Le harcèlement en ligne s'intensifie contre les prodémocratie à Hong Kong

Des Hongkongais consultent leur téléphone intelligent à Hong Kong, où le site HK Leaks dévoile les informations personnelles de militants prodémocratie.
Photo : Getty Images / ISAAC LAWRENCE
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Carol Ng ne compte plus les appels menaçants et les messages la traitant de cafarde qu'elle a reçus depuis que son numéro de téléphone a été illégalement dévoilé sur Internet. Mais cette militante prodémocratie refuse de se laisser intimider.
Ils savent qu'ils peuvent faire très peur aux gens
, explique à l'AFP la présidente de la Confédération hongkongaise des syndicats. Mais je n'ai pas peur, parce qu'il s'agit de mes libertés et que je veux les défendre.
Une chose est sûre : elle n'est pas seule.
Doxing
HK Leaks, un site Internet très sophistiqué, a récemment intensifié sa campagne de doxing
-une pratique consistant à divulguer les informations personnelles de personnes dans le but de leur nuire- contre les militants du camp prodémocratie.
Ni l'ordre qui lui a été donné l'an passé par le Commissaire hongkongais à la protection de la vie privée de cesser son harcèlement ni son signalement à la police locale n'ont été suffisants pour le réduire au silence.
Il cible tout particulièrement les Hongkongais qui ont selon lui violé la nouvelle et drastique loi sur la sécurité nationale, que Pékin vient d'imposer à l'ex-colonie britannique.
Quelques semaines après l'entrée en vigueur du texte, HK Leaks a ainsi dévoilé les informations personnelles d'au moins 14 personnes qu'il accuse d'avoir enfreint cette loi, selon des journalistes de l'AFP.
Promu par des groupes liés au Parti communiste chinois et hébergé par des serveurs basés en Russie, ce site né en août 2019 a déjà fait de même avec des milliers de personnes, qu'il accuse d'avoir soutenu l'immense mobilisation prodémocratie de l'année dernière à Hong Kong.
Quand j'ai été ciblée, cela a généré énormément de stress chez moi.
Je recevais des appels téléphoniques et des messages des "rubans bleus" sur Facebook
, explique-t-elle, en référence à cette couleur associée au camp pro-Pékin. De temps en temps, j'étais inondée sous un déluge d'autocollants WhatsApp. Ils nous appellent les ''cafards''.
Hébergé par un serveur russe, le site est élaboré de façon à échapper aux poursuites, selon les experts. Il utilise des hébergeurs anonymes et change régulièrement de domaine.

Des manifestants prodémocratie se font entendre dans un centre commercial, tandis que des policiers montent la garde. (archives)
Photo : Getty Images / Anthony Kwan
Intimidation
Le site présente désormais en pop-up une fenêtre clamant que les émeutiers ont provoqué la mort de l'État de droit et de l'ordre dans la société hongkongaise
et que plus de 2000 policiers et membres de la mouvance pro-Pékin ont eux-mêmes été victimes de doxing
.
Plusieurs figures de proue du combat prodémocratie, comme Joshua Wong ou Agnes Chow, figurent sur le site dans l'onglet Émeutiers indépendantistes
, au même titre que le magnat des médias Jimmy Lai.
Parmi les 14 personnes présentées comme ayant enfreint la loi sur la sécurité nationale, on trouve des militants comme Tony Chung, Nathan Law ou Ray Wong.
Tony Chung, 19 ans, est devenu fin juillet la première personnalité politique poursuivie au nom de la nouvelle loi, et ce pour avoir promu l'indépendance hongkongaise au travers de Student Localism, un groupe dissous en juin qu'il avait cofondé en 2016.
Cofondateur avec Joshua Wong du parti Demosisto, également dissous, M. Law a fui début juillet au Royaume-Uni en raison de cette loi.
Selon des médias officiels chinois, MM. Wong et Law sont désormais recherchés pour avoir violé la loi sur la sécurité nationale, pour collusion avec les forces étrangères.
Joshua Wong est de son côté convaincu d'être la cible d'une campagne de harcèlement orchestrée par Pékin et Hong Kong.
Depuis que j'ai obtenu le statut de réfugié en Allemagne, le gouvernement de Hong Kong est déterminé à m'arrêter par tous les moyens
, a-t-il dit à l'AFP.