Fêtes de fin d’année : des recommandations sans sanctions suffiront-elles?

Une famille trinque en ligne avec des proches à l'occasion de Noël.
Photo : iStock
À moins d’un mois de Noël, la santé publique demande aux Ontariens de célébrer la période des Fêtes avec les membres de leur ménage uniquement. Or, seuls les résidents des régions confinées pourraient se voir imposer des sanctions s’ils ne respectent pas cette règle.
C’est certain que c’est délicat d’implanter [des sanctions liées à la célébration de Noël] dans nos communautés
, selon le maire de Hearst, Roger Sigouin.
La Ville de Hearst est présentement en zone verte, le plus bas niveau sur l’échelle des restrictions de l’Ontario. Pour les rassemblements publics intérieurs, un maximum de 50 personnes est autorisé, et 10 personnes peuvent se réunir dans une même résidence pour les rassemblements privés.
Pourtant, Doug Ford attend des Ontariens qu’ils restent chez eux, avec les membres de leur foyer uniquement, pour les célébrations de la fin d’année.
C’est certain que je comprends le gouvernement, que c’est un message qu’il faut passer : il faut rester prudent
, estime M. Sigouin. Selon lui, les gens sont prêts à suivre ce que le gouvernement recommande
.
Le maire d’Oshawa, Dan Carter, partage son avis. J'ai foi en notre communauté
, dit-il.
Recommandations et restrictions
Une limite de 10 personnes est aussi la règle pour les rassemblements privés en zone orange. En zone rouge, un maximum de 5 personnes est autorisé. Si ces limites sont respectées, les rassemblements sont légaux.
Les régions en zone grise, soit les régions confinées, sont les seules dans lesquelles il est présentement interdit de se réunir à l'intérieur avec d’autres personnes que celles de son foyer.
Le ministère du Solliciteur général encourage le personnel responsable de l'application de la loi à travailler en collaboration à l'application appropriée des ordonnances
, a écrit un porte-parole dans un courriel à Radio-Canada.
Souvent, cette mission incombe à la police régionale ou municipale ou aux agents municipaux.
Plus de surveillance au temps des Fêtes?
Contactées par Radio-Canada, la mairie et la police de Toronto n’ont pas précisé si plus de ressources seraient déployées pour s’assurer du respect des restrictions pour le temps des Fêtes.
Dans la région de Peel, une porte-parole de la Ville de Brampton explique que, depuis le début de la pandémie, toute la Division de l'application des règlements a assumé des responsabilités supplémentaires en répondant et en enquêtant sur les plaintes liées à la COVID-19
.
Si ces agents sont graduellement retournés à leur mission initiale, l'enquête et l'application des plaintes liées à la COVID-19 restent l'objectif principal et les agents devront fournir une réponse rapide pendant les vacances alors que les appels au service pourraient augmenter considérablement
, poursuit la porte-parole.
Elle ajoute que les agents municipaux effectuent des patrouilles proactives en plus de répondre aux appels des résidents.
Parfois, un appel au sujet du bruit ou de troubles publics ou de l'augmentation du stationnement dans la rue peut nous alerter au sujet d'un éventuel rassemblement social dans des propriétés privées.
Du côté de Mississauga, la Ville est plus avare de commentaires, mais soutient qu'elle continuera à appliquer avec diligence les exigences de tous les ordres de gouvernement et à surveiller la situation et les besoins
. La Municipalité dit par ailleurs encourager ses résidents à signaler leurs préoccupations
.
Toronto, Brampton et Mississauga sont les trois plus gros centres de l'épidémie en Ontario. Au cours des derniers jours, plusieurs rassemblements illégaux y ont été découverts.
À lire aussi :
Dans les plus petites villes comme Hearst ou Oshawa, on ne prévoit pas pour le moment de mobiliser plus d’agents municipaux pour faire respecter les consignes durant la période des Fêtes.
Je sais que dans notre communauté, dans notre région, les gens font ce qu'il faut
, assure le maire d'Oshawa, Dan Carter. Il ajoute que même en mars, lorsqu'il est devenu possible de distribuer des amendes, il a préféré demander à ses agents de sensibiliser les gens.
Roger Sigouin, lui, admet toutefois que les situations peuvent changer de jour en jour
.
Aucun contrôle des déplacements
Par ailleurs, depuis la reprise du confinement à Toronto et dans la région de Peel, certains habitants n’hésitent pas à se rendre dans les régions limitrophes où les restrictions sont moins strictes.
Dans les régions de York et de Durham, plusieurs commerçants ont rapporté un afflux de clients torontois, que ce soit pour les aubaines du Vendredi fou ou pour pouvoir de se faire servir au restaurant.
Si le gouvernement recommande de ne pas se déplacer d’une zone à haut risque d’infection vers les zones moins touchées, et inversement, là encore, aucun contrôle des déplacements n’est prévu pour le moment. Ni maintenant ni durant les Fêtes.
Entre la carotte et le bâton
Pour Geneviève Tellier, professeure en sciences politiques à l'Université d'Ottawa, le gouvernement pour l’instant adopte une approche moins contraignante en essayant de persuader les gens de ne pas faire les choses
.
La politologue estime que Doug Ford a choisi la carotte
plutôt que le bâton
. J’ai l’impression que le gouvernement se croise les doigts pour qu’une majorité de personnes les respectent. Mais de penser que tout le monde va s’y plier, je pense que non, ce n’est pas raisonnable
, ajoute Mme Tellier.
Mais elle n’écarte pas un changement de situation d’ici la fin de l’année.
Peut-être que ce que le gouvernement essaye de faire, c’est de dire : j’ai lancé mon message, les réunions je ne les permets pas, attendons de voir la réaction des gens, puis par rapport à cette réaction-là on s’ajustera.
Elle exprime par ailleurs des doutes sur l’efficacité des sanctions. On ne peut pas mettre un policier devant chaque porte
, rappelle-t-elle.
Au cours des derniers jours, les rassemblements illégaux se sont multipliés dans la grande région de Toronto. Les régions de Peel et de York ont durci le ton, distribuant plus d'amendes et organisant plus d’inspections. Reste à savoir si ça s’avérera dissuasif durant les festivités.
C’est au gouvernement de trouver la bonne méthode
, ajoute Geneviève Tellier. Si ce n'est pas à travers des sanctions comme des amendes, cela pourrait se manifester par d’autres mesures de contrôle comme l'interdiction des déplacements entre régions avec des points de contrôle sur les routes, explique la politologue.
Samantha Hill, présidente de l'Association médicale de l'Ontario, espère, elle, que la population n’aura pas la mémoire courte.
On a vu déjà que la dernière fois qu’on a donné des recommandations, ce n’est pas tout le monde qui les a suivies
, dit-elle. J’espère que les gens apprennent et qu’ils voient ce qu’il se passe lorsqu’on n'applique pas les recommandations
.