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La détresse au bout du fil

Un homme dans l'ombre s'appuie au mur.

Les demandes d'aide ont bondi de 8 % chez Suicide Action Montréal et de 25 % chez Tel-Jeunes au cours des derniers mois en raison de la pandémie.

Photo : getty images/istockphoto / KatarzynaBialasiewicz

Jour après jour, elles sont au bout du fil ou de leur clavier pour réconforter ceux qui demandent de l'aide. Et ils sont plus nombreux depuis le printemps dernier.

À l'approche d'un congé des Fêtes sous le signe de la morosité, nous avons rencontré des intervenantes de Suicide Action Montréal et de Tel-Jeunes, qui côtoient la détresse au quotidien.

Depuis plusieurs mois, on entend les effets des restrictions, de la pandémie, de l'anxiété qui vient avec ça. C'est présent sur la ligne d'intervention, c'est certain, dit Camille Martin-Emond.

La jeune femme travaille depuis cinq ans chez Suicide Action Montréal. Le nombre de demandes d'aide y a augmenté de 8 % au cours des derniers mois.

Camille Martin-Emond conseille les bénévoles qui répondent aux appels. Elle fait aussi des relances téléphoniques, c'est-à-dire qu'elle rappelle des gens qui ont eu recours à la ligne d'écoute pour voir comment ils vont quelques jours plus tard.

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Sans surprise, elle entend souvent parler de la solitude engendrée par la pandémie, avec la perte des rencontres familiales et des activités sociales et sportives.

Sa conversation la plus marquante, c'est avec un grand-père qu'elle l'a eue. Les personnes âgées font partie des personnes qui sont plus isolées, à qui on demande de rester à la maison. Lui, il me nommait cette difficulté de ne pas pouvoir voir ses enfants, ses petits-enfants, raconte-t-elle.

Si le moral des personnes âgées a été miné par la pandémie, l'intervenante affirme que c'est aussi le cas pour les jeunes. On les entend beaucoup nous contacter dernièrement. Du personnel scolaire, des parents qui sont inquiets pour des jeunes, c'est plus présent.

Sa collègue Andrea Terriault, une autre intervenante de Suicide Action Montréal, a remarqué que la détresse a frappé les jeunes plus durement lors de la deuxième vague cet automne.

Au début, en mars, c'était beaucoup les personnes âgées, puis au deuxième confinement c'était plus les jeunes. Il y a beaucoup beaucoup d'anxiété. C'est vraiment ça pour les jeunes, de l'anxiété qui amène à penser au suicide, raconte-t-elle.

Demandes d'aide en hausse chez Tel-Jeunes

Cette grande détresse chez les adolescents se fait entendre chez Tel-Jeunes. Les demandes d'aide ont grimpé de 25 % depuis le début de la pandémie.

Près de la moitié des appels, textos, courriels et échanges par clavardage concernent la santé psychologique.

L'intervenante psychosociale Geneviève Henry, qui travaille depuis près de 20 ans chez Tel-Jeunes, a vu la situation évoluer au cours de la pandémie.

Lors de la première vague, on a senti une grande déstabilisation, il y avait comme une perte d'équilibre. Pour les jeunes et les parents, il y avait beaucoup d'inconnu, on ne savait pas ce qui s'en venait.

Maintenant avec la deuxième vague, c'est encore des moments de déséquilibre, mais avec peut-être aussi une certaine fatigue qui s'installe tranquillement, poursuit-elle. On sent que les jeunes sont un peu tannés, sont un peu au bout de leur patience.

Geneviève Henry affirme que le manque de motivation pour l'école et les cours à distance ainsi que le sentiment d'isolement sont souvent évoqués par les jeunes qui contactent l'organisme.

Il ne faut pas banaliser ce qu'ils vivent, dit la coordonnatrice de Tel-Jeunes, Myriam Day-Asselin. Je pense que les adultes autour d'eux peuvent des fois envoyer le message que ce n'est pas grave, qu'il faut passer à autre chose, en revenir. Étant donné que c'est un besoin primordial à l'adolescence de socialiser, simplement de reconnaître que c'est difficile, c'est déjà un premier pas, ça leur fait du bien.

Les jeunes ne veulent pas de conseils, renchérit Geneviève Henry. Les jeunes veulent tout d'abord une écoute, un espace où ils peuvent être entendus, compris. Parce que des conseils, ces temps-ci, ils en reçoivent de toutes parts.

Des parents inquiets

Avec la détresse qui augmente chez les jeunes, l'inquiétude grimpe chez les parents. Le nombre de demandes d'aide à la LigneParents de Tel-Jeunes a bondi de 52 %.

Plus de la moitié des appels effectués par des parents concernent les relations familiales, qui ont parfois été mises à mal en raison de la pandémie. Le confinement et le respect des règles sanitaires a exacerbé les tensions dans certaines familles.

Ça peut créer de l'irritabilité dans la famille, de devoir s'obstiner avec son ado pour faire respecter les mesures. Les jeunes vivent plus de stress, plus d'anxiété, et vont donc être moins tolérants à la discipline des parents, dit Myriam Day-Asselin.

D'autres parents appellent parce qu'ils se sentent désemparés face au changement de routine qu'a amené la pandémie, ou simplement pour évacuer leurs angoisses ou leurs frustrations.

Demander de l'aide, le bon réflexe

Aussi surprenant que cela puisse paraître, tant Tel-Jeunes que Suicide Action Montréal ne considèrent pas la hausse des appels comme une si mauvaise nouvelle.

On se dit qu'au moins, les gens vont chercher de l'aide. Par contre, on sait pertinemment que certaines personnes vulnérables restent dans l'ombre.

Le directeur général de Suicide Action Montréal, Luc Vallerand, s'en inquiète, surtout avec l'interdiction des rassemblements familiaux dans le temps des Fêtes. Ça va affecter le moral et la santé mentale des personnes les plus vulnérables, croit-il.

Leurs proches auront plus de difficulté à s'apercevoir que quelque chose cloche, ne pouvant les voir en personne.

C'est pour cette raison que Luc Vallerand lance cet appel à tous : D'être beaucoup plus vigilant auprès de ses collègues de travail, ses amis, ses proches et ses parents. Si on constate qu'il y a moins de communication, de faire un effort pour aller vérifier comment vont ces gens-là si on avait déjà des appréhensions auparavant.

Pour joindre Suicide Action Montréal

Téléphone : 1-866-APPELLE (1-866-277-3553)

Site web : suicideactionmontreal.org

Pour joindre Tel-Jeunes

Téléphone : 1-800-263-2266

Par texto : 514-600-1002

Clavardage : teljeunes.com

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