Test de dépistage obligatoire pour tous les voyageurs dès le 7 janvier

Le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau.
Photo : La Presse canadienne / Adrian Wyld
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Le gouvernement fédéral a annoncé qu’un test négatif de la COVID-19 sera dorénavant exigé pour entrer au pays, et ce, à partir du 7 janvier. Tous les passagers aériens âgés de cinq ans ou plus sont concernés par cette mesure.
Avant l’embarquement sur un vol à destination du Canada, les voyageurs devront obligatoirement présenter un test de dépistage de la COVID-19 (PCR) négatif datant de moins de 72 heures.
Les autorités précisent que toute personne autorisée à entrer au pays doit également se soumettre à la quarantaine de 14 jours. Les voyageurs qui ne la respecteront pas risquent jusqu’à six mois de prison et 750 000 $ d’amende, a rappelé le gouvernement Trudeau.
Ces nouvelles mesures fourniront un autre niveau de protection pour les Canadiens, alors que nous continuons à évaluer les risques pour la santé publique et à travailler pour limiter la propagation de COVID-19 au Canada
, a déclaré le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau.
En entrevue jeudi à RDI, le ministre a expliqué avoir choisi le 7 janvier pour laisser le temps aux compagnies aériennes de s’ajuster aux nouvelles exigences. Il faut prendre un peu de temps pour s’assurer que les lignes aériennes mettent en place les procédures pour interroger les voyageurs et vérifier s’ils ont fait leur test de dépistage avant d’embarquer dans l’avion.
Le 7 janvier, c’est le moment le plus tôt qu'on peut vraiment mettre cela en place. Ça prend une certaine coordination avec les lignes aériennes.
Le gouvernement appelle les Canadiens qui voyagent présentement à l’extérieur des frontières à commencer immédiatement
à planifier un test de dépistage. M. Garneau a toutefois précisé quelles seront les options pour les voyageurs qui ne réussiront pas à obtenir un test avant leur vol de retour.

Le reportage d'Olivier Bachand.
Deux possibilités s’offrent à eux, a-t-il dit. Soit l’annulation du vol du retour, soit démontrer qu’il n’est pas possible d’effectuer un test de dépistage dans le pays où ils se trouvent.
Ces personnes pourraient être autorisées à embarquer. Mais à leur arrivée au Canada, elles vont devoir passer 14 jours dans un site d’hébergement de l’Agence de la santé publique. Il y a des endroits au Canada qui sont réservés pour cela.
Réactions négatives
Les réactions à cette annonce n’ont pas tardé. Pour Mehran Ebrahimi, professeur en management de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et spécialiste des questions d’aviation, le gouvernement canadien joue en solo sans jamais demander l’avis des compagnies aériennes.
Depuis le début de cette pandémie, le Canada est pratiquement le seul pays où il n’y a ni collaboration ni discussion avec les compagnies aériennes
, a-t-il dit en entrevue, jeudi, au micro de l'émission Le 15-18.
Car un certain nombre de questions demeurent, a ajouté le professeur. Tout d’abord en ce qui concerne la fiabilité des tests effectués dans plusieurs destinations du Sud. Dans certains pays, quand on sait que le salaire moyen pour une infirmière ou un infirmier tourne autour de 20 dollars par mois, il suffirait de donner cinq dollars pour avoir le résultat que vous voulez.
À sept jours d’avis, comment les compagnies aériennes vont-elles pouvoir mettre en place toute une infrastructure?
M. Ebrahimi a également critiqué Ottawa d’avoir imposé une mesure générale qui, finalement, ne règle pas le problème. Les situations sont différentes d’une nation à l’autre, a-t-il expliqué. Et puis, qu’adviendra-t-il des voyageurs testés positifs? Quels sont les pays qui voudront garder les malades canadiens sur leur sol?, s’est-il interrogé.

