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COVID-19 : un rapport accablant sur la situation des travailleurs agricoles étrangers

Des travailleurs migrants récoltent du blé d'Inde.

Au moins 187 travailleurs agricoles migrants sont tombés malades de la COVID-19 dans le Sud-Ouest de l'Ontario.

Photo : CBC/Maggie MacPherson

  • Nicolas Haddad

Un groupe représentant les travailleurs migrants au Canada dénonce des conditions de travail inhumaines et dangereuses et réclame une meilleure protection après la mort de deux travailleurs saisonniers en lien avec la COVID-19 et des centaines d'infections signalées.

Manque de nourriture, d’eau chaude, de repos et d'équipement de protection individuelle : la liste des mauvais traitements signalés par la Migrant Workers Alliance for Change (MWAC) est longue.

Dans un rapport publié lundi, la coalition canadienne dresse un portrait pitoyable des conditions de vie et de travail dans les exploitations agricoles qui emploient quelque 60 000 travailleurs étrangers au pays.

Le document publié lundi fait état d’une gamme de mauvais traitements, dont du racisme, la surcharge de travail et le vol de salaires.

Le directeur général de la Migrant Workers Alliance for Change (MWAC), Syed Hussan, décrit les conditions de vie dans une ferme touchée par une éclosion de COVID-19 : quarante travailleurs étaient logés dans un seul dortoir avec une seule douche entre eux, dans les fermes Scotlynn.

COVID-19 : tout sur la pandémie

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Une représentation du coronavirus.

Au moins 164 travailleurs des fermes Scotlynn du comté de Norfolk ont reçu un diagnostic positif après avoir subi un test de dépistage de la COVID-19, selon les autorités locales de santé publique.

Photo d'un contrat.

Selon la Migrant Workers Alliance for Change, une ferme de pêches et de raisins à Niagara a demandé à ses employés de signer un contrat qui stipulait que le salaire versé pendant la période de quarantaine était un prêt qui devait être remboursé.

Photo : Avec l'autorisation de Migrant Workers Alliance for Change

Un quart des travailleurs sondés par la MWAC affirment ne pas avoir été payés pendant leur période de quarantaine.

Or, selon les lignes directrices établies par le gouvernement fédéral pour les employeurs de travailleurs étrangers temporaires concernant la COVID-19, l’employeur doit les payer pour au moins 30 heures par semaine au taux de salaire horaire précisé [...] dans l’offre d’emploi pendant la période de quarantaine.

Des conditions inhumaines et dangereuses

Directement ou par le biais d'un collègue, 1162 travailleurs ont témoigné de leur expérience.

Selon la MWAC, les 180 travailleurs agricoles étrangers qui ont offert leur témoignage parlaient aussi au nom de 982 collègues qui avaient difficilement accès à des téléphones ou à Internet.

Parmi eux, 873 sont des travailleurs des Caraïbes, 289 viennent de pays hispanophones et 120 sont des femmes.

Une chambre à coucher insalubre avec quatre lits.

Des centaines de travailleurs agricoles étrangers ont dénoncé des logements insalubres et qui ne permettent pas la distanciation sociale.

Photo : Avec l'autorisation de Migrant Workers Alliance for Change

Neuf travailleurs signalent avoir été logés dans une maison où vivaient des chiens avant leur arrivée. Leur logement sentait l'urine de chien et n'avait pas été nettoyé avant l'arrivée des travailleurs, peut-on lire dans le document.

Un autre groupe de travailleurs a indiqué qu’aucun sèche-linge ou machine à laver n’avait été fourni et qu’ils n’avaient pas reçu d’argent de l’employeur pour les frais de blanchisserie comme l’exige le Programme des travailleurs agricoles saisonniers.

Un travailleur agricole dans un champ, le visage flouté.

Des travailleurs cités dans le rapport de la MWAC indiquent qu'ils ne dorment que lorsqu'il pleut, car le retard dans l'arrivée des travailleurs a fait en sorte qu'ils doivent mettre les bouchées doubles pour que leurs employeurs puissent générer un profit.

Photo : Avec l'autorisation de Migrant Workers Alliance for Change

Au moins la moitié des répondants ont affirmé avoir eu un manque d’accès à la nourriture. Certains disent avoir été obligés de se rendre en ville pour s’en procurer, alors qu’ils n’avaient pas terminé leur période de confinement.

Dans une ferme de pêches et de raisins dans la région du Niagara, 16 travailleurs ont déclaré n’avoir reçu qu'une seule miche de pain et une boîte d'œufs pour nourrir le groupe pendant deux jours.

Une autre exploitation agricole du Niagara, un vignoble, n'aurait fourni que deux petits sacs de tortillas et un carton d'œufs pour nourrir 20 travailleurs, indique le rapport.

Les travailleurs agricoles saisonniers veulent la résidence permanente

Selon Syed Hussan, les travailleurs agricoles venus de l'étranger hésitent à refuser des conditions de travail inacceptables parce qu'ils dépendent de leur employeur pour conserver leur statut de travail au Canada.

Les gens sont piégés.

Une citation de Syed Hussan, directeur général, Migrant Workers Alliance for Change.

Ils sont dans une situation où ils tombent malades, mais ils ne peuvent rien faire parce qu’ils risquent d'être licenciés, de devenir sans-abri, d’être expulsés du Canada et de ne pas pouvoir revenir dans ce pays à l'avenir, soutient le directeur général de l’organisme.

MWAC réclame le statut de résident permanent pour les travailleurs migrants au Canada, sans lequel ils ne peuvent pas faire valoir leurs droits, estime M. Hussan.

Des mains.

Plusieurs travailleurs en provenance des Caraïbes ont dénoncé les comportements racistes de leur employeur. Les travailleurs étrangers cités dans le rapport de la MWAC disent être souvent placés sous surveillance et menacés de se faire expulser.

Photo : Avec l'autorisation de Migrant Workers Alliance for Change

Vendredi dernier, un deuxième travailleur mexicain, âgé de 24 ans, est mort des suites de la COVID-19 dans la région de Windsor-Essex, dans le Sud-Ouest de l'Ontario. Selon M. Hussan, ce n'est pas une tragédie inévitable. C’est le résultat direct des lois fédérales et provinciales sur l'immigration.

Les travailleurs agricoles temporaires viennent au Canada depuis 53 ans, insiste-t-il en ajoutant que c'est un besoin permanent, et cela nécessite une solution permanente, en l’occurrence le statut de résident permanent.

Le ministère de l'Immigration du Canada a été contacté à ce sujet, mais n'a pas encore donné suite à la requête de Radio-Canada.

  • Nicolas Haddad

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