Non, votre milieu de travail ne ressemblera pas à ce qu’il était avant la pandémie

Les entreprises devront revoir tous les détails de leur organisation du travail afin d'éviter que leurs employés soient en contact, explique Marie-France Raynault, de l'Université de Montréal.
Photo : iStock
Le retour à l’activité économique passera par l’adoption de nouvelles normes dans les milieux de travail afin d’éviter la progression de la pandémie. C’est ce que préconisent deux spécialistes de la santé publique.
Dans une entrevue à l’émission Le 15-18, sur les ondes d'ICI Première, Marie-France Raynault, professeure émérite de l’Université de Montréal, a estimé dans un premier temps que l’annonce du déconfinement graduel au Québec faisait beaucoup de monde d’un seul coup
.
En regardant certains pays européens, dont l’Allemagne, qui a gardé un grand nombre de chantiers et d’entreprises ouverts durant la pandémie, Mme Raynault a estimé que le Québec s’en sortira s’il adopte les mesures prises par certains pays européens comme l’Allemagne, le Danemark ou la Norvège.
On revient avec un nouveau normal, puis il faudra apprendre à vivre avec le nouveau virus
, dit-elle.
La Dre Raynault souligne que les guides produits par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST
) et les recommandations de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ ) constituent les grandes lignes qui serviront aux entreprises. Mais elle indique que chaque milieu de travail ou entreprise doit faire son propre plan.« L’enfer est dans les détails. Chaque entreprise doit revoir tous les lieux, la circulation, les modes de travail pour éviter que les gens soient en contact, puis surtout […] tout ce qui se fait en télétravail doit continuer, c’est une condition absolue. »
Elle explique que la poursuite du télétravail évitera l’engorgement du transport en commun.
Mme Raynault insiste sur les détails que les entreprises doivent considérer pour mettre en place les nouvelles normes, comme la salle à manger des employés, qui doit respecter la distance nécessaire entre les individus, la file pour chauffer le repas devant un micro-ondes, le réfrigérateur pour récupérer le repas. Les employés doivent-ils se présenter tous à 8 h 30?
Ce sont des éléments cruciaux, soutient Marie-France Raynault.
Par ailleurs, la Dre Raynault souligne qu’une des conditions de la réussite du déconfinement est de préserver la capacité des directions régionales de santé publique d’enquêter sur les éclosions qui pourraient survenir. Et de prendre des mesures, quitte à fermer une entreprise
, insiste-t-elle.
Elle ajoute qu’il faudra suivre la progression de l’épidémie dans les régions par un dépistage accru et par des enquêtes au sein des populations.
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Changements profonds dans la société
De son côté, Theresa Tam, directrice de la santé publique du Canada, a dit s’attendre à ce que les entreprises adoptent une nouvelle norme
dans leur fonctionnement lorsque l’activité économique reprendra au pays.
Dans une entrevue à CBC News, elle a affirmé que les milieux de travail ne seront plus ce qu’ils étaient avant l’apparition de la pandémie.
La Dre Tam a suggéré que certaines entreprises devraient inciter davantage d'employés à travailler à domicile ou à échelonner les heures de début des quarts de travail afin d’éviter l’encombrement des transports publics pendant les heures de pointe.
Cette nouvelle norme
conduira la société à fonctionner de différentes manières
, selon elle.
Mme Tam a donné l’exemple du transport aérien, où désormais les voyageurs sont tenus de porter des masques. Elle a d’ailleurs suggéré que cette pratique soit élargie.
Je pense que cela va avoir des changements profonds dans la société, y compris peut-être notre acceptation des personnes portant des masques
, a-t-elle souligné.
Par ailleurs, elle a avancé que les provinces devront respecter certains critères avant d'assouplir les normes de santé publique afin de prévenir une résurgence de la pandémie.
La Dre Tam a également indiqué que l'une des caractéristiques de la nouvelle norme
serait l’absence de navires de croisière dans les eaux canadiennes.
Une évaluation de la situation aura lieu en juillet. Selon elle, l’arrivée de ces navires dans les eaux canadiennes comporterait des risques avec des milliers de passagers qui entreraient dans les ports.
Elle insiste sur le fait qu’un assouplissement progressif des restrictions est nécessaire pour éviter une deuxième vague de la pandémie.
J'ai juste l'image de New York dans ma tête. Et je pense que je ne voudrais jamais que cela se produise quelque part au Canada
, a-t-elle déclaré. Et si nous laissons les choses reprendre trop vite, nous pourrions avoir ce genre de poussée.