La saison des terrasses tire à sa fin. Les restaurants survivront-ils à l’hiver?

L'arrivée de l'automne signifie la fermeture des terrasses.
Photo : offerte par Matthew Senecal-Junkeer
La saison des terrasses 2020 a été absolument unique.
Les restaurateurs à travers le Canada ont agi rapidement au début de la saison pour créer ou agrandir leurs terrasses dans le but de se donner une capacité accrue tout en respectant les règles de distanciation physique.
Le froid approche, cependant, et les clients risquent de déserter les restaurants à nouveau. D'ici novembre, prédit la Chambre de commerce du Canada, jusqu'à 60 % des restaurants du pays pourraient disparaître.
Ma femme et moi exploitons tous les deux l'entreprise, et nous ne dormons pas très bien
ces temps-ci, a déclaré Matthew Senecal-Junkeer, propriétaire de The Birds & The Beets dans le quartier Gastown de Vancouver. Le restaurant ne dispose généralement que de quatre à six places à l'extérieur, mais cette année, la ville a permis au couple de transformer quatre places de parking en une terrasse de 50 places.
Nous avons travaillé à pleine capacité tout l’été
, a ajouté M. Senecal-Junkeer. Mais il a plu durant trois jours de suite, à Vancouver. Ça nous a donné un petit aperçu de l'hiver : on a vu une baisse d'environ 42 % par rapport à nos ventes de la semaine précédente.
Survie en jeu
À Windsor, en Ontario, John McKibbon est lui aussi inquiet.
Je mentirais si je disais que nous ne sommes pas anxieux
, a déclaré M. McKibbon, qui est copropriétaire du Sandbar Waterfront Grill ainsi que de John Max Sports & Wings.
Des gens sont venus au restaurant pour s'asseoir à l'extérieur, et quand nous étions pleins à l'extérieur et que nous n'avions des tables qu'à l'intérieur, certains de ces clients ont décidé de ne pas dîner avec nous ce jour-là
, a-t-il déclaré.
À lire aussi :
M. McKibbon et ses partenaires ont transformé un terrain de volleyball extérieur dans l'un de leurs deux bars sportifs en une terrasse permettant de respecter la distanciation physique.
Nous pensons que la perte de nos terrasses aura un effet assez dramatique sur nos ventes
, a-t-il déclaré.
Le secteur des services alimentaires du Canada emploie généralement 1,2 million de personnes et, avant la pandémie, servait 22 millions de repas par jour dans tout le pays, selon les données de l'industrie.
Statistique Canada a récemment publié les résultats d'une enquête conduite en mai sur les conditions de ces entreprises. La Chambre de commerce du Canada a analysé les chiffres en mettant l'accent sur les restaurateurs et a conclu que 60 % des participants ne s'attendent pas à survivre plus de trois mois avec les règles de distanciation physique telles qu’elles sont présentement..
Un nombre important de restaurants à travers le Canada ont déjà dû fermer définitivement.
Le président et chef de la direction de la Chambre de commerce, Perrin Beatty, a exhorté les Canadiens à prendre des mesures politiques pour encourager un soutien financier supplémentaire à l'industrie. Chacun doit également rappeler à ses élus l'importance des restaurants dans nos vies
, a déclaré M. Beatty dans un communiqué.
Nous ne sommes pas des experts en santé
La Chambre s'est associée à 60 des marques de restauration les plus connues au Canada, ainsi qu'à d'autres organisations hôtelières, pour lancer une campagne intitulée Nos restaurants (Nouvelle fenêtre). Il a également produit une publicité faisant la promotion de l'industrie (Nouvelle fenêtre) sur les plateformes de médias sociaux.
Mais Restaurants Canada, elle, hésite à y mettre autant d’efforts. Nous ne sommes pas des experts en santé
, a déclaré Mark von Schellwitz, vice-président de Restaurant Canada pour l'Ouest canadien. "Mais un certain nombre de membres se sont approchés de nous pour nous faire remarquer que les directives de l'Organisation mondiale de la santé pour la distance physique sont d'un mètre, et non de deux mètres (comme l’exige Santé Canada, ndlr). Si nous devions respecter une distanciation d'un mètre au lieu de deux, ceci augmenterait évidemment notre capacité, et ce serait vraiment utile. »
M. Von Schellwitz fait partie d'un groupe de l'industrie hôtelière qui fait pression sur le gouvernement fédéral pour qu'il lance une campagne nationale pour renforcer la confiance des consommateurs dans la restauration. Il a évoqué un programme au Royaume-Uni intitulé Eat Out to Help Out
, dans le cadre duquel les clients au restaurant pouvaient bénéficier d'une réduction de 50 % sur leurs repas tout au long du mois d'août jusqu'à concurrence de 10 £ (environ 17 dollars) par personne.
Le programme a fini par coûter au gouvernement plus cher que prévu puisque des millions de Britanniques ont sauté sur l’occasion. Le projet a coûté au total 522 millions de livres (900 millions $).
À Vancouver, M. Senecal-Junkeer espère la collaboration des propriétaires de son immeuble.
Ils exigent la totalité loyer maintenant,
dit-il. Nous avons bénéficié de la subvention salariale et nous avons pu installer une terrasse, donc nous avons pu payer. Mais je les ai déjà avertis qu’en octobre, je risque de ne pas pouvoir payer.
La subvention salariale d’urgence pour les petites entreprises a aidé beaucoup restaurateurs et a été prolongée jusqu'en décembre, mais le programme canadien d’aide au loyer commercial d’urgence a expiré à la fin du mois d’août.
Établis à Charlottetown, à l’Île-du-Prince-Édouard, Kevin et Kathy Murphy sont propriétaires de 16 établissements d’alimentation et de boissons dans trois provinces de l’Atlantique, ce qui comprend le Prince Edward Island Brewing Company. Les terrasses ont toujours eu de l’importance dans leur projet d’affaires, mais ils ont déjà fermé leurs restaurants Fishbones Oyster Bar & Seafood Grill pour l’hiver et songent sérieusement à faire de même pour leurs autres restaurants.
M. Murphy et d'autres entrepreneurs touristiques de la région se sont regroupés pour faire pression sur le gouvernement pour obtenir un soutien financier supplémentaire.