Watch Dogs Legion : des artistes montréalais prennent d’assaut les rues de Londres

Le jeu « Watch Dogs Legion », d'Ubisoft, dépeint de manière réaliste la signature visuelle des différents quartiers de Londres.
Photo : Courtoisie Ubisfot
Si l’art urbain londonien de Watch Dogs Legion est aussi réaliste, c’est grâce à une équipe montréalaise de muralistes et de designers graphiques. Depuis cinq ans, le groupe a créé quelque 300 œuvres pour peaufiner la signature visuelle du jeu vidéo, dont la sortie est prévue le 29 octobre prochain.
Le troisième titre de la série Watch Dogs, d’Ubisoft, nous plonge en plein cœur d’une Londres post-Brexit dystopique. Plus divisée que jamais, la population se joint à des factions qui marquent leur territoire par des murales, tags et graffitis un peu partout dans la ville.
Ces œuvres ont une touche bien particulière : elles ont été entièrement créées par des artistes d'art urbain de Montréal, l’une des rares équipes au monde à avoir une double expertise en design graphique.
C’est assez unique dans l’industrie du jeu vidéo. Je pense que c’est la première fois qu’un projet a une équipe affectée à ça.
En tout, son équipe et lui ont créé de toutes pièces quelque 300 œuvres, et de 150 à 200 publicités, devantures de magasin et affiches.
Ça dépasse largement ce nombre, si l'on compte toutes celles qui ont été rejetées
, souligne-t-il en riant.
Saisir l’essence de Londres
Que l’art urbain soit fait dans la vraie vie ou dans un jeu vidéo, le processus est similaire, selon Nick Fortin.
Avant de faire un graffiti dans la ville, on se prépare pendant des heures, voire des années, avec des sketches pour trouver aussi sa propre signature
, explique-t-il.
Amsterdam, New York, Paris, Los Angeles… toutes les grandes villes ont leur propre signature urbaine. Nick Fortin a posé ses valises à Londres pour bien capter l’essence de la ville et la transposer à sa façon dans le jeu vidéo. Un processus qu’il connaît bien, lui qui a travaillé seul pour la production de l’art urbain du dernier jeu de la série Watch Dogs, qui se déroule à San Francisco.
À Londres, il a donc déambulé dans le quartier plus rebelle, voire punk, de Camden. Il s’est aussi rendu à Brixton, qui a des influences afro-caribéennes, et à Shoreditch, un secteur plus tendance, qui n’est pas sans rappeler le Mile-End, à Montréal.
La culture britannique se transpose dans l’art. On ne souhaite pas se marcher sur les pieds. Il y a quelque chose aussi avec leur humour, leur façon d’aborder des sujets.
Il a également rencontré D*Face et Ben Eine, des artistes de rue connus partout dans le monde.
Ces deux muralistes britanniques sont familiers pour la population montréalaise. On peut trouver leurs œuvres rue Prince-Arthur, à l’angle du boulevard Saint-Laurent et à l'angle de l’avenue du Parc.
Les deux artistes londoniens lui ont permis de mieux saisir les différents styles, mais aussi l'avenir de l’art urbain à Londres. Car il y avait le défi de rendre la ville la plus réaliste qui soit, mais il fallait aussi que ça se reflète dans l’intrigue du jeu, qui se déroule dans le futur.
C’est avec tous ces éléments en main que l’artiste et ses coéquipiers Maxime Bourgeois, Filipe Aguiar et Antonin Brault-Guilleaume se sont mis à leur table à dessin.
Du réel à la fiction
Les quatre artistes ont donc créé un langage visuel selon la nature de la mission donnée au personnage, allant du piratage à l’intrusion par effraction dans un immeuble, en passant par une bataille avec un gang de rue.
Chaque faction a aussi son identité visuelle : Il y a beaucoup de pochoirs faits avec des canettes de peintures, un moyen pour communiquer la propagande de la résistance contre l'oppression. Ça apporte une touche d’authenticité que les gens qui connaissent le street art vont apprécier
, explique Nick Fortin.
De faire appel à de véritables street artists, ça nous permet de nous rappeler à l’ordre pour ce qui est de l’authenticité des œuvres créées.
Mais Nick Fortin, dont on peut contempler la murale Montréal à l’angle des rues Bellechasse et Christophe-Colomb, dans le quartier Rosemont, admet que de produire une œuvre sur un mur demeure une expérience unique : C'est l’odeur de la brique, la texture. Quand on produit à l’ordinateur, il n’y a pas le côté texture, même si on s’arrange pour qu’il y en ait.
Le jeu vidéo Watch Dogs Legion, qui sera lancé le 29 octobre prochain, marque un tournant visuel important dans l’industrie, et Nick Fortin se réjouit qu’il fasse briller le talent montréalais en art urbain.