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Racisme dans la police : les cégeps défendent la qualité de leur formation

Le ministère de la Sécurité publique reprend ses consultations sur la refonte du travail policier au Québec.

Un écusson sur lequel on peut lire « Techniques policières, Collège d'Alma ».

L'écusson des techniques policières du Collège d'Alma

Photo : Radio-Canada

Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Les cégeps du Québec se mobilisent pour défendre leur programme en techniques policières, alors que le ministère de la Sécurité publique reprend ses consultations, près d’un an après avoir déposé un « livre vert » intitulé « Réalité policière au Québec : modernité, confiance et efficience ».

Ces consultations, qui ont été annoncées en décembre dernier, au lendemain du dépôt d’un rapport très critique sur le profilage racial au sein du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), ont pris du retard en raison de la pandémie.

Parmi les intervenants qui doivent témoigner la semaine prochaine devant le comité consultatif mis en place par la ministre Geneviève Guilbault pour repenser le travail policier, figure la Fédération des cégeps, qui insiste sur la pertinence et la qualité de sa formation.

D’une durée de trois ans, cette formation qui mène au diplôme d’études collégiales (DEC) est offerte dans une dizaine de cégeps à travers la province. Une fois qu'il l'a réussie, le candidat doit ensuite suivre une autre formation de 450 heures en patrouille-gendarmerie à l’École nationale de police du Québec (ENPQ).

Dans une simulation, trois futurs policiers en formation s'apprêtent à intervenir auprès d'une personne qui boit dans un lieu public.

Simulation d'aspirants policiers en formation

Photo : Radio-Canada / Pierre Marceau

Dans un avis publié jeudi, les cégeps du Québec affirment que la formation policière est fréquemment pointée du doigt lorsque vient le temps d’expliquer les difficultés actuelles, dont le racisme et la discrimination systémiques. Selon eux, cette formation peut continuer de s’adapter aux réalités policières, mais elle ne constitue pas à elle seule la clé de voûte pour résoudre ces problèmes.

« Si on estime qu’il y a des lacunes dans les compétences des policiers, ce n’est pas du côté de la formation initiale qu’il faut regarder, même si les cégeps sont toujours disposés à examiner leurs pratiques en fonction des besoins du milieu de travail. »

— Une citation de  Bernard Tremblay, président-directeur général de la Fédération des cégeps

La Fédération estime toutefois qu’une part de la responsabilité repose sur les milieux policiers, [qui] doivent contribuer à l’amélioration de la formation initiale et continue des corps de police québécois.

Il est de la responsabilité des organisations policières d’assurer une socialisation professionnelle positive, une supervision étroite et une formation continue de leurs employés, peut-on lire dans l’avis rendu public par la Fédération. Les cégeps ont, quant à eux, la responsabilité de former des généralistes qui peuvent intégrer différentes organisations policières.

« Le développement d’une culture policière plus ouverte à la diversité culturelle, sexuelle et sociale est la clé de voûte de la diversification du profil des nouveaux policiers. Les organisations policières ont un rôle à jouer, en évaluant leur propre culture et la manière dont elle se perpétue de génération en génération en contribuant aux discriminations. »

— Une citation de  Extrait de l’avis de la Fédération des cégeps

Diversifier les cohortes

La Fédération des cégeps appelle par ailleurs le ministère de la Sécurité publique à l’aider pour diversifier le profil de ses étudiants en lançant une campagne de promotion sur les réseaux sociaux pour attirer des candidats issus de communautés culturelles différentes.

Plusieurs cégeps offrant la formation en techniques policières, notamment à Montréal, ont par ailleurs déjà pris de l’avant et entamé une réflexion sur ce sujet. C’est une question qui nous préoccupe, affirme Sophie Beauregard, conseillère en communication au Collège Ahuntsic, où un groupe de travail a été mis en place en hiver dernier pour réfléchir aux différentes manières d'attirer plus de candidats issus de communautés culturelles diverses.

Des policiers munis de casques et de boucliers devant des manifestants.

Face-à-face entre un manifestant et la police lors d'une manifestation contre le racisme.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Selon les derniers chiffres officiels, les étudiants issus des minorités visibles ou des communautés autochtones représentent 8,1 % des candidats inscrits à l’ENPQ en 2018-2019.

Le programme de techniques policières a été revu plusieurs fois au cours des 20 dernières années, comme le rappellent les cégeps. La dernière refonte remonte à 2017 avec l’ajout de 60 heures de formation axées sur la compétence en santé mentale et en toxicomanie.

La nécessité de développer l'esprit critique

Cependant, pour Mariam Hassaoui, professeure de sociologie à l’Université TELUQ et co-autrice du rapport sur le profilage racial au sein du SPVM, la formation reste insuffisante pour répondre aux problématiques actuelles.

Mme Hassaoui, qui a elle-même enseigné les techniques policières dans deux cégeps différents au début des années 2000, affirme que peu de cours ont été ajoutés pour sensibiliser les futurs policiers aux réalités des minorités visibles et des communautés vulnérables.

« Sur les 2385 heures de cours qui sont offertes, seulement 45 heures sont consacrées aux relations avec les communautés culturelles. C’est très insuffisant […] surtout que, dans la pratique, le travail policier est basé sur l’interaction sociale. »

— Une citation de  Mariam Hassaoui, professeure de sociologie à l’Université TELUQ

Mme Hassaoui dénote aussi que dans la liste des 36 compétences fournie par la Fédération des cégeps à la fin de son avis, il n'y en a qu'une seule qui concerne directement l'interaction avec les communautés culturelles et ethniques.

Selon la sociologue, il est fondamental que les [apprentis] policiers suivent des cours sur le racisme et la discrimination systémiques. D'ailleurs, affirme-t-elle, 15 à 20 % des étudiants inscrits à son cours de sociologie à l’Université TELUQ sont des policiers. Les policiers eux-mêmes disent avoir besoin de ce type de formation-là, ajoute-t-elle.

Les cégeps ont un rôle décisif à jouer pour préparer [les futurs policiers] à avoir un certain esprit critique, affirme encore Mme Hassaoui. La sous-culture policière, comme dans n’importe quelle autre organisation, n’apparaît pas comme par magie. Ça reflète une culture générale.

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