François Legault s'oppose à un réinvestissement majeur dans la cimenterie McInnis
La cimenterie McInnis, à Port-Daniel–Gascons
Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose
Le premier ministre François Legault s'oppose à un réinvestissement massif de la part de Québec dans la cimenterie McInnis pour éviter qu'elle ne passe aux mains d'intérêts étrangers. Au moins deux offres d'achat auraient été déposées pour acquérir la cimenterie, selon les informations obtenues par Radio-Canada, l'une par l'entreprise matanaise Béton provincial et une autre par une entreprise dont le siège social se trouve à l'extérieur du pays.
François Legault estime que les Québécois ont déjà beaucoup investi dans l'entreprise.
Il est hors de question que ce soit le gouvernement du Québec qui investisse la majeure partie d'un réinvestissement dans l'achat de la cimenterie
, a affirmé le premier ministre, interpellé sur la question lors d'une conférence de presse tenue à Montréal en début d'après-midi sur l'évolution de la pandémie de COVID-19.
M. Legault rejette le blâme sur le Parti libéral du Québec (PLQ) et sur le Parti québécois (PQ) pour les dépenses de dizaines de millions de dollars en argent public dans la cimenterie.
« Comme je l'ai déjà dit, à mon avis, ça a été une grave erreur du Parti québécois, puis du Parti libéral d'investir autant d'argent pour aussi peu d'emplois. Je le dis souvent. »
Avec des centaines de millions en Gaspésie, on aurait pu créer bien plus que 200 emplois. On parle de plus d'un million par emploi
, poursuit le premier ministre.
La Coalition avenir Québec (CAQ) s'est toujours opposée au projet de cimenterie à Port-Daniel–Gascons.
Toujours, sauf une fois l'an dernier. Le gouvernement a défendu la décision de la Caisse de dépôt et placement du Québec de réinjecter 150 millions de dollars dans Ciment McInnis en 2019.
Le premier ministre arguait alors que la Caisse de dépôt et placement devait protéger son investissement dans la cimenterie.
François Legault souligne tout de même qu'il aimerait qu'une entreprise québécoise fasse l'acquisition de Ciment McInnis, mais qui soit prête à investir. Le gouvernement du Québec n'ira pas investir tout seul pour commencer
.
Le premier ministre ne craint pas que les emplois à la cimenterie de Port-Daniel–Gascons soient occupés par des étrangers si l'entreprise est vendue à l'international.
Sylvain Roy urge Québec d'intervenir
La perspective que Ciment McInnis puisse passer à des mains étrangères ne fait pas l'affaire du député de Bonaventure, Sylvain Roy, qui demande à François Legault de s'assurer que la cimenterie demeure propriété québécoise.
J'interpelle le bureau du premier ministre directement pour qu'il fasse pression sur la Caisse de dépôt pour bloquer cette transaction
, affirme le député péquiste.
« Le plus gros acheteur de ciment au Québec, c'est l'État québécois, et nous sommes propriétaires à presque 50 % d'une cimenterie. Et on veut s'en départir et donner ça à des Brésiliens? On a un problème sérieux. »
Je trouve ça inadmissible. C'est incompréhensible qu'on se départisse de Ciment McInnis. On n'a aucune idée des transactions qui sont en train de se négocier et j'ai peur que ce soit à perte pour les Québécois
, poursuit M. Roy.
La Caisse de dépôt semble vouloir vendre ses parts, mais faut se rappeler que la Caisse de dépôt n'a pas toujours été un bon citoyen corporatif, donc je demande au gouvernement d'agir et de faire valoir le nationalisme économique, la souveraineté territoriale, dans le contexte où le gouvernement veut accélérer les projets d'infrastructure
, ajoute-t-il.
Le député souligne par ailleurs l'importance de la cimenterie pour la région.
C'est le plus gros projet d'investissement de l'histoire de la Gaspésie, c'est une entreprise qui est sur le point de faire des profits, c'est un ciment d'une très grande qualité, c'est un gisement qui peut durer 100 ans, ce n'est pas une bonne idée de s'en départir
, répète le député.
Une bonne nouvelle pour Port-Daniel
De son côté, le maire de Port-Daniel–Gascons, Henri Grenier, voit les choses différemment.
« Ce que je trouve intéressant, c'est que plus d'une compagnie désire acquérir Ciment McInnis, ce qui signifie que l'entreprise va bien. C'est ça qui est important pour la municipalité. »
Je préférerais que ce soit des intérêts du Québec, mais il ne faut pas oublier que la Gaspésie s'est développée avec des investisseurs étrangers, on peut penser à la Gaspésia et à la mine de Murdochville
, souligne M. Grenier.
Par ailleurs, le maire ne croit pas que les Québécois perdront l'argent investi par la Caisse de dépôt dans la cimenterie.
À ma connaissance, le gouvernement a investi sous forme de prêts, pas de subvention. Alors, j'imagine que peu importe qui sera l'acquéreur, il va sûrement rembourser le gouvernement
, avance-t-il.
Au total, la Caisse de dépôt et placement du Québec et Investissement Québec ont déboursé environ 750 millions de dollars dans ce projet qui a connu d'importants dépassements de coûts. La Caisse refuse de chiffrer son investissement.
En 2018, la Caisse de dépôt avait mandaté une firme pour évaluer tous les scénarios en lien avec sa participation dans la cimenterie. L'agence Bloomberg mentionnait que la vente des actions était l'une de ces options.