Manger local en Mauricie et au Centre-du-Québec : un défi de taille
Est-ce facile de manger local dans notre région?
Photo : Radio-Canada / Pascale Langlois
Je me suis lancé un défi : avoir un panier d’épicerie 100 % local pour une famille de quatre en respectant un budget de 150 $ par semaine. Sitôt dit, sitôt une question apparaît : qu’est-ce que c’est manger local? Est-ce que le homard des Îles-de-la-Madeleine est un aliment local pour moi qui habite le Centre-du-Québec? La définition de ce manger local
était déjà le premier obstacle de ce défi.
Un texte de Pascale Langlois
Tout de suite, j’ai voulu parler avec la nutritionniste Julie Aubé, auteure de plusieurs livres sur l’alimentation locale, pour éclaircir la question. Elle ne parle pas de distance ou d’adresse de provenance. Elle me parle de manger près
. En gros, entre deux aliments, mieux vaut choisir celui produit le plus près de chez soi. Julie Aubé insiste pour exclure la (ma) culpabilité.
100 % local est-ce vraiment nécessaire? Ma réponse est non. Ce n’est pas le but. Parce qu’il y a des produits qui ne poussent pas ici. Moi, j’aime ça commencer ma journée avec un bon café. Ça ne pousse pas ici du café.
Je peux donc continuer d’acheter du café et des agrumes pour les cocktails. Quel soulagement!
Les statistiques qui sont accessibles, ce serait environ un tiers des aliments qui remplissent nos paniers qui proviennent réellement du Québec. Entre un tiers et 100 %, on a une marge de manœuvre pour mettre un peu plus de proximité au menu. Sans en faire un dogme et surtout sans en faire un objet de culpabilité.
En regardant de près ma liste d’épicerie avant de commencer le défi, je dois dire que je me situe bien dans cette proportion de 30 % dont parle Julie Aubé. Même en portant une attention particulière à la provenance de mes aliments à l’épicerie. Et pour plusieurs produits d’ici, je n’en connais pas la provenance exacte, comme les œufs ou les pommes. Je dois trouver d’autres stratégies, d’autres fournisseurs que le supermarché.
Mon panier de légumes bios hebdomadaire fait augmenter significativement la proportion de mes dépenses locales dès la deuxième semaine.
Pourquoi m’infliger un tel défi?
C’est d’abord pour diminuer mon empreinte écologique. La même raison pour laquelle nous mangeons très rarement de la viande. Aussi parce que devant les reportages fréquents sur la hausse du prix de l’épicerie, je veux pouvoir m’assurer de garder un certain contrôle sur cette partie du budget.
Finalement, parce que je me rends compte qu’une partie de l’année, quand les légumes frais se font rares et chers à l’épicerie, l’équilibre est moins présent dans l’assiette de ma famille. Et puis dans la contrainte naît la créativité!
Proximité?
Mes nombreuses recherches pour trouver les différents aliments de ma liste d’épicerie me découragent un peu. Les déplacements nécessaires sont nombreux, c’est tout un casse-tête pour trouver le temps de faire ces quatre ou cinq arrêts par semaine.
Les marchés locaux répondent à une partie du besoin pendant quelques mois de l’année. J’ai aussi trouvé des options de livraison comme le site Maturin.ca (Nouvelle fenêtre), pour des produits provenant du territoire québécois, ou encore l’entreprise Panier local Nicolet-Bécancour-Yamaska (Nouvelle fenêtre). Ce dernier est né, en plein cœur de la pandémie, du désir d’aider les producteurs à trouver des clients pour leurs produits. C’est le local pour le local
me dit le cofondateur Philippe Dumas.
L’autre cerveau de l’affaire, Frédérik Roy, ajoute que dans le coeur du Québec, les MRC de Bécancour, Nicolet et Yamaska, on a plein de producteurs qui sont variés. Ça nous permet de faire une épicerie presque complète. Le problème, c’est qu’ils sont dispersés sur 100 kilomètres de territoire.
La jeune pousse vient répondre aussi à une problématique bien réelle dans de nombreux villages : les déserts alimentaires. Julie Pressé, la mairesse de Fortierville, dans le Centre-du-Québec, rêve d’un camion distribuant des légumes comme dans le temps
.
Pour assurer une certaine autonomie alimentaire, elle a démarré un jardin communautaire afin d’apprendre à ses concitoyens, et à elle même, avoue-t-elle, comment produire sa propre nourriture.
Je trouve qu’il faudrait faire autrement. Au lieu de justement toujours valoriser le fait d’aller faire notre épicerie dans une grande épicerie. Moi je rêve du jour où on va arrêter d’emmener les gens dans les grandes épiceries et qu’on va apporter la nourriture aux gens.
À cela, Julie Aubé ajoute qu’il faut peut-être revenir à un mode où c’est normal d’accorder un peu plus de temps à son approvisionnement. C’est un investissement qui peut être raisonnable et qui peut être rempli de sens.
Je vais donc prendre ce temps, découvrir la variété et l’abondance des produits offerts près de chez moi et remplir mon assiette, 12 mois par année, de produits de ma région.
Vous relevez le défi aussi?