Vers la fin de la PCU : une transition de 37 milliards de dollars sur un an

Le site de l’Agence du revenu du Canada et de la Prestation canadienne d'urgence (PCU)
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La Prestation canadienne d’urgence (PCU), qui offre 2000 $ par mois aux Canadiens privés de travail en raison de la pandémie de COVID-19, sera prolongée d’un mois pour un maximum de 28 semaines. Par la suite, le gouvernement du Canada amorcera une transition vers l’assurance-emploi et créera de nouvelles prestations plus ciblées pour les personnes non admissibles au régime.
Le prolongement de la PCU au-delà du 29 août, date d'échéance prévue, coûtera au Trésor fédéral 8 milliards de dollars. Présentement, 4,1 millions de Canadiens bénéficient de ce programme.
À compter du 27 septembre, les critères d’admissibilité à l’assurance-emploi seront temporairement assouplis. Plus ou moins 40 % des personnes sans emploi parviennent généralement à toucher des prestations normales; les autres ne se qualifient pas, parce qu'ils ont un nombre insuffisant d'heures assurables, ont un motif de cessation d'emploi non valable ou sont travailleurs indépendants. Il sera donc possible d'être admis avec aussi peu que 120 heures assurables partout au Canada, alors que présentement entre 420 et 700 heures sont nécessaires, selon la région.
Quelque 400 000 personnes de plus, pour un total d'environ 3 millions, pourront ainsi avoir accès au régime. Le coût de cette mesure est estimé à 7 milliards de dollars pour la prochaine année.
« Nous avons passé trois mois et demi à préparer le système d'assurance-emploi. Il est plus que prêt. »
La prestation minimale sera de 400 $ par semaine et d’une durée de 26 semaines, tandis que la prestation maximale sera de 573 $ par semaine et d’une durée de 45 semaines.
Comme l'avait promis le premier ministre Justin Trudeau, pas question d'augmenter les cotisations à l'assurance-emploi durant cette période difficile; les taux seront gelés pendant deux ans. Grâce à ce gel, a fait savoir la nouvelle ministre fédérale des Finances Chrystia Freeland en conférence de presse jeudi, les travailleurs et employeurs épargneront deux milliards de dollars.
Trois prestations ciblées
Le gouvernement lancera trois nouvelles prestations de relance économique
pour éviter que plus d'un million de travailleurs victimes des contrecoups de la COVID-19 tombent entre les mailles du filet, comme l'a annoncé le premier ministre Justin Trudeau il y a trois semaines. Au total, 22 milliards de dollars sont prévus à cet effet sur un an.
Prestation canadienne de relance économique : les travailleurs indépendants ou qui n’ont pas droit à l’assurance-emploi pourront bénéficier de 400 $ par semaine pendant un maximum de six mois s’ils ne travaillent plus ou ont perdu des revenus par rapport à la période prépandémie.
Prestation canadienne de maladie pour la relance économique : les travailleurs malades ou qui doivent s’isoler en raison de la COVID-19 auront droit à 500 $ par semaine pendant un maximum de deux semaines.
Prestation canadienne de relance économique pour proches aidants : 500 $ par semaine pour un maximum de six mois seront offerts aux ménages qui ne peuvent travailler parce qu’ils s’occupent d’un enfant de moins 12 ans, d’un membre de la famille ou d’une personne à charge en raison d’une fermeture d’école, de garderie ou d’établissement de soins due au coronavirus.
Pour obtenir ces prestations, il faudra avoir obtenu au moins 5000 $ en revenus de travail en 2019, ou dans les 12 derniers mois, et fournir une attestation en ligne selon laquelle la personne a cessé de travailler ou subi une perte de revenus à cause de la pandémie.
Pour éviter la fraude, la ministre de l’Emploi Carla Qualtrough a indiqué que les personnes seront suivies de plus près et qu'il y aura des mesures d'intégrité
au sein du système, tout en disant croire dans l'honnêteté des Canadiens
.
Des changements permanents?
Le gouvernement Trudeau veut ainsi éliminer les failles dans le programme de la PCU, qui a été créé dans l'urgence, en trouvant des incitatifs pour que les Canadiens retournent au travail tout en demeurant juste pour les plus vulnérables, et profiter de l'occasion pour jeter les bases d'une réforme du régime d'assurance-emploi.
« On a choisi une période de [transition] d'une année parce que nous savons que les Canadiens méritent plus de certitude dans leur vie. »
Les changements deviendront-ils permanents une fois l'année de transition achevée? Il est trop tôt pour le dire, a déclaré Mme Qualtrough. La réponse honnête est que nous allons observer ce nouveau système, mais nous savons que des groupes de défense [des chômeurs] ont déjà demandé par le passé des changements similaires à ceux que nous venons d'instaurer temporairement.
C'est un véritable "plan Marshall social", a réagi le porte-parole du Conseil national des chômeurs et chômeuses, Pierre Céré, en référence au plan d'aide américain de reconstruction de l'Europe après la Seconde Guerre mondiale. [...] Le plan répond à beaucoup d'attentes des différentes catégories de travailleurs et travailleuses auparavant oubliés par l'assurance-emploi.
À la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, le vice-président pour le Québec, François Vincent, craint qu'avec des critères si bas pour bénéficier du programme, cela pourrait décourager de nombreux travailleurs de reprendre le travail qu'ils occupaient
. Les employeurs ne se réjouissent pas, en plus, d'une promesse d'aide aussi longue. La Subvention salariale d'urgence prendra fin, rappelons-le, en décembre.
Une réforme qui nécessite un projet de loi
Quelques jours après l'assouplissement des critères de l'assurance-emploi et l'instauration des trois prestations ciblées, la PCU prendra fin. Le gouvernement n’aura donc que quelques jours pour déployer son programme, ce qui mettra de la pression sur les partis d’opposition. Nous travaillons très fort avec les membres des autres partis
, a assuré la ministre Qualtrough.
La nouvelle session parlementaire s'ouvrira par ailleurs le 23 septembre par un discours du Trône, ce qui entraînera nécessairement un vote de confiance à l'égard du gouvernement, qui est minoritaire aux Communes. S'il devait être défait, des élections seraient vraisemblablement déclenchées.
De passage à New Carlisle jeudi matin, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a dénoncé de nouveau le fait que le gouvernement n'a pas encore modifié le programme de la PCU pour favoriser le retour en emploi
de ses prestataires.
Le Québec et les régions du Québec subissent une crise de main-d’œuvre majeure parce que ce programme n'a pas été modifié et modulé par un gouvernement qui était occupé à gérer ses crises et son scandale financier
, a-t-il déploré.
Quelque 8,61 millions de Canadiens ont présenté une demande de PCU depuis que le programme a été instauré le printemps dernier, au cœur de la crise de la COVID-19. Ils se sont partagés près de 69,37 milliards de dollars.
Avec la collaboration de François Messier