La famille de Rodney Levi, tué par la police, exige des réponses

Rodney Levi (à droite) et sa nièce Becky Levi (à gauche).
Photo : Becky Levi
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La famille de Rodney Levi, un Autochtone du Nouveau-Brunswick abattu par la police en juin dernier, souhaite pouvoir consulter le rapport d'enquête qu’un service de police spécialisé du Québec a rédigé sur son décès.
Rodney Levi, de la communauté micmaque de Metepenagiag, a été abattu par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) dans la soirée du 12 juin 2020 à Boom Road, près de Miramichi. Les policiers répondaient à une plainte concernant des incidents dans une habitation privée.
La mort de M. Levi, qui avait 48 ans, est survenue quelques jours après celle de Chantel Moore, une femme autochtone de 26 ans abattue le 4 juin 2020 par un agent de la Force policière d'Edmundston, au Nouveau-Brunswick, lors d'un contrôle de santé mentale
dans une habitation.

Chantel Moore a été tuée par un agent de la Force policière d'Edmundston le 4 juin 2020 au Nouveau-Brunswick.
Photo : Chantel Moore / Facebook
C'est le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) du Québec qui avait été chargé d'enquêter sur ces deux décès, parce que le Nouveau-Brunswick ne dispose pas d'une telle police des polices
.
Les rapports du BEI sur la mort de Chantel Moore et celle de Rodney Levi ont été transmis le 16 décembre au Service des poursuites pénales du Nouveau-Brunswick et au coroner chargé de ces dossiers, a indiqué le Bureau des enquêtes indépendantes dans deux brefs communiqués, les 23 et 24 décembre derniers.
La famille et la communauté laissées dans l'ignorance
Alisa Lombard, l'avocate des proches de M. Levi, ne comprend pas pourquoi la famille n'a pas encore reçu la copie demandée du rapport sur sa mort.
Notre client, la succession de Rodney Levi, a vécu son deuil dans l'ignorance de ce qui s'est réellement passé, mis à part les reportages des médias et ce qu'ils ont pu reconstituer.
Depuis la mort de Rodney Levi, ses proches se sont vus infliger des tourments supplémentaires, affirme la nièce du défunt, Becky Levi.
Il est enrageant, exaspérant, frustrant et blessant d'être laissé dans l'ignorance
, a-t-elle dit dans une entrevue à CBC.
Mme Levi soutient que les proches de Rodney Levi ont le droit de savoir ce qui se passe. Nous voulons être en mesure d'informer notre famille avant qu'ils apprennent des choses sur les médias sociaux, parce que c'est comme ça que beaucoup de nos proches ont appris que mon oncle avait été descendu.

Rodney Levi est décédé le 12 juin 2020 après avoir été atteint d'un projectile d'arme à feu tiré par un policier de la GRC à Boom Road, au Nouveau-Brunswick.
Photo : Becky Levi
Où est le policier?
Becki Levi aimerait entre autres savoir qui a tué son oncle. Elle affirme que personne dans la communauté de Metepenagiag ne sait ce qui se passe avec ce gendarme. Nous n'avons aucune idée. Est-il toujours ici ou a-t-il été muté ailleurs?
, demande-t-elle.
Peu de détails communiqués au public
La porte-parole du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) du Québec Sylvie Boutin a indiqué vendredi dans un courriel qu'il appartenait aux autorités du Nouveau-Brunswick de rendre le rapport public.
Le BEI a publié certains détails avant Noël, lorsqu'il a annoncé que le rapport complet sur la mort de M. Levi avait été transmis aux autorités compétentes. Le BEI indiquait alors que le soir du 12 juin, la police a répondu à deux plaintes concernant un homme en possession de couteaux
, dans une habitation de Miramichi, et qu'il ne voulait pas coopérer.
Arrivés sur les lieux, deux policiers de la GRC du détachement de Sunny Corner ont localisé Rodney Levi à l'extérieur, sur une terrasse où se trouvaient d'autres personnes, indique le BEI. L'homme ne voulait pas laisser tomber les couteaux et ne se pliait pas aux sommations des deux policiers, ajoute-t-on.
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Selon le BEI, un policier a alors utilisé son arme à impulsion électrique. M. Levi aurait néanmoins entrepris de s’approcher d’un autre gendarme, qui a ouvert le feu sur lui avec son arme de service. Le décès de Rodney Levi a été constaté à l'hôpital.
Selon une déclaration publiée par l’église pentecôtiste de Boom Road peu après la tragédie, Rodney Levi participait à un barbecue, auquel il avait été invité, à la résidence du pasteur.
Policiers rarement accusés
L’avocate Alisa Lombard soutient que la famille Levi veut obtenir des réponses afin de pouvoir faire son deuil et tourner la page.
Une porte-parole du ministère de la Justice du Nouveau-Brunswick a indiqué vendredi que les rapports sur les décès de M. Levi et de Mme Moore sont toujours à l'étude.
Le ministère public fera une annonce sur les résultats de ses examens une fois qu'ils seront terminés
, a écrit Coreen Enos dans un courriel. Il convient de rappeler qu'une enquête du coroner sera tenue sur chacun de ces cas.

Jamie Levi (à droite), la sœur de Rodney Levi, est enlancée par Martha Martin, la mère de Chantel Moore, lors d'un rassemblement à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, le 20 août 2020.
Photo : CBC / Logan Perley
C'est le Service des poursuites publiques du Nouveau-Brunswick qui déterminera si des accusations seront portées contre les policiers impliqués dans les décès de Chantel Moore et Rodney Levi.
Au Canada, 461 civils ont été tués par un policier entre 2000 et 2018. Seuls deux policiers ont été condamnés.
Selon le dossier d'enquête Deadly Force (Nouvelle fenêtre), du réseau CBC, les personnes autochtones représentent 16 % des personnes tuées par la police, alors qu'ils représentent environ 5 % de la population canadienne.
D'après La Presse canadienne et avec les renseignements de Rachel Cave, de CBC