Selon les chiffres fournis par les autorités de la République dominicaine, l’île des Caraïbes enregistre à ce jour 127 018 personnes infectées à la Covid-19 et 2245 décès.
Photo : Getty Images / Erika Santelices
Aux dires du professeur, il aurait pourtant suffi que le gouvernement demande le point de vue des compagnies aériennes pour mettre en place des mesures efficaces, puisque ce sont elles qui sont sur le terrain. On aurait pu arriver avec une décision prise en collégialité et pour laquelle tous les acteurs concernés auraient adhéré, mais là on ne sait pas ce qu’il se passe.
Une réaction tardive
Même son de cloche pour les agences de voyages, notamment Nancy Daoust, présidente de Voyages Tourbec Lapointe, qui, en entrevue à Radio-Canada, a reproché au gouvernement de réagir trop tard. Il y a plusieurs autres endroits à travers le monde où [les autorités] ont mis en place des mesures de ce type-là, mais avant Noël
, déplore-t-elle.
Le Conseil national des lignes aériennes du Canada (CNLA) – un groupe industriel qui représente les principaux transporteurs du pays, notamment Air Canada, Air Transat et WestJet – soutient pour sa part qu'il y a encore des enjeux majeurs à résoudre concernant cette exigence.
Le président et chef de la direction du CNLA, Mike McNaney, a déclaré que des précisions supplémentaires étaient nécessaires concernant le format dans lequel les passagers devront présenter les résultats de leurs tests.
Nous soutenons pleinement les tests et la mise en œuvre d'une stratégie et d'un régime de dépistage
,a souligné M. McNaney. Mais l'objectif est de le faire de manière cohérente et approfondie, et d'encadrer le dépistage avec les mesures de quarantaine.
Le président du Conseil des aéroports du Canada, Daniel-Robert Gooch, a affirmé que bien que le groupe approuve le dépistage des voyageurs internationaux, il craint que l'exigence de tests associée à la quarantaine de 14 jours soit trop restrictive pour les passagers.
Jeudi après-midi, le syndicat Unifor, qui représente 300 000 travailleurs du transport aérien, a réitéré son appel à une aide gouvernementale pour le secteur aérien à la lumière de la nouvelle exigence de tests.
L'annonce est importante pour protéger la sécurité publique de tous les Canadiens, mais en même temps, le refus continu du gouvernement fédéral de fournir un soutien financier adéquat aux 300 000 travailleurs du transport aérien met en péril l'avenir même de l'industrie du transport aérien au Canada
, a déclaré le président national d'Unifor, Jerry Dias.
Naviguer en plein brouillard
Les compagnies aériennes confirment n'avoir été ni consultées ni informées des détails accompagnant cette nouvelle mesure sanitaire déjà adoptée depuis plusieurs semaines par une centaine de pays.
On a une mesure ici qui est complètement improvisée, sans aucune concertation avec les compagnies aériennes et qui va poser des problèmes de mise en œuvre
, a prévenu, en entrevue à RDI Matin, Christophe Hennebelle, vice-président des ressources humaines et des affaires publiques d'Air Transat.

Un travailleur de la santé effectue un test de dépistage sur une touriste venant du Mexique, à son arrivée à l'aéroport international Jose Marti, à La Havane.
Photo : Reuters / ALEXANDRE MENEGHINI
Ça fait des mois qu’on demande la mise en œuvre de tests rapides dans les aéroports, notamment des tests rapides qui permettraient d’adapter la quarantaine. Mais on n’est pas entendus,
a précisé Christophe Hennebelle, déplorant les lourdes pertes financières subies par son entreprise depuis le début de la pandémie.
Il mentionne aussi que les compagnies aériennes, qui sont également voyagistes, sont dans l'obligation d'accompagner leurs clients, une responsabilité compliquée par le flou entourant l'annonce.
On va faire tout ce qu’on peut pour que nos clients puissent avoir accès à ces tests, affirme-t-il. On est en contact avec les autorités dans le Sud.
On cherche des solutions pour que nos clients aient accès à ces tests, mais on n’a pas la certitude que cela soit possible. On a peur que nos clients soient bloqués à destination.
Un test négatif ou une place dans un centre certifié
Hier, le ministre des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, avait précisé que ces nouvelles précautions sanitaires ne se substitueraient pas à la quarantaine obligatoire, la mesure phare mise en œuvre par Ottawa, a-t-il dit.

Le ministre des Affaires gouvernementales, Dominic LeBlanc, le 18 septembre 2020 à Ottawa.
Photo : Radio-Canada
En effet, cette dernière empêche efficacement la transmission communautaire du virus à l'arrivée au Canada et dissuade de nombreux vacanciers dans leurs projets de séjour.
Quant aux voyageurs partis sans savoir que ce test allait être obligatoire et qui se retrouvent coincés à destination
, Dominic LeBlanc rappelle qu’Ottawa n’a cessé de les alerter sur les changements probables des mesures sanitaires au fil de la pandémie.
Ceux et celles qui n’ont pas pu obtenir un test seront sujets, en arrivant au Canada, à faire la quarantaine dans un centre désigné par le gouvernement fédéral à leur point d’arrivée
, a-t-il précisé à RDI.
Il n’est pas question de prendre une correspondance ou d'aller vers une autre destination; les personnes seront obligées de demeurer sur place dans un centre approuvé par le fédéral et surveillé par les agents du gouvernement fédéral, jusqu’à ce que le test soit obtenu au Canada.
À l’approche des fêtes de fin d’année, Ottawa avait mis les bouchées doubles pour dissuader la population de voyager. Une campagne publicitaire au coût de 850 000 $ conseillait aux Canadiens de rester chez eux pendant la pandémie de COVID-19.

Ottawa invite les Canadiens à rester chez eux pendant le temps des Fêtes.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers