Les jeux vidéo sont bons pour le moral, selon une étude

Cinq millions d'exemplaires d'«Animal Crossing: New Horizons» ont été vendus en mars, permettant à Nintendo d'établir un nouveau record de ventes en un mois d'un jeu de console.
Photo : Nintendo
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Jouer aux jeux vidéo a des effets positifs sur le bien-être. C'est la conclusion à laquelle arrive une équipe de recherche de l'Université d'Oxford dans une nouvelle étude (Nouvelle fenêtre) basée sur les jeux Animal Crossing: New Horizons et Plants vs. Zombies: Battle for Neighborville. Cette étude laisse toutefois perplexe la professeure en jeux vidéo à l'École des médias de l'Université du Québec à Montréal, Gabrielle Trépanier-Jobin.
Contrairement aux craintes répandues selon lesquelles un excès de temps passé à jouer mène à une dépendance et à une santé mentale affectée, nous avons trouvé une petite corrélation entre le jeu et le bien-être
, résument les titulaires de l'étude.
Nos résultats confortent l'idée que les jeux en ligne offrent une solution de rechange satisfaisante aux rencontres en face à face en cette période exceptionnelle
de confinement, a expliqué à l'Agence France-Presse l'un des membres de l'équipe de recherche, Matti Vuorre.
Les jeux vidéo, notamment les jeux en ligne, sont régulièrement accusés de nuire à la santé mentale des joueurs et joueuses, et des études antérieures ont critiqué l'effet de séances trop longues de jeu sur les plus jeunes.
Depuis 2018, l'Organisation mondiale de la santé reconnaît ainsi la dépendance aux jeux vidéo comme une maladie mentale, une décision critiquée par un bon nombre de chercheurs et chercheuses
, selon M. Vuorre.
Un accès privilégié aux données
Pour expliquer cette différence de conclusion, l'équipe d'Oxford met en avant l'utilisation de données de temps de jeu fournies par les équipes de développement de ces jeux vidéo, Nintendo et Electronic Arts. Des études précédentes s'appuyaient plutôt sur des autoévaluations des personnes sondées.
Dans notre étude, l'association entre temps de jeu réel et bien-être était plus forte
qu'en comparant avec le temps de jeu rapporté, peut-on lire.
En travaillant avec les entreprises de jeux vidéo, pour la première fois, nous avons pu nous pencher sur la relation entre la façon de jouer et le bien-être
, précise un autre auteur de l'étude, le professeur Andrew Przybylski, dans un communiqué de presse.
Ainsi, les personnes ayant passé plus de quatre heures par jour en moyenne à jouer à Animal Crossing se disaient plus heureuses.
Le jeu de simulation Animal Crossing comme celui de tir Plants vs. Zombies possèdent tous les deux un graphisme coloré, proche du dessin animé, et ni l'un ni l'autre ne font partie des titres les plus controversés pour leur violence ou leur incitation à dépenser de l'argent.
Nos résultats étaient remarquablement similaires pour les deux titres, qui n'appartiennent pas au même genre, a souligné M. Vuorre. Des études ultérieures seront l'occasion d'étudier un plus vaste échantillon de genres.
Des bémols
Gabrielle Trépanier-Jobin, qui dirige aussi Homo Ludens, un groupe de recherche qui se penche notamment sur les usages du jeu Animal Crossing depuis le début de la pandémie, pointe du doigt quelques lacunes de la recherche. À commencer par le titre, Une corrélation positive entre les jeux vidéo et le bien-être, qu'elle estime très trompeur
.
Les chercheurs disent qu’ils ont trouvé un lien relativement faible. […] Ils ne peuvent pas décréter que ce sont tous les jeux vidéo qui rendent heureux.
Tout ce que l'étude peut conclure, finalement, c'est que les gens sont heureux de jouer à ces deux jeux-là. […] On ne dit pas non plus qu'à partir d'un certain seuil de temps, par exemple après 10 heures par jour, il pourrait y avoir un certain malheur
, ajoute-t-elle.
Comme l'équipe de recherche le souligne, aucune conclusion de cause à effet ne peut être tirée de l'étude : Les gens qui jouent beaucoup à ces deux jeux pourraient aussi être des gens plus heureux en général.
Aussi, l'étude, qui n'a pas encore été révisée par les pairs, ne fait aucune mention du contexte de pandémie. Il s'agirait d'une erreur préoccupante
, selon la chercheuse, et qui serait suffisante pour que l'équipe de recherche soit forcée de retourner à la table de travail.
Notre sentiment de bonheur n’est pas représentatif en ce moment. Je peux être une personne heureuse et équilibrée, mais ma vie peut avoir été complètement chamboulée avec la pandémie.
La chercheuse estime toutefois que l'étude vient ajouter un contrepoids intéressant au discours ambiant selon lequel les jeux vidéo seraient nocifs pour la santé mentale.
En temps de pandémie, le jeu vidéo est un exutoire, une échappatoire. C'est l'un des éléments qui peut certainement changer la donne sur notre bien-être
, souligne Gabrielle Trépanier-Jobin.
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Avec les informations de Agence France-Presse