Des milliers de Québécois ont manifesté dans le calme dimanche
Une poignée de manifestants et des policiers de l'escouade antiémeute sont toutefois restés au centre-ville de Montréal après la fin de la marche.
Le reportage de Jacaudrey Charbonneau.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Pour un deuxième dimanche de suite, des milliers de Québécois ont manifesté pour sensibiliser les politiciens à l'urgence d'agir face au racisme. Ils ont marché dans les rues de Montréal, Québec et Sherbrooke, entre autres.
Depuis des années, on n'entend que des paroles, mais les gestes n'ont pas été posés
, a souligné l'ancien boxeur Ali Nestor, fondateur de l'organisme Ali et les Prince.sse.s de la rue.
Un avis partagé par David Heurtel, ancien ministre de l'Immigration dans le gouvernement Couillard, qui participait lui aussi à la manifestation de Montréal. On a eu assez de commissions, de consultations, de comités, il faut passer à des gestes concrets
, a-t-il déclaré au micro de Radio-Canada.
Au cœur de la marche, on entendait notamment des gens crier Black Lives Matter
et l'union fait la force
. Certains autres manifestants scandaient également les noms des personnes mortes pendant des interventions policières du service de police de Montréal (SPVM), comme Nicholas Gibbs, un père de trois enfants abattu par des policiers du SPVM en août 2018.
Les manifestants souhaitaient expliquer à tout le monde que le racisme existe aussi au Québec et qu'il ne s'agit pas que d'une affaire américaine.
Quand est-ce qu’on a signé ce contrat social qui dit que les Noirs, on doit être pauvres et les Blancs doivent être riches? Si on a signé un tel contrat, il faut le resigner pour que tous soient égaux
, se demandait une manifestante marchant sur le boulevard Saint-Laurent.
« Je ne peux pas respirer. »
— Sébastien Desrosiers (@s_desrosiers) June 7, 2020
« Ici aussi : racisme systémique. »
Quelques unes des images de cette manifestation contre le racisme à Montréal. pic.twitter.com/GmFlFSiHV5
Le racisme, c’est plus que juste tuer des Noirs. Il y a tellement d’autres choses qu’on doit changer. Le racisme est encore là. Ça n’a jamais disparu
, racontait un jeune homme dans la foule.
Je suis ici pour que mes enfants n'aient jamais à venir marcher ici
, expliquait une autre jeune femme.
La marche pacifique a fait de nombreux arrêts pour inviter les manifestants à mettre un genou au sol à la mémoire de George Floyd, cet Afro-Américain dont la mort lors d'une intervention policière à Minneapolis a soulevé la colère.
Une fois la manifestation terminée, un petit groupe de manifestants a tenté de se rendre au pied des bureaux du SPVM
avant d'être bloqué par l'escouade antiémeute.Un autre groupe s'est allongé au milieu de l'avenue du Parc, au niveau du parc Jeanne-Mance, pour rendre hommage à George Floyd.
Vers 18 h, le groupe du centre-ville s'est regroupé autour du palais de justice après avoir reçu des renforts. Certains des manifestants ont alors tenté de pénétrer à l'intérieur de l'autoroute Ville-Marie, ce qui a poussé les forces de l'ordre à intervenir à coups de gaz lacrymogènes, dispersant les manifestants vers le Vieux-Montréal. Les escarmouches auront duré moins d'une heure. Le bilan de la police, en fin de soirée, fait état d'une arrestation pour menaces de mort.
« Plus jamais »
En matinée, le cortège principal s'était formé à la place Émilie-Gamelin pour entendre le récit de victimes d'abus policiers, mais également les discours de représentants de divers organismes communautaires et politiques.
Les organisateurs de l'événement ont d'ailleurs fustigé les propos du premier ministre François Legault selon lesquels il n’y a pas de racisme systémique au Québec. Selon eux, sa définition du racisme systémique est erronée.
Plus jamais, c’est ce qu’on a envie de se dire. Mais pour en être convaincu, il faut qu’il y ait des gestes concrets. Chaque fois qu’un d’entre nous tombe, c’est toute la société qui devrait se sentir concernée
D'autres députés du PLQ ont assisté à la manifestation de Montréal. La ministre fédérale du Développement économique et des Langues officielles, Mélanie Joly, était également présente. La députée de Québec solidaire,Ruba Ghazal était aussi de la partie.
D'abord invité à l'événement vendredi, le directeur du Service de police de la Ville de Montréal, Sylvain Caron, n’est finalement pas allé à la manifestation contre la brutalité policière et le racisme. Les organisateurs ont retiré leur invitation hier matin.
Pour le coordonnateur de la Ligue des Noirs nouvelle génération, Pharaoh Hamid Freeman, il était important que l'attention du public demeure sur les enjeux de la marche et non sur ses participants.
Suite des manifestations d'hier au pays
Après Trois-Rivières, Toronto, Calgary, London et Guelph hier, d'importantes manifestations contre le racisme ont également eu lieu dimanche à Québec, Sherbrooke et Mississauga. Dans cette dernière, des manifestants ont demandé que les policiers soient équipés de caméras corporelles pour éviter les dérapages.
Des centaines de manifestants ont aussi défilé au Yukon pour protester contre le racisme à l'encontre des Noirs et des Autochtones.
Une manifestation s’est également tenue dans l'est du pays à Saint-Jean, à Terre-Neuve-et-Labrador.
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Avec les informations de Sébastien Desrosiers, Jacaudrey Charbonneau, Fannie Bussières-McNicoll et Mélissa François.