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Déjà des personnes décédées indirectement de la COVID-19

Le report d'opérations et la crainte d'aller aux urgences ont été fatals pour plusieurs Québécois, a appris Radio-Canada.

Un lit d'hôpital vide avec des machines et de l'équipement de soins médicaux ainsi qu'un moniteur.

Les activités hospitalières non urgentes seront encore reportées pour les deux prochaines semaines.

Photo : CBC / Jessica Doria-Brown

Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Les dommages collatéraux de la COVID-19 se font déjà sentir dans les hôpitaux du Québec, parfois de façon tragique. Une recension de cas préparée par l'Association des cardiologues du Québec, que nous avons obtenue, révèle déjà des décès et de graves séquelles en raison du report d'activités hospitalières non urgentes et de la phobie du virus dans la population.

Au début du mois d'avril, à Trois-Rivières, une femme dans la soixantaine souffrant d'insuffisance cardiaque est morte à son domicile, alors que son opération avait été reportée en raison de la pandémie.

Toujours à Trois-Rivières, un patient du Centre hospitalier âgé de 80 ans a vu son état se dégrader sérieusement, son implantation d'une valve aortique ayant été reportée, toujours à cause du contexte de la COVID-19.

À l’Hôpital général juif de Montréal, « nous avons eu des cas de retards significatifs pour des patients avec des symptômes récurrents », rapporte un cardiologue.

Une trentaine de cas semblables se retrouvent dans une lettre adressée le 19 avril par l'Association des cardiologues du Québec (ACQ) à la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ).

Le document a été transmis dans le contexte de l'envoi de médecins spécialistes pour prêter main-forte dans les résidences de personnes âgées.

La lettre est intitulée : « Conséquences du délestage des activités en cardiologie et dommages collatéraux ». Le président de l'ACQ, Arsène Basmadjian, souhaite sensibiliser à « l’importance et l’urgence de prendre soin de nos patients à haut risque de complications cardiovasculaires ».

« On voit plus de complication, en moins de temps, par rapport aux dernières années. [...] Plusieurs personnes n'ont pas d'examen alors qu'ils pourraient nous permettre de poser des diagnostics qui mériteraient des interventions. »

— Une citation de  Arsène Basmadjian, président de l'Association des cardiologues du Québec, en entrevue à Radio-Canada

Le document présente aussi des cas concrets de patients qui se sont présentés très tardivement à l'urgence et qui ont développé des complications graves, menant parfois à la mort.

La peur fatale d'attraper la COVID-19

Un homme a des douleurs à la poitrine.

Les consultations à l'urgence pour des infarctus sont en baisse de 50 % au Québec.

Photo : iStock

Deux autres décès ont été constatés au Centre hospitalier de Trois-Rivières, parce que les patients âgés de 50 à 60 ans s’étaient présentés tardivement à l’urgence, de crainte d'attraper la COVID-19.

Radio-Canada avait révélé, le 13 avril, que les consultations à l'urgence pour des infarctus sont en baisse de 50 % au Québec, parce des malades préfèrent endurer la douleur et les symptômes à la maison.

Au Centre universitaire de santé McGill, une femme de 68 ans s’est présentée à l’hôpital cinq jours après ses symptômes d’infarctus. Elle est décédée le lendemain d'un choc cardiogénique.

À l’hôpital Charles-Le Moyne, de Longueuil, une femme de 77 ans s’est présenté trois jours après ses symptômes d’infarctus. Son état était beaucoup trop avancé pour qu'on puisse l'opérer. « Si elle s’était présentée trois jours avant, elle serait vivante », rapporte un cardiologue.

En Outaouais, un cardiologue affirme que c’est « du jamais-vu » d’avoir « tant de cas tardifs en si peu de temps ».

À l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, un médecin spécialiste parle de « répercussions catastrophiques », même sur de jeunes patients atteints de troubles cardiaques. Le 12 avril, un malade s’est présenté 36 heures après ses symptômes d’infarctus, car il pensait que le réseau était entièrement consacré à la pandémie.

« Bien sûr qu’il faut mettre des efforts sur les CHSLD, mais il faut utiliser les médecins spécialistes de façon intelligente. On veut que les énergies soient au bon endroit, au bon moment. [...] Il y a feu dans la forêt, mais ce n’est pas toute la forêt qui brûle et on est en train de négliger les endroits qui ne brûlent pas. »

— Une citation de  Arsène Basmadjian, président de l'Association des cardiologues du Québec, en entrevue à Radio-Canada

Mêmes inquiétudes pour les malades du cancer

« On veut éviter à tout prix qu'un cancer de stade 3 devienne un stade 4 », dit la directrice générale de la Coalition priorité cancer au Québec, Eva Villalba. Elle craint que des patients qui auraient pu être sauvés soient pris en charge trop tard en raison des reports d'examens.

« Dans d'autres pays, on a vu les taux de mortalité non COVID augmenter, parce qu'on était tellement concentrés sur les patients atteints de COVID que les autres patients n'avaient pas accès à leurs soins en temps opportun. »

— Une citation de  Eva Villalba, directrice générale de la Coalition priorité cancer au Québec

Près des deux tiers des patients québécois atteints de différents types de cancer affirment que la continuité de leurs soins est perturbée par la crise de la COVID-19 qui sévit au Québec.

La ministre de la Santé veut rassurer la population

Danielle McCann en conférence de presse.

La ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, Danielle McCann.

Photo : Radio-Canada

Sept mille lits d'hôpitaux sont libres dans le réseau actuellement en raison du report d'opérations non urgentes, mais il en reste 12 000 occupés par des patients. « On s'occupe de tout ce qui est urgent et même semi-urgent », a garanti la ministre de la Santé et des Services du Québec, Danielle McCann, citant les secteurs de l'oncologie et de la cardiologie.

Selon la ministre, seuls les médecins spécialistes « inactifs » seront envoyés dans les CHSLD.

« Je veux dire à la population et surtout aux patients, aux gens qui ont des maladies chroniques, qui ont un cancer ou des problèmes cardiaques : appelez votre médecin, appelez votre spécialiste. Ils sont là pour vous. Ceux-là ne vont pas venir en CHSLD. »

— Une citation de  Danielle McCann, ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec

Elle regrette que des gens attendent trop avant de se rendre à l'urgence. Par exemple, les consultations pour les accidents cardiovasculaires mineurs sont en baisse de 80 % au Québec. « N'hésitez pas », a répété la ministre.

Avec la collaboration de Vincent Maisonneuve

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