Faire pousser ses propres légumes alors que les prix risquent d'augmenter
Le retour à la terre et au jardinage qu’a généré la pandémie va-t-il continuer de nous réconforter en 2021?

L'agriculture urbaine fait partie des solutions pour lutter contre l'insécurité alimentaire, selon Marcela Villarreal, représentante aux Nations unies.
Photo : Radio-Canada / Catherine Legault
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Alors que le prix des fruits et légumes risque d'augmenter en 2021, l'engouement pour l'autosuffisance alimentaire se confirme.
Selon le rapport sur les prix alimentaires canadiens, publié fin 2020, la hausse des prix de certains aliments sera supérieure au taux d'inflation.
Les viandes et les légumes frais sont les deux grandes catégories les plus touchées, avec une augmentation pouvant atteindre 6,5 %. Le prix des fruits, lui, pourra augmenter jusqu'à 4 % au cours de l’année.
Cette tendance n’est pas unique au Canada. Dans le monde, l’accès abordable aux fruits et légumes frais est de plus en plus difficile.
Selon Marcela Villarreal, directrice des associations et de la collaboration à l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), trois milliards de personnes sur la planète ne sont pas en mesure de s'offrir une alimentation saine.
La situation dans le monde entier est vraiment préoccupante. Les fruits et légumes frais ont tendance à être plus chers
, souligne-t-elle.
C’est aussi préoccupant au Canada, car on constate que près de1 million de ménages n’arrivent pas à se procurer des aliments sains, c’est-à-dire à avoir accès à une alimentation diversifiée qui comprend notamment des fruits et légumes frais.
Parmi les facteurs en cause, Marcela Villarreal explique que les produits frais ont tendance à être plus chers à cause des pertes dans le système de production et de consommation. Elle rappelle que le gaspillage est beaucoup plus élevé dans cette catégorie.

Selon Marcela Villarreal, une enquête menée en mai dernier révèle que 15 % des ménages canadiens ont affirmé avoir connu de l'insécurité alimentaire au cours du dernier mois.
Photo : @FAOInvest / Twitter
Le rapport sur les prix alimentaires canadiens mentionne aussi les dérèglements causés par les changements climatiques, qui nuisent de plus en plus aux récoltes et à l'équilibre de la chaîne alimentaire, en plus de faire grimper les prix.
À ce titre, le collaborateur au rapport et professeur à la faculté de l’agriculture et de l’alimentation de l’Université de la Colombie-Britannique James Vercammen estime que les incendies qui ont ravagé la Californie en 2020 auront un impact certain sur l’agriculture et la production de cette année.
Un retour à la terre
Comme le rapport l’indique, la COVID-19 est venue perturber la chaîne agroalimentaire et les systèmes alimentaires mondiaux.
Selon Marcela Villarreal, la pandémie nous a fait aussi repenser les façons de nous alimenter. On a augmenté la conscience de l’importance d’avoir un système alimentaire qui soit plus durable et où les chaînes d’alimentation sont plus courtes, où l’on pourrait être plus près des producteurs
, explique-t-elle.
Le besoin d’être plus près de la terre s’est aussi traduit en chiffres. Au Canada, une personne sur cinq a démarré un jardin en 2020, selon Sylvain Charlebois, professeur en distribution et politique agroalimentaire à l'Université de Dalhousie, en Nouvelle-Écosse.

Paysagiste de Victoria qui se spécialise dans les jardins comestibles, Paul-Antoine Trompette a constaté un changement de comportement chez ses clients.
Photo : Crédit: Paul-Antoine Trompette
Sur la côte ouest, dans l'île de Vancouver, le paysagiste de Victoria Paul-Antoine Trompette est spécialisé dans les jardins comestibles. Celui qui aide des résidents à faire pousser leurs propres légumes est formel : l’engouement de 2020 se confirme pour 2021.
La première raison, c’est pour bien manger. Les gens ont des doutes sur la qualité des aliments qu’on nous propose en supermarché. Ils veulent faire pousser leurs propres légumes, pour qu'ils aient notamment plus de goût.
Avec la pandémie, ajoute Paul-Antoine Trompette, beaucoup de ses clients n’ont même plus envie d’aller faire leurs courses. L’effet de panique du début de la pandémie a également exacerbé l’insécurité alimentaire. Le fait de cultiver ses propres fruits et légumes est sécurisant, selon lui.
En banlieue de Vancouver, à l'Université polytechnique Kwantlen (KPU), les chercheuses Caroline Chiu et Wallapak Polasub témoignent aussi de l’engouement pour les ateliers d’agriculture et de jardinage. Beaucoup ignorent comment s’y prendre et veulent apprendre, selon Caroline Chiu.
Le défi, dit-elle, c’est d’apprendre à cultiver, mais aussi, à conserver, entre autres pour l’hiver, le fruit du travail accompli.