Elle retrouve la vue et sa passion pour les arts

Luce Mazerolle-Richard ne cesse de créer de nouvelles oeuvres depuis qu'elle a reçu une greffe de la cornée.
Photo : Luce Mazerolle-Richard
Luce Mazerolle-Richard, une artiste de Moncton, avait presque entièrement perdu la vue avant de recevoir une greffe de la cornée. Depuis, elle retrouve tranquillement sa vision, et du même coup, le plaisir de créer.
Luce Mazerolle-Richard est atteinte de la dystrophie cornéenne de Fuchs, qui provoque une perte graduelle de ses capacités visuelles depuis des années.
Ça s’est fait tellement graduellement qu’on tend à oublier. Un jour tu ne peux plus faire une chose, puis une autre [...] Mon mari n’a que 10 % de sa vue, il a toujours été comme ça, alors c’était moi les yeux du foyer.
Avant de perdre la vue, Luce créait des collages colorés qu’elle vendait sous forme de cartes de souhaits au Marché de Dieppe.
Photographe amateure, elle se promenait souvent en voiture à la recherche de paysages qu'elle imprimait également sur ses cartes.
En 2018, l’état de sa vision s’était tellement détérioré qu’elle a dû cesser de conduire.
Cette perte de liberté a été un gros choc
puisqu'elle devait mettre une croix sur ses activités créatives et sociales.
Il lui a fallu attendre jusqu’à l’automne 2019 pour recevoir une greffe de la cornée sur son œil gauche, qui voit maintenant beaucoup mieux.
Il y a quelques semaines, elle s’est rendue à Halifax pour une deuxième greffe, sur son œil droit.
Un élan d’inspiration
Alors que plusieurs artistes étaient en panne d’inspiration pendant la pandémie, c'était tout le contraire pour Luce Mazerolle, qui créait des tableaux du matin au soir.
Mon œil gauche commençait à guérir. Au mois de mars, quand la pandémie a commencé, c’est comme si je retrouvais la liberté dans la créativité et c’était comme un élan, je ne peux pas l’expliquer, c’est tout ce que je pouvais faire, c’est comme une nourriture!
Luce Mazerolle-Richard se sert de techniques mixtes pour réaliser ses œuvres. Elle superpose différents matériaux comme du papier peint, du tissu, de la peinture et des objets recyclés comme des morceaux de bois, de bijoux, et des boutons.
Récemment, elle a recommencé à faire de la photo, mais avec certaines limites.
Je prends une chance. J’ai une idée de ce que je vois, mais je ne vois pas les détails
, explique-t-elle.
Elle raconte que la vie lui offre parfois de belles surprises, comme cette fois où elle est allée se promener en nature.
Je vois de la verdure, c’est beau, je prends une photo, mais je ne vois pas les détails. J’arrive ici [à la maison], je mets ça à l’ordinateur parce que j’ai un écran plus grand et il y avait une belle petite coccinelle rouge sur le feuillage vert!
Elle souhaite pouvoir reprendre le volant lorsque son deuxième œil sera guéri, afin de se promener plus librement avec sa caméra.
Une leçon de résilience et d’émerveillement
Luce Mazerolle-Richard admet qu’elle a beaucoup appris de cette épreuve difficile.
J’ai appris le lâcher-prise! Il y a une paix qui s'installe. Si tu résistes, tu souffres parce qu’avec la résistance il y a de la souffrance. Dans l’accueil, l’acceptation et le lâcher-prise, il y a de la joie et du bien-être.
Elle ajoute que cette période d’insécurité l’a bien préparée à vivre le confinement.
Là on est en phase orange, mais moi, j’ai de quoi m’occuper
, dit-elle avec enthousiasme.
Elle se réjouit d'être dotée d'une capacité d’émerveillement et aimerait partager cette joie avec le public.
Ça m’émerveille, je crois que j’ai un cœur d'enfant. Je suis tellement choyée d’être comme ça [...]J’aimerais que les gens voient mes tableaux, je veux semer la joie, parce qu’il y en a beaucoup dans mes tableaux!
Luce Mazerolle-Richard ne voit peut-être pas aussi clair qu'avant, mais de par sa capacité à voir la beauté qui l’entoure, elle arrive à voir beaucoup mieux que bien des gens.