Est-ce que les artistes des zones rouges peuvent en sortir?

Si le gouvernement n’interdit pas aux travailleurs et travailleuses du milieu culturel de se déplacer d'une zone rouge à des zones jaunes ou orange pour aller se produire, certaines personnes jugent qu’une responsabilité éthique pèse lourd sur leurs épaules.
Photo : getty images/istockphoto / Bernard Bodo
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Le passage de différentes régions en zone rouge cause de l’incertitude chez les artistes de scène. Si le gouvernement ne leur interdit pas de se déplacer d'une zone à l'autre pour aller se produire, certaines personnes jugent qu’une « responsabilité éthique » pèse lourd sur leurs épaules.
Il n’existe actuellement aucune directive spécifique en ce qui a trait aux déplacements des artistes vivant en zone rouge (Montréal, Québec ou Chaudière-Appalaches) vers des zones jaunes ou orange.
En fait, le cabinet de la ministre de la Culture a affirmé jeudi à Radio-Canada que techniquement, un individu peut se déplacer d’une région à une autre, mais ce n’est pas recommandé
.
Le ministère est d’avis qu’une personne ayant, par exemple, un spectacle prévu dans une région comme l’Abitibi-Témiscamingue pourrait s’y déplacer pour exercer son travail
. Rappelons qu’on demande de faire un effort et de limiter les contacts sociaux
, précise-t-on.
La responsabilité aux artistes?
Ils ont laissé la chose nébuleuse, comme pour faire sentir qu’ils portent attention à nous, mais [ne donnent pas assez] de détails, [et] une responsabilité tombe sur nous
, estime l’auteur-compositeur-interprète Matt Holubowski, qui a pour sa part pris la décision d’annuler son passage en Abitibi-Témiscamingue cette semaine, même si le diffuseur était ouvert à l'accueillir.

Matt Holubowski
Photo : Radio-Canada / Coralie Mensa
Sans directive claire, [les artistes sont] obligés de prendre une décision éthique dans une situation qui est très complexe.
Le musicien et président de Lisbon Lux Records, Julien Manaud, se questionne toutefois sur les déplacements. « On est dans une van, avec des gens qui ne sont pas nécessairement de la même bulle, on n’est pas à deux mètres, on doit arrêter dans des stations-service, on doit éviter les contacts et ne pas aller dans les restaurants », énumère-t-il, en faisant référence aux mesures sanitaires en vigueur.
Oui, on a hâte de travailler. Oui, on a hâte de faire ce qu’on aime. Mais imagine qu’on soit à l’origine d’une éclosion à Alma, de quoi on aurait l’air?
Oui, non, peut-être
Cette situation touche également les responsables de programmation de différents événements ou de salles de spectacle. Depuis la fermeture complète des institutions culturelles au printemps, ces dernières et derniers et sont constamment appelés à déplacer les dates de leurs activités.
Ils sont un peu pris
, estime Matt Holubowski. Ils veulent nous accueillir, ils veulent poursuivre, ce que je comprends d’un point de vue économique.
Dans mon band, j’ai des gens qui ont des enfants qui vont à l’école. On a hâte de refaire de la musique, de payer nos hypothèques, ça crée un dilemme.
Certains diffuseurs ont carrément annulé ou reporté des spectacles d’artistes provenant des secteurs critiques.
Le Regroupement de diffuseurs professionnels de spectacles (RIDEAU) convient qu’il s’agit d’une préoccupation. Il a fait part à l’ensemble de ses membres des recommandations de la Santé publique, soit que les déplacements entre les zones rouges et les autres zones sont possibles, mais que « toutes les interdictions de la zone rouge continuent de s’appliquer pour elles dans les autres zones, à l’exception de la possibilité d’y pratiquer leur art ou leur travail dans des lieux avec public ».
Luc Fortin, le président et directeur général par intérim de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, voit d’un bon œil le fait que les artistes puissent continuer à offrir des spectacles hors des régions en zones rouges.
Il souhaite toutefois qu’une directive claire soit donnée par le gouvernement.
Il y a comme un manque de limpidité. C’est un petit peu flou. J’aimerais avoir un vrai avis officiel du ministère de la Culture qui me dit : "Oui, let’s go".
Du côté de l’Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ), on mentionne ne pas avoir émis de directives ou de recommandations aux membres, mais leur avoir plutôt relayé les informations du ministère.