Des « tunnels sanguins » microscopiques observés dans l’œil

La rétine est une fine membrane composée de cellules sensibles à la lumière et située au fond du globe oculaire.
Photo : iStock
Un mécanisme de redistribution du sang dans la rétine a été mis au jour par des chercheurs du Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CRCHUM).
Ce mécanisme régule l’apport sanguin indispensable à la vision.
Pour la première fois, nous avons identifié une structure de communication entre cellules qui est indispensable pour coordonner l’apport sanguin dans la rétine
, affirme la Pre Adriana Di Polo (Nouvelle fenêtre) dans un communiqué.
Rétine 101
- La rétine est une fine membrane composée de cellules sensibles à la lumière (des photorécepteurs), et de vaisseaux sanguins qui les nourrissent.
- Elle est située au fond du globe oculaire.
- La partie la plus sensible de la rétine est une petite zone appelée macula. Celle-ci contient de millions de photorécepteurs très concentrés connus sous le nom de cônes. La densité des cônes dans chaque macula permet à une image visuelle d’être détaillée, à l’image d’un appareil-photo à haute résolution.
La découverte
« Nous savions déjà que les zones activées de la rétine reçoivent plus de sang que les zones non activées. Mais jusqu’à maintenant, personne ne comprenait comment cet apport sanguin était finement régulé. »
Il faut savoir que la rétine utilise l’oxygène et les nutriments contenus dans le sang pour fonctionner. Ces échanges se déroulent à travers des capillaires, qui sont les vaisseaux sanguins les plus fins du corps humain.
Or, quand l’apport sanguin est très réduit ou interrompu, la rétine ne reçoit plus l’oxygène dont elle a besoin pour vivre, si bien que les cellules commencent à mourir et la rétine cesse de fonctionner comme elle devrait. La vision se trouve alors perturbée.
Les problèmes liés à la rétine
- Le décollement de la rétine à la suite d’un traumatisme, d’une chirurgie ou d’une dégénérescence;
- la dégénérescence maculaire liée à l'âge, un vieillissement prématuré de la rétine qui se traduit par une perte de vision centrale;
- la rétinopathie diabétique, conséquence du diabète et l'une des premières causes de cécité;
- les troubles de la vision causés par une ischémie (diminution de l'apport sanguin artériel) ou un accident vasculaire cérébral.
Des tunnels microscopiques
Des cellules (les péricytes) enveloppent les capillaires et contrôlent la quantité de sang qui y circule simplement en exerçant ou en relâchant leur pression autour de ces petits vaisseaux sanguins.
Grâce à une technique microscopique permettant de visualiser les changements vasculaires sur des souris vivantes, nous avons pu montrer que les péricytes projettent des tubes très fins, appelés nanotubes à effet tunnel interpéricytaires, pour communiquer avec d’autres péricytes situés sur des capillaires éloignés
, explique Luis Alarcon-Martinez, qui travaille au laboratoire de la Pre Di Polo et qui est l’un des deux auteurs principaux de ses travaux avec sa collègue Deborah Villafranca-Baughman.
« Les péricytes peuvent se parler grâce à ces nanotubes et apporter le sang là où il est le plus nécessaire. »
Un rôle central
Deborah Villafranca-Baughman ajoute que « les capillaires perdent leurs capacités à transporter le sang là où il le faut quand les nanotubes à effet tunnel sont endommagés, par exemple après un accident vasculaire cérébral ischémique.
L’absence d’apport sanguin qui suit a un effet délétère sur les neurones et les fonctions tissulaires en général
, poursuit la chercheuse.
Cette découverte laisse donc à penser que les déficits microvasculaires observés dans les maladies neurodégénératives telles que les AVC, le glaucome et même la maladie d’Alzheimer pourraient résulter de la perte de nanotubes à effet tunnel et d’une perturbation de la distribution du sang.
Il reste aux chercheurs à démontrer que la protection de ces nanostructures est bénéfique pour traiter les maladies liées à la rétine.
Ces travaux menés sur des souris sont publiés dans la revue Nature (Nouvelle fenêtre) (en anglais).
Les problèmes liés à l’âge
Une autre équipe du CRCHUM a mis au jour le rôle de protéines responsables de la réparation de l’ADN dans l’atténuation d’une réponse inflammatoire des cellules vieillissantes, aussi appelées cellules sénescentes, qui s’accumulent avec l’âge.
Les chercheurs estiment que cette fonction permet de distinguer une cellule légèrement endommagée d’une cellule très malade ou vieillissante. Cette capacité pourrait permettre de réduire la réponse inflammatoire au moment opportun et ainsi d'améliorer le traitement des maladies associées au vieillissement.
Le détail de ces travaux est publié dans les EMBO Reports (Nouvelle fenêtre) (en anglais).