Saisir une page d’histoire sur la Black Lives Matter Plaza

Le reportage de notre envoyé spécial, Louis Blouin.
Photo : Radio-Canada / Louis Blouin
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
En pleine mobilisation contre la violence policière et les inégalités raciales aux États-Unis, de grands musées de Washington joignent leurs efforts pour documenter ce moment historique. Leur cueillette commence à quelques pas de la Maison-Blanche.
Ma peau n’est pas une arme
. Combien n’ont pas été filmés?
. Je ne peux pas respirer
. Des centaines d’affiches posées sur une grande murale forment une véritable exposition à ciel ouvert près du parc Lafayette, à un jet de pierre de la Maison-Blanche.
À cet endroit, que la Ville vient de renommer Black Lives Matter Plaza, des citoyens de toutes les origines viennent lire, se recueillir, réfléchir. Devant leurs yeux, des mots témoignent de la colère, de la soif de changement, racontant des drames qui se répètent.
Vanessa Jones, une jeune femme afro-américaine, ne peut pas retenir ses larmes.
Pourquoi sommes-nous ici? Pourquoi les gens doivent-ils se battre pour l’égalité raciale en 2020? Ça n’a aucun sens. Je suis enragée.
La colère peut aussi se sentir dans la voix de Beverly Kumari. Tous les mots comptent ici. Ils proviennent de gens de groupes ethniques différents, de leur cœur et de leur esprit. Ils disent que c’est assez
, explique-t-elle.
Beverly traîne avec elle son appareil photo pour documenter le moment. Elle n’est pas la seule.

Pour les militants du mouvement Black Lives Matter, le président Donald Trump incarne le racisme et la discrimination systémiques envers les Noirs.
Photo : Radio-Canada / Louis Blouin
Des musées se mobilisent
Ce moment représente une transformation importante dans l’histoire de notre nation
, affirme Aaron Bryant, conservateur au Musée national de l’histoire et de la culture afro-américaines.
Son institution, le Musée national d'histoire américaine, et le Musée d'Anacostia à Washington ont décidé de s’unir pour capter sur le vif ce chapitre qui est en train de s’écrire.
Des photographes ont été déployés dans les rues de Washington, des témoignages seront recueillis et des objets récupérés près du parc Lafayette.
Des affiches, des t-shirts, des chapeaux, des épinglettes, des masques, tout objet qui peut nous aider à raconter ce moment
, illustre Aaron Bryant.
Nous voulons aider à préserver ces voix et ces expériences et les faire passer de la marge vers le centre de cette discussion nationale.
Aucun projet d’exposition n’est prévu pour le moment, il s’agit pour l'instant d’une opération de cueillette. Cela permettra aux chercheurs, dans 50 ou 100 ans, de recréer ce moment
, déclare M. Bryant.
La démarche est bien accueillie sur la « Black Lives Matter Plaza ». Chaque révolution doit être documentée
, affirme Vanessa Jones, établissant un parallèle avec le mouvement des droits civiques aux États-Unis dans les années 1960.
Il faut capter cela en temps réel, pendant que cela survient
, affirme une autre passante, Diatra Jones.
Ce mouvement marquera-t-il le tournant tant attendu au sein de la communauté afro-américaine?
Le monde nous écoute et nous voulons être remarqués, nous voulons compter
, affirme la militante Kennan Cooley.
Dans les rues de la capitale américaine, les cris des manifestants continuent de se faire entendre et les foules continuent de défiler presque quotidiennement.
Cette lutte sera terminée seulement quand nous aurons obtenu l’égalité et la justice raciales
, s’exclame Beverly Kumari.
Sur la Black Lives Matter Plaza, nombreux sont ceux qui espèrent que les messages exprimés aujourd’hui s’imprimeront dans la mémoire collective et feront avancer ce combat vers l’égalité.