Au moins deux chauffeurs de taxi de l'aéroport Montréal-Trudeau morts de la COVID-19

Le chauffeur de taxi Sergo Charles dit connaître quatre chauffeurs qui ont succombé à la COVID-19.
Photo : Radio-Canada / Danny Braun
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Au moins deux chauffeurs de taxi desservant l'aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal sont morts de la COVID-19, affirme le Regroupement des propriétaires de taxi de Montréal.
Officiellement, il y a eu deux décès à cause de la COVID-19, un chauffeur d’origine libanaise et un autre, [d'origine] haïtienne
, relate le secrétaire-trésorier de l'organisation, Edgard el-Kalaani. Au moins une vingtaine de chauffeurs ont été infectés.
« L’aéroport était la porte d’entrée des gens qui arrivaient au pays en étant porteurs du virus. On n’était pas préparés à ça. »
Les chauffeurs de taxi – en particulier ceux qui desservent l’aéroport Trudeau – sont très à risque de contracter la COVID-19. Même s’il n’y a plus beaucoup de voyageurs à l’aéroport, une quarantaine de vols arrivent et partent chaque jour, dont des vols internationaux vers les États-Unis et l’Europe.
En mars dernier, il y a eu énormément de trafic aérien à cause des rapatriements de Canadiens qui revenaient au pays. Au total, 921 000 départs et arrivées ont été enregistrés. Plus de deux voyageurs sur trois allaient à l'étranger ou en provenaient.
Devant les embarcadères de l’aéroport, une vingtaine de taxis font la file en attente d’un vol qui provient de Paris. Quelques chauffeurs font la sieste sur le siège arrière réservé aux passagers. Pour le moment, les clients sont absents.
« Moi, je connais au moins quatre chauffeurs qui sont décédés. Je suis allé à des funérailles il y a quelques jours. Il y a plusieurs chauffeurs qui ont décidé de ne plus venir travailler. »
L’aéroport de Montréal est réservé à 445 chauffeurs de taxi et de limousine qui signent un contrat annuel avec les autorités aéroportuaires.
Ils ne peuvent prendre que des passagers qui arrivent à l’aéroport ou qui le quittent, et doivent absolument être en attente sur place s’ils veulent prendre un client. Même pour une course quotidienne qui ne rapporte que 20 $ à la fin de la journée.
Une quarantaine facile à contourner
Dès leur arrivée au pays, les voyageurs doivent se mettre en quarantaine. Cette quarantaine commence toutefois dans un taxi, donc dans un endroit public où la distanciation physique est impossible.
Nous, on travaille dans un espace de deux mètres par deux mètres. Comment voulez-vous qu’on respecte les règles de distanciation? S’il y a trois clients, on ne peut pas leur dire de ne pas monter
, raconte un chauffeur qui souhaite garder l’anonymat.
Il y a quelques jours, j’ai même embarqué une touriste française qui arrivait du Mexique. Elle a fait le tour de Montréal pour prendre des photos, acheter des choses avant de reprendre un vol pour Paris.
Pourtant, l’Agence des services frontaliers du Canada indique que les voyageurs en transit qui sont asymptomatiques peuvent entrer temporairement au Canada lorsque cela est essentiel pour poursuivre leur voyage, mais doivent rester à l’aéroport ou encore se rendre à l’hôtel le plus près ou désigné par le gouvernement du Canada
.
Si le voyageur ne satisfait pas aux exigences ou ne consent pas aux conditions, il ne sera pas autorisé à entrer temporairement au Canada
, précise l'agence fédérale.
S'il n'est donc pas permis d’aller visiter Montréal en attendant un vol, le système n’est cependant pas sans faille, puisqu’il repose sur la bonne foi du voyageur… et sur les questions que posent les douaniers.
Mesures de protection
Depuis quelques semaines, le Bureau du taxi de Montréal propose aux chauffeurs d’installer des panneaux de plexiglas qui isolent partiellement la partie arrière du véhicule.
Le coût d’installation – une centaine de dollars – est assumé par le Bureau du taxi de Montréal.
Mais sur la vingtaine de véhicules stationnés à l’aéroport, seuls quelques-uns étaient équipés de ces panneaux.
Un chauffeur montre son installation : un morceau de plastique qu’il a lui-même bricolé avec du ruban adhésif pour isoler l’arrière du véhicule, des lingettes désinfectantes, une machine à vapeur et une bouteille de rince-bouche pour se gargariser entre chaque client.
Entre deux courses, il explique qu’il vaporise un mélange d’alcool et de savon sur le siège du passager. Il est âgé d'une soixantaine d'années, un groupe d’âge à risque auquel appartiennent beaucoup de chauffeurs de taxi.
Ce sont des gens qui doivent travailler pour subvenir aux besoins de leur famille. On est à risque de tous les côtés, même au niveau de l’âge
, observe Edgard el-Kalaani.