De nouvelles projections canadiennes inquiétantes sur l'évolution de la COVID-19
« Il est urgent de faire baisser rapidement le taux d’infection », plaide l'Agence de la santé publique du Canada, qui ne conteste toutefois pas l'approche retenue par Québec en vue de la période des Fêtes.

« Il est urgent de faire baisser rapidement le taux d’infection à travers le pays », a plaidé l'administratrice en chef de l'ASPC, la Dre Theresa Tam, en conférence de presse, vendredi, à Ottawa.
Photo : La Presse canadienne / Justin Tang
- François Messier
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
À cinq semaines de la période des Fêtes, l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) presse les Canadiens de réduire encore davantage leurs contacts sociaux à la lumière de nouvelles projections sur l'évolution de la COVID-19.
Selon cette modélisation mathématique, dévoilée vendredi matin en conférence de presse, la situation risque fort d'empirer au pays avant de s'améliorer.
On y indique que le pays pourrait enregistrer 20 000 cas de la maladie par jour d'ici à la fin de l'année si les contacts sociaux des Canadiens se maintiennent à leur niveau actuel.
Ce serait quatre fois plus que le nombre de cas déclarés quotidiennement au pays, qui s'établit aux alentours de 4800 en moyenne depuis quelques jours.
Les hospitalisations et les décès attribuables à la maladie augmenteraient en conséquence.
Cela pourrait ajouter près de 1000 décès au bilan du pays, qui s'établit à l'heure actuelle à un peu plus de 11 200 morts.
Selon un scénario pessimiste, basé sur la possibilité théorique que les contacts sociaux augmentent, le nombre de cas pourrait même atteindre 60 000 d'ici la fin du mois de décembre.
Le nombre d'éclosions augmente au pays, elles sont plus importantes qu'auparavant et elles touchent de plus en plus de foyers de soins de longue durée, de communautés autochtones et d'écoles.
Modélisation 20 novembre 2020.pdf by Radio-Canada on Scribd
Dans un point de presse subséquent, le premier ministre canadien Justin Trudeau s'est alarmé de ce qu'il a qualifié de montée fulgurante des cas
et a fait écho à l'appel de l'ASPC. Je vais vous dire la vérité, les prochains mois vont être plus difficiles
, a-t-il dit.
Il faut être réaliste. La seule façon de renverser la tendance, c’est de réduire nos contacts en personne. Si vous n'avez pas besoin de quitter votre domicile, restez chez vous. Réduisez vos contacts. Aidez-nous à briser la deuxième vague et à sauver des vies.
De l'urgence de faire baisser le taux d'infection
Selon l'ASPC, les cas recensés cette semaine au pays sont en augmentation de 15 % par rapport à la semaine précédente, et 48 régions sanitaires comptent maintenant au moins 50 cas pour 100 000 habitants.
Avec l’augmentation rapide et continue du nombre de cas quotidiens, la hausse du nombre d’hospitalisations et des décès, et la propagation à des populations et à des milieux à haut risque, il est urgent de faire baisser rapidement le taux d’infection à travers le pays.
La croissance rapide à l'échelle nationale est principalement liée aux six provinces en dehors de la bulle atlantique. Bien que des différences régionales demeurent, toutes ces provinces connaissent de fortes augmentations du taux d'infection. Au cours de la dernière semaine, chacune a rapporté son nombre de cas quotidien le plus élevé à ce jour
, a-t-elle ajouté.
Selon l'ASPC, le taux de reproduction du virus est supérieur à 1 depuis la fin du mois d'août, ce qui signifie que chaque personne infectée en contamine plus d'une autre. Pour que la propagation s'estompe, ce taux doit être ramené sous ce seuil le plus rapidement possible.
Autre signe que la transmission communautaire augmente depuis des semaines : le taux de positivité constaté lors des tests de dépistage est de 6,5 %, alors que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande qu'il se situe sous la barre de 5 %.
L'ASPC presse conséquemment les Canadiens de se limiter à des activités essentielles et de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour réduire leurs contacts, afin que le nombre quotidien d'infections soit limité à moins de 10 000 d'ici la fin de l'année.
Elle invite en outre les autorités régionales de la santé publique à adopter des mesures qui permettront aussi de réduire ces contacts.
Si le nombre de cas continue d’augmenter, ça veut dire malheureusement que les mesures actuellement en place et [la réduction] des activités des citoyens ne sont pas suffisantes et qu’à un moment donné, il faudrait mettre en place des mesures plus strictes
, a laissé tomber le Dr Njoo.
C’est ce qu’on voit en Europe [...] et on voit que le taux [d’infection] descend. Espérons que le Canada ne se rendra pas là, mais nous en sommes certainement proches, si nous n’y sommes pas déjà à certains endroits.
L'ASPC ne conteste pas l'approche de Québec en vue des Fêtes
Les projections de l'ASPC avaient été éventées par plusieurs médias jeudi soir, quelques heures après que le gouvernement du Québec eut annoncé qu'il autorisera des groupes de 10 personnes à se réunir les 24, 25, 26 et 27 décembre.
Interrogé à ce sujet, le sous-administrateur de l'ASPC, le Dr Howard Njoo, n'a pas contesté cette approche, mais en rappelant que les termes du « contrat moral » offert par Québec doivent être respectés.
Si tout le monde prend au sérieux ce qu’on fait aujourd'hui – limiter les contacts, faire peut-être même une "autoquarantaine" d'une semaine avant les Fêtes –, peut-être qu’on peut avoir des rassemblements familiaux plus petits que d’habitude.
Je pense que c’est vraiment très important de commencer aujourd'hui avec des actions à l’échelle individuelle, mais aussi à l’échelle du gouvernement, je suis d’accord avec ce que le gouvernement du Québec a commencé à faire
, a-t-il ajouté.
Le Dre Tam a toutefois souligné peu après que les gens qui profiteront de cette permission devraient tout de même porter un masque, garder leurs distances et se laver régulièrement les mains, comme prescrit.
Elle a ajouté qu'il serait aussi préférable que les fêtards ne s'assoient pas les uns à côté des autres, voire qu'ils aillent dehors si possible.
La Dre Tam et le Dr Njoo ont aussi laissé entendre à plus d'une reprise qu'il serait souhaitable que les gens s'isolent pendant deux semaines avant de se voir pour les Fêtes.
Selon le plan de Québec, cela est cependant impossible pour quiconque a des enfants fréquentant des écoles primaires ou secondaires, puisque leur dernière journée de classe aura lieu le 16 décembre.
Selon des sources gouvernementales, certains membres du caucus libéral ont mal accueilli cette approche, qui pourrait alimenter la propagation de la maladie.
Le premier ministre Trudeau assure cependant qu'il n'est pas du lot.
- François Messier