Jordi Bonet.
On a commandé une œuvre à un artiste sans lui imposer de contraintes, souligne-t-il, je ne vois pas comment l'on pourrait aujourd’hui exiger de la modifier.
À mon avis, elle [la phrase] n'ajoute rien à une œuvre qui est très forte en soi, la murale de Jordi Bonet, qui est un admirable poème à la vie et à la mort.
L’œuvre de Jordi Bonet s’inscrit dans l’esprit contestataire du temps et la controverse aura permis aux gens de prendre conscience de la murale, suggère-t-il au contraire.

Femme d'aujourd'hui, 30 novembre 1971
Ce reportage à l’émission Femme d’aujourd’hui du 30 novembre 1972 nous offre une visite détaillée du Grand Théâtre de Québec.
Son directeur Guy Beaulne vante à la journaliste Micheline Archambault la qualité de ses salles et la sobriété de ses espaces qui en font un foyer amical et cordial.
Lorsque le Grand Théâtre de Québec est décrit comme le plus beau théâtre moderne du monde, Guy Beaulne ne peut qu’acquiescer.
C'est l'architecture qui en fait la beauté
, croit Guy Beaulne, mais c'est également la qualité de l'instrument, de son équipement technique et aussi des gens qui s'en servent
.
L'oeuvre de Jordi Bonet avec la phrase de Claude Péloquin continue de faire réagir, mentionne le directeur du Grand Théâtre. Deux ans après son dévoilement, on commence cependant à mieux comprendre la murale et ses inscriptions.
On examine davantage la murale. On se rend compte qu'on ne peut pas la comprendre d'un seul coup.
Le Grand Théâtre de Québec s’inscrit désormais comme un haut lieu de diffusion de la culture, mais il souhaite aussi jouer un rôle de producteur et de créateur.
Un rôle qui répond à un besoin de la ville de Québec et de son public, qui a gagné une institution culturelle à la fois prestigieuse et accessible.
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