Les nouvelles restrictions en Ontario sont-elles suffisantes?
Les nouvelles restrictions entreront en vigueur jeudi à 0 h 01.

L'Ontario a déployé une armada de nouvelles restrictions qui entreront en vigueur jeudi à minuit et une minute.
Photo : CBC/Evan Mitsui
Des épidémiologistes accueillent positivement les mesures accompagnant le nouvel état d'urgence sanitaire en Ontario, mais doutent qu'elles aillent assez loin.
Quelques heures après le dévoilement des modélisations provinciales, qui indiquent que les contaminations à la COVID-19 pourraient plus que décupler d'ici la mi-février, le gouvernement Ford a présenté, mardi, une série de mesures visant à réduire les interactions entre les personnes.
L'efficacité des mesures visible dans quelques semaines
Les Ontariens devront notamment respecter un ordre de rester à la maison, les élèves d'une grande partie du sud de la province vont continuer l'école à la maison jusqu'au 10 février, les rassemblements à l'extérieur seront limités à 5 personnes, les heures d'ouverture de nombre de commerces seront écourtées et les forces de l'ordre vont bénéficier d'un pouvoir renforcé pour faire appliquer les mesures.
Pour le Dr Barry Pakes, professeur en santé publique et médecine préventive à l'Université de Toronto, l'efficacité d'un tel arsenal de restrictions pour contrôler la pandémie est peu claire
pour le moment.
Notre système de santé est déjà au-delà de nos limites, dit-il. Tout ce que nous faisons en ce moment n'améliorera les choses que dans quelques semaines.
Devant l'avancée des infections et la saturation du système hospitalier, l'ancien médecin hygiéniste en chef du Nunavut souligne que le rôle alloué aux forces de l'ordre est devenu inéluctable.
En Ontario, nous n’aimons pas faire appliquer la loi. Nous adorons faire de l'éducation et encourager les gens à comprendre les enjeux, puis de prendre sur eux de faire la bonne chose. [Mais] je pense que nous sommes à un moment où une mise en application plus poussée est absolument nécessaire.
Tout comme le Dr Barry Pakes, la Dre Anna Banerji, pédiatre spécialisée en maladies infectieuses et professeure à l'Université de Toronto, pense que l'ordre de rester à la maison ressemble, dans l'esprit
, à un couvre-feu.
Le gouvernement dit à tout le monde de rester chez soi à moins qu'il y ait quelque chose de vraiment important à faire. Je pense que ça va marcher à un certain degré. Les gens coopèrent déjà plus que pendant les vacances de Noël
, assure-t-elle.
La population appelée à participer à l'effort
Lorsqu'il a annoncé le nouvel état d'urgence sanitaire mardi, Doug Ford a relevé selon des données
qu'un tiers des Ontariens ne suivent pas les recommandations de santé publique et a demandé à la population de faire partie de la solution
pour aplatir la courbe des contaminations.
La Dre Banerji remarque que bon nombre des contaminations actuelles surviennent dans les lieux de travail essentiels et plaide pour que des tests de dépistage rapides soient possibles dans ces espaces. La distanciation physique et le port du masque y demeurent un problème
face auquel il faut faire quelque chose
.
Outre le déploiement rapide des vaccins, la clé pour enrayer la COVID-19 vient de la persuasion du public par le discours politique, avance quant à elle l'épidémiologiste Nimâ Machouf.
Pour que les mesures restrictives marchent, il faut que la population soit convaincue que cet effort vaille la peine.
Des restrictions supplémentaires dans le viseur, selon les experts
Pour la chercheuse Nimâ Machouf, il est temps que les Ontariens harmonisent leurs intentions : Si on le fait tout le monde, ensemble en même temps, ça va marcher. Si chacun le fait un peu ça va s’étendre, s’allonger et tout le monde va être tanné.
Dans le cas contraire, il y a un moment où le système de santé échoue
, continue la Dre Banerji. En tant que tel, l'ordre de rester chez soi représente un acte de désespoir
de la part du gouvernement.
Les trois experts interrogés s'accordent pour dire qu'un couvre-feu pourrait représenter la prochaine étape, si les nouvelles mesures se révèlent inefficaces.
Je pense que les restrictions vont aller en augmentant malheureusement, parce que l’Ontario est dans une pente ascendante
, résume Mme Machouf.