Créer une économie circulaire avec les déchets de l’industrie de la pêche

Les casiers de crabes des neiges « fantômes » peuvent représenter un danger pour la faune marine.
Photo : CBC / Courtoisie de Liam Shea
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Des milliers d'engins de pêche perdus ou abandonnés en mer peuvent passer des décennies ou même des siècles sous l’eau, portant atteinte à l’écosystème marin et à sa biodiversité. Le centre de recherche Merinov compte non seulement s'y attaquer, mais il souhaite aussi en faire profiter les pêcheurs.
Le centre d'innovation de l'aquaculture et des pêches du Québec, Merinov, implanté en Gaspésie, aux Îles-de-la-Madeleine et sur la Côte-Nord, recevra 350 000 $ pour revaloriser les engins de pêche et ainsi éviter qu'ils ne finissent à l'enfouissement ou dans le golfe du Saint-Laurent.
Le centre fait partie des 26 organismes au Canada et à l'étranger qui vont se partager un investissement de 8,3 millions de dollars de Pêches et Océans Canada pour débarrasser les eaux des engins de pêche perdus ou abandonnés, appelés aussi engins fantômes
.
Quatre organismes de l'Est-du-Québec font partie de ces 26 bénéficiaires :
- L'Association des capitaines propriétaires de la Gaspésie (ACPG)
- Les Cultures du Large inc.
- Merinov
- Le Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie
Le projet de revalorisation mené par Merinov concerne principalement les casiers de crabe des neiges qui gisent au fond du golfe du Saint-Laurent, qu'ils aient été oubliés, perdus ou abandonnés, mais aussi tous les engins de pêche en fin de vie utile et qui restent dans les cours arrières, sur des ponts, et dont les pêcheurs ne savent pas quoi faire
, explique Stéphanie-Carole Pieddesaux, chargée de projet et chercheuse industrielle à Merinov.
« L’idée est de récupérer tous ces engins et voir comment on peut les valoriser. »
Merinov envisage plusieurs pistes de valorisation pour ces engins de pêche. La première serait de déterminer quels plastiques peuvent être réutilisés et surtout, à quel coût.
Pour les plastiques qui ne peuvent être réutilisés, l'option envisagée serait de transformer ces plastiques en carburant pour bateau, et éviter ainsi qu'ils ne deviennent des déchets et ne finissent à l’enfouissement.
L’idée serait de voir comment on peut récupérer le plus d’engins possible et faire en sorte que la revalorisation revienne ensuite aux pêcheurs
, explique la chercheuse. Le pêcheur pourrait alors récupérer une certaine valeur grâce à la valorisation des engins de pêche.
L'objectif serait alors de créer une sorte d’économie circulaire
avec les anciens engins de pêche.
Les fantômes de l’océan
Merinov mène aussi plusieurs projets qui visent à faire la chasse aux engins de pêche fantômes. L'organisme tente surtout de retrouver les casiers de crabe des neiges.
Si on prend le crabe des neiges, on estime qu’il y a 1000 casiers qui sont perdus par année durant la saison de pêche dans l’ensemble du golfe du Saint-Laurent
, note Stéphanie-Carole Pieddesaux.
« Ces casiers s’empilent d’année en année, car il n’y a jamais de grand ménage qui a pu être fait. »
Tant le casier que le cordage vertical, qui demeure dans la colonne d’eau et qui relie le casier à la surface, à une centaine de mètres plus haut, peuvent représenter un danger pour les baleines, les tortues et les requins, qui risquent de s’y empêtrer.
Trouver le casier et le repêcher
Pour pouvoir mettre en place ce circuit court imaginé par Stéphanie-Carole Pieddesaux, encore faut-il pouvoir récupérer ces engins de pêche fantômes, qui restent à des profondeurs variant de 80 à 150 mètres.
Pour cela, Merinov développe depuis 2019 une méthode de détection des casiers – parce qu’il faut déjà savoir où ils sont avant d’aller les chercher
.
En parallèle, Merinov développe aussi une technique de récupération qui se veut plus efficace que celle qui consiste à faire descendre un grapin au fond de l’océan, méthode dont les résultats sont plus qu’hasardeux : C’est très difficile de tomber sur le casier en question quand il gît au fond de l’océan
, explique la chercheuse.
L’organisme se donne deux ans pour développer ces techniques et lancera en 2022 sa campagne de pêche aux casiers fantômes. Il évaluera ensuite si les méthodes que ses équipes ont développées sont effectivement efficaces.