Comprendre le déclin d’une mal-aimée : un projet de recherche sur l’anguille

Il se prenait 250 tonnes d'anguilles entre Québec et Rimouski en 1985. Au début des années 2000, les pêcheurs devaient se contenter de 70 tonnes (archives).
Photo : Radio-Canada/Découverte
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Elle n’est pas très belle. Elle peut même faire peur. Mais il fut un temps où l’anguille d’Amérique était très prisée. Pourquoi a-t-elle perdu de son lustre?
Un projet de recherche, mené par le professeur à l'Institut des sciences de la mer de l'Université du Québec à Rimouski (ISMER-UQAR) David Deslauriers, se penchera sur la question, ainsi que sur les raisons du déclin de l’espèce dans les dernières années.
Malgré le rachat de la majorité des permis de pêche à la fin des années 2000 par le gouvernement québécois pour refaire les stocks, la population d’anguille peine à remonter.
C’est un poisson qui a été au centre d’une importante activité économique sur le Saint-Laurent. Et même culturellement, avant l’exploitation, c’était important pour les peuples autochtones.
Ce n'est pas seulement la pêche qui a eu de l'impact, mais c'est le changement de l'environnement de cette anguille-là, qui a besoin des aires en eau douce dans les rivières pour favoriser son développement. Et la plupart de ces rivières-là ont des barrages hydroélectriques, par exemple, ou ont été affectées de d'autres manières. Ça affecte les jeunes anguilles
, explique David Deslauriers.

Les pêcheurs commerciaux d'anguille sont de moins en moins nombreux le long du Saint-Laurent.
Photo : CBC/Pat Martel
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L’équipe de David Deslauriers, composée de chercheurs de l’UQAR, de l’UQAC et de l’Université Laval, déclinera la recherche en trois volets. Elle tentera d'abord de comprendre les effets des conditions environnementales sur la croissance de l’anguille d’Amérique, puis les répercussions du déclin de l'espèce dans la culture québécoise.
Finalement, les connaissances recueillies pendant la recherche seront mises en valeur par le biais d'un kiosque vivant à l'Aquarium du Québec.
Pour ce faire, des anguilles vivantes seront capturées en nature par des engins de pêche déjà en fonction. Des partenariats ont ainsi été créés avec l’Aquarium du Québec, le ministère de la Faune, de la Forêt et des Parcs (MFFP) et une entreprise de pêche commerciale à Rivière-Ouelle.

Dispositif pour la pêche traditionnelle à l'anguille
Photo : Gracieuseté Musée québécois de l'agriculture et de l'alimentation
David Deslauriers souligne que l’engin de pêche de l’Aquarium du Québec sera particulièrement précieux pour les recherches, puisqu’il recueille des données depuis les années 1970.
On espère développer un modèle bioénergétique pour l’anguille. Ça va nous permettre de comprendre l’énergie qui est nécessaire à l’anguille pour assurer sa survie
, ajoute David Deslauriers.
Pour l'instant, la pandémie de COVID-19 ne bouleverse pas le calendrier du projet de recherche, puisque l'échantillonnage concordera avec la migration des anguilles adultes, qui a habituellement lieu entre la fin du mois de juillet et le mois d'octobre.
Le projet bénéficie d'une enveloppe de 200 000 $ sur deux ans, grâce au programme Odyssée Saint-Laurent du Réseau Québec maritime. Pour sa troisième vague, le programme soutient un total de neuf projets liés au système Saint-Laurent, pour un investissement total de près de 1,9 million de dollars.
Le système Saint-Laurent implique la voie maritime, fluviale. Donc on peut avoir des projets qui se déroulent à Montréal sur le fleuve Saint-Laurent, jusque dans le golfe
, souligne Erwann Fraboulet, responsable du programme de recherche Odyssée Saint-Laurent.