Trump propose Amy Coney Barrett pour la Cour suprême
En nommant une nouvelle juge conservatrice à la Cour suprême, Donald Trump pourrait s'assurer que les républicains conservent la mainmise des républicains sur le plus haut tribunal du pays pendant des décennies.
Photo : Reuters / Carlos Barria
Le président américain Donald Trump a confirmé la candidature de la juge Amy Coney Barrett à la Cour suprême des États-Unis. Cette nomination, si elle se concrétise, devrait permettre aux conservateurs de contrôler les destinées du plus haut tribunal du pays pendant encore plusieurs décennies.
Lors d'une brève allocution devant un parterre bondé dans la roseraie de la Maison-Blanche, où la distanciation sociale n'était guère respectée et où quasiment personne ne portait le masque, le président a parlé de Mme Barrett comme de l'un de nos plus grands esprits en matière de justice
.
« Je demande aux démocrates d'offrir à la juge Barrett les audiences qu'elle mérite et que le pays mérite. »
Ces audiences doivent débuter le 12 octobre. Le vote des sénateurs pourrait avoir lieu le 26 octobre, une semaine seulement avant la présidentielle.
Les leaders républicains du Sénat ont déjà indiqué qu'ils avaient suffisamment de votes pour confirmer sa nomination cette année.
Le président a aussi lancé, à la blague, que le processus [de confirmation] se passera certainement sans controverse, comme la dernière fois
.
Il faisait référence au processus de confirmation du précédent candidat à la Cour suprême, Brett Kavanaugh, qui a fait l'objet d'allégations d'agression sexuelle, notamment.
Le président Trump a aussi affirmé qu'au cours des prochaines années, la Cour suprême serait notamment appelée à se prononcer sur le deuxième amendement de la Constitution, soit le droit de porter une arme à feu.
Cet enjeu est au cœur de nombreuses batailles judiciaires dans l'ensemble des États-Unis.
De son côté, Mme Barrett s'est engagée à reprendre le flambeau du défunt juge Antonin Scalia, héros des conservateurs qui cherchait à interpréter les lois selon leur texte, sans nécessairement tenir compte des changements survenus au cours des décennies ou des siècles, soit une approche dite « originaliste ».

C’est celle que certains considèrent comme l’héritière spirituelle de l’ancien juge Antonin Scalia que Donald Trump a choisie pour occuper la position vacante au sein du plus haut tribunal des États-Unis. Amy Coney Barrett, une juriste catholique et résolument conservatrice, renforcera le contrôle de la droite sur la justice américaine. Le reportage d’Azeb Wolde-Giorghis.
La juge Barrett a tenu à saluer Ruth Bader Ginsburg, décédée il y a maintenant huit jours.
Mme Ginsburg s'est toujours battue pour les droits des femmes
, a-t-elle insisté. Elle n'a pas seulement brisé les plafonds de verre, elle les a fracassés.
Membre d'une organisation religieuse qui s'oppose à l'avortement, Mme Barrett n'a toutefois jamais indiqué publiquement qu'elle chercherait à réduire les droits des femmes à ce chapitre si elle en avait l'occasion.
La candidate à la Cour suprême a aussi déclaré que les juges devaient s'en tenir à l'interprétation des lois.
« Les juges ne décident pas des politiques, et doivent laisser de côté leurs opinions personnelles. »
Les qualifications de Mme Barrett font le bonheur des tenants de la droite, mais inquiètent ceux plus à gauche, qui craignent que ses décisions ne viennent saper certaines lois, notamment la décision Roe c. Wade, qui a légalisé l'avortement aux États-Unis en 1973.
Le choix de Mme Barrett pour le siège de feu Mme Ginsburg devrait énergiser la base électorale du président, mais aussi galvaniser ses opposants, à quelques semaines seulement du jour de l'élection présidentielle.

Le président américain Donald Trump a confirmé la candidature de la juge Amy Coney Barrett à la Cour suprême des États-Unis. Le reportage d'Azeb Wolde-Giorghis.
Une Cour divisée
Avec ses neuf sièges, la Cour suprême américaine comptait, jusqu'à la mort de Ruth Bader Ginsburg, cinq juges dits conservateurs contre quatre juges dits progressistes. Avec la nomination d'Amy Coney Barrett, six juges conservateurs siègeraient au plus haut tribunal des États-Unis, ce qui assurerait une majorité claire pour les tenants de la droite. Si la « couleur » d'un juge n'est jamais garante de son positionnement dans les causes examinées par la Cour suprême, davantage de juges conservateurs augmente les probabilités que les partisans de la droite aient gain de cause.
Biden demande le report de la confirmation
Le candidat démocrate à la Maison-Blanche, Joe Biden, a demandé au Sénat de ne pas se prononcer sur la nomination de Mme Barrett avant la présidentielle.
Le Sénat ne devrait pas se prononcer sur cette vacance tant que les Américains n'auront pas choisi leur prochain président et leur prochain Congrès
, a-t-il plaidé dans un communiqué quelques minutes après l'annonce du président Trump.
Les Américains votent déjà parce que leurs soins de santé sont dans la balance; parce qu'ils craignent de perdre leur droit de vote ou d'être expulsés du seul pays qu'ils ont jamais connu. Ils votent maintenant parce qu'ils ont peur de perdre leurs droits de négociation collective [...], ils votent parce qu'ils ne veulent pas que Roe c. Wade, qui est en vigueur depuis un demi-siècle, soit renversée.
De son côté, le chef de la minorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, a affirmé que la juge Barrett pourrait détruire tout ce que Ruth Bader Ginsburg a construit
. Je m'opposerai farouchement à cette nomination
, a-t-il dit.
Chez les républicains, le chef de la majorité au Sénat, Mitch McConnell, a pour sa part soutenu que le président Trump n'aurait pas pu prendre une meilleure décision
.
Jamais une bataille pour la confirmation d'un juge à la Cour suprême n'avait été engagée si peu de temps avant la date de l'élection. En fait, des centaines de milliers d'électeurs ont déjà voté, que ce soit en personne ou par la poste.
Au dire de plusieurs détracteurs progressistes, l'approche « originaliste » de la juge Barrett est trop rigide.
La façon dont ses convictions religieuses pourraient guider son raisonnement juridique avait aussi fait l'objet d'attaques de la part de démocrates lors d'audiences tendues pour sa confirmation à un poste de juge fédérale, en 2017. Là encore, c'est Donald Trump qui l'avait nommée.
Des républicains avaient alors accusé les démocrates de lui imposer un test de bien-pensance religieuse pour évaluer si elle pouvait occuper ce nouveau poste.