Le nombre d'appels à l'aide a doublé à la ligne Info-Social 811

Le nombre d'appels a doublé à la centrale Info-Social 811 depuis le début de la pandémie.
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Les Québécois ont le moral dans les talons. La ligne Info-Social 811, le pendant d'Info-Santé qui répond aux problèmes psychosociaux, a vu son nombre d'appels à l'aide reçus doubler depuis le début de la pandémie. À la centrale de la ligne d'aide gouvernementale à Montréal, l'équipe de 37 travailleurs sociaux peine à répondre au volume d'appels.
Dans la première vague, on pouvait avoir constamment 100, 150 appels en attente avec des temps d'attente qui pouvaient atteindre une heure facilement. L'an passé, au même moment, on répondait à 90 % de nos appels en 4 minutes, ce qui n'est plus du tout le cas
, explique Paul Fortugno, travailleur social et coordonnateur clinique à la ligne 811.
Au sommet de la première vague, en mai dernier, les travailleurs sociaux ont répondu à 3180 appels. C'est deux fois plus qu'à la même période l'an passé, et plus du tiers de ces appels étaient directement liés à la COVID-19.
Après une certaine accalmie cet été, le retour à des mesures sanitaires plus strictes a propulsé le nombre d'appels vers un record en septembre, avec 2774 appels. Encore une fois, c'est deux fois plus que l'année précédente.
L'angoisse face à la pandémie ne s'estompe pas, mais les sources d'anxiété ont changé entre la première et la deuxième vague, note Paul Fortugno. Lors de la première vague, il y avait beaucoup de gens qui nous appelaient parce qu'il y avait un stress lié à l'avènement de la COVID. Ils avaient peur de se faire infecter
, raconte le travailleur social.

Paul Fortugno, coordonnateur clinique à la centrale Info-Social 811 de Montréal.
Photo : Radio-Canada
De la peur de l'inconnu au printemps, c'est plutôt la difficulté de s'adapter aux changements des règles sanitaires qui sème l'angoisse actuellement. En ce moment, ce qui revient beaucoup, c'est la difficulté en termes d'adaptation sociale en lien avec les mesures sanitaires. Les gens vivent une certaine détresse en lien avec ça, et ils commencent à être usés de tout ce qui peut entourer la COVID
, précise le travailleur social.
Ce stress lié à l'usure se traduit dans les résultats préliminaires de l'étude d'un groupe de chercheurs qui tente de dresser un portrait du bien-être de la population québécoise durant la pandémie. Le premier échantillon tend à démontrer que le moral des Québécois se détériore, explique Georgia Vrakas, chercheuse spécialisée en santé mentale.
Comparativement à 2012, où le pourcentage de la population qui avait une santé mentale optimale était de 77,5 %, notre échantillon montre que ce taux a baissé à 48 %
, affirme Mme Vrakas, qui est également professeure en psychologie à l'Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR).
Un message anxiogène
Les nombreux changements concernant les règles sanitaires en vigueur contribuent à l'anxiété collective, croit aussi Mme Vrakas.
L'être humain a besoin de savoir où il s'en va et la COVID ne nous permet pas d'avoir ce contrôle-là. On a le droit de sortir un jour, le lendemain on ne peut pas. Les règles changent constamment. Nos connaissances changent constamment, donc ça insécurise et ça augmente la détresse.

Georgia Vrakas, professeure en psychologie et chercheuse spécialisée en santé mentale, observe que la santé mentale des Québécois se détériore.
Photo : Radio-Canada
Pour soutenir le moral des Québécois, elle milite pour que le gouvernement fasse preuve d'une plus grande transparence dans ses messages à la population. Ça peut être anxiogène. Comme je disais, on a besoin de savoir où on s'en va. Et le problème aussi, c'est quand il n'y a pas de justification claire basée sur les données probantes.
À preuve, lorsque le premier ministre François Legault se présente devant les journalistes et expose une forte augmentation des cas et un grand nombre de décès liés à la COVID, le téléphone résonne au centre d'appels de la ligne Info-Social. C'est une explosion d'appels
, lance Paul Fortugno.
À la centrale 811, ce ne sont pas des zones orange ou rouges dont on s'inquiète, mais des zones grises face à l'inconnu et à l'incertitude.