Non, ce document ne prouve pas que le virus qui cause la COVID-19 n'a pas été isolé
Il s'agit plutôt d'une mauvaise compréhension des demandes d'accès à l'information et des procédés scientifiques.

Capture d'écran de la publication Facebook qui circule.
Photo : Capture d’écran - Facebook
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Une réponse à une demande d'accès à l'information formulée auprès de Santé Canada circule présentement sur Facebook. Elle est partagée par des gens qui croient qu'il y a là la preuve que le virus qui cause la COVID-19 n'a pas été isolé. Or, la demande elle-même vise le mauvais organisme gouvernemental, et le virus a bel et bien été isolé.
La lettre de Santé Canada qui confirme (dans cette réponse à une demande d'accès à l'information) qu'ils ne sont en possession d'AUCUN document montrant que le virus SARS-COV2 (qui produit la Covid-19) ait été isolé. Les tests et toutes les mesures sanitaires ne reposent donc sur RIEN de concret
, affirme une publication Facebook partagée plus de 3300 fois.
Celle-ci contient une capture d'écran d'une réponse de Santé Canada suite à une demande d'accès à l'information. La personne qui l'a formulée demandait à Santé Canada tous les documents contenant une description de l'isolation du virus SRAS-COV-2
, soit le virus qui cause la COVID-19.
Dans la demande, cette personne précisait ne pas vouloir des documents qui décrivaient une isolation où le virus n'a pas été combiné à d'autres matériels génétiques
, et écartait aussi toute isolation basée sur la culture, l'amplification ou le séquençage.
Dans la lettre publiée, on peut lire que Santé Canada affirme ne posséder aucun document qui convient à la demande, ce qui en a poussé certains à conclure que le virus n'a pas vraiment été isolé.
Or, il y a quelques problèmes dans cette demande. En premier lieu, elle n'a pas été formulée auprès du bon organisme gouvernemental.
Le rôle de Santé Canada n'est pas d'effectuer de la recherche pure, mais plutôt d'évaluer la recherche dans le but d'entreprendre des décisions en termes de réglementation, d'approuver des produits et d'autoriser des études cliniques. De plus, Santé Canada ne travaille pas directement avec des échantillons de patients ou du virus SARS-COV-2, puisque cela nécessiterait des laboratoires de niveau 3, ce que ne possède pas Santé Canada
, a expliqué la chef d’équipe de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels de Santé Canada, Christine Smith.
Si cette personne veut obtenir des renseignements quant à ce type de données scientifiques, elle devrait contacter les commanditaires de ces essais cliniques, ou les entreprises qui les mènent. Pour obtenir de l'information sur l'isolation du virus, il serait mieux de formuler une demande auprès de l'Agence de la santé publique du Canada ou le Conseil national de recherches du Canada
, a-t-elle ajouté.
Il n'est donc pas surprenant que la demande ait généré une réponse négative de la part de Santé Canada.
Le virus a bel et bien été isolé
Néanmoins, le virus a bel et bien été isolé par des laboratoires partout dans le monde, assure Benoît Barbeau, professeur au Département de sciences biologiques de l’UQAM et spécialiste de la virologie.
En ce moment, il y a des études de phase clinique 3 où on administre le virus lui-même à des personnes volontaires pour certaines études sur les vaccins et on voit que les gens développent des symptômes liés à la COVID-19
, a-t-il illustré en entrevue avec Radio-Canada.
Mise à jour (7 octobre) : Le Dr Barbeau précise que des études de phase 3 ont bel et bien lieu, mais que ce genre d'expérience, où on expose des volontaires au virus, n'ont pas encore été menées. Néanmoins, il maintient que le virus a bel et bien été isolé. Dans l'entrevue originale qu'il a accordée à Radio-Canada, il a tout de moins donné un autre exemple qui prouve que le coronavirus a été isolé, soit que les tests PCR fonctionnent en le détectant.
Le chercheur estime que la personne qui a fait la demande cherchait à prouver que le virus lui-même n'a pas été isolé en demandant d'écarter tout document mentionnant l'amplification du virus. Selon lui, cette personne croit sans doute que le fait d'amplifier le virus prouve que les scientifiques n'ont pas réussi à l'isoler complètement.
Toutefois, il s'agit d'une mécompréhension des outils scientifiques, martèle M. Barbeau.
Pour caractériser un virus, on a besoin d’une source d’amplification, explique-t-il. Le virus, lorsque vous le récupérez dans un échantillon d’une personne, il n’y en a pas une quantité suffisante pour être capable de l’étudier ou de le visualiser. Donc on a besoin d’en produire une grande quantité, et c’est pour ça qu’on utilise des outils d’amplification.
Le processus d'amplification doit être fait sur des cellules contenant le virus et peut contenir d'autres matériels génétiques, comme le mentionnait la demande d'accès à l'information. Par contre, les scientifiques sont tout à fait capables de reconnaître le matériel génétique du virus et de l'isoler, précise M. Barbeau.
Ça n’enlève aucunement le fondement, le lien direct causal entre le virus et la maladie
, conclut-il