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L'inventaire des médicaments pour l'aide médicale à mourir est « un fouillis », déplorent des médecins

Une fiole de propofol

Le propofol est utilisé lors de l'administration de l'aide médicale à mourir.

Photo : iStock / digicomphoto

Les médecins qui administrent l'aide médicale à mourir n'ont aucune idée des stocks restants de médicaments de sédation dont Québec évoque un risque de pénurie depuis une semaine. Un « problème réel » qui s'explique, selon certains, par les « mégastructures » que sont les centres intégrés de santé de et de services sociaux (CISSS).

Pandémie de COVID-19 ou non, l'aide médicale à mourir continue d'être administrée à des Québécois qui en ont fait la demande.

Il n'y en a pas plus, pas moins que d'habitude, selon Georges L'Espérance, neurochirurgien et président de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité. Il évalue le rythme de 3 à 4 décès par aide médicale à mourir par jour.

Suivant un protocole établi au Québec, les médecins qui l'administrent utilisent les mêmes sédatifs que ceux utilisés lors de certaines chirurgies. Ce sont aussi les mêmes que ceux donnés aux soins intensifs à des malades atteints de la COVID-19.

C'est la même médication pour mettre les patients en coma induit pour passer des étapes difficiles quand ils ont une insuffisance respiratoire, explique M. L'Espérance.

Georges L'Espérance, président de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité.

Georges L'Espérance, neurochirurgien et président de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité.

Photo : Radio-Canada

COVID-19 : tout sur la pandémie

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Une représentation du coronavirus.

Or, plus d'une fois la semaine dernière, le premier ministre François Legault et la ministre de la Santé, Danielle McCann, ont évoqué une pénurie potentielle de certains sédatifs, comme le propofol. Il reste un problème avec certains médicaments de sédation. [...] Il y a pour une semaine de médicaments, affirmait M. Legault le 13 avril, soit il y a une semaine.

Un fouillis

Georges L'Espérance soutient qu'il est malgré tout impossible actuellement d'avoir accès aux stocks de médicaments disponibles dans les hôpitaux. Est-ce qu'on en a pour une semaine, est-ce qu'on en a pour 15 jours? C'est un fouillis, déplore-t-il, évoquant un problème réel d'accès à l'information.

Certaines voix se sont élevées la semaine dernière pour la création d'un registre public des médicaments. M. L'Espérance n'espère pas sa création avant longtemps, mais estime que des avancées locales peuvent être faites. Et ça, ça dépend directement des mégastructures des [centres intégrés de santé et de services sociaux, soutient-il.

On pourrait au moins avoir un registre par région ou par CISSS ou CIUSSS, ce qu'on n'est même pas capable d'avoir en ce moment. C'est un désastre cette affaire-là.

Une citation de Dr Georges L'Espérance, neurochirurgien et président de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité

M. L'Espérance convient qu'il y a d'autres options aux sédatifs couramment utilisés. Mais encore là, le même problème de disponibilité va se poser si la demande est trop forte durant la pandémie. Ce qu'on sait par exemple, c'est que [ces médicaments] ne sont pas faits ici, alors on dépend de fournisseurs ailleurs dans le monde.

Un examen de conscience à faire

Le Dr Alain Naud, médecin de famille et en soins palliatifs au CHU de Québec, confirme lui aussi n'avoir aucune idée des réserves de sédatifs. Tout ce qu'on en sait, c'est ce qui est rendu public d'un risque potentiel de pénurie, mais on n'est pas du tout informés sur les stocks dont on dispose, dit-il.

Un homme portant des lunettes assis sur une chaise.

Dr Alain Naud, médecin de famille et en soins palliatifs au CHU de Québec

Photo : Radio-Canada

Comme le Dr L'Espérance, il déplore un manque d'information sur le terrain. Savoir quel est l'état des stocks, ce n'est pas une question très compliquée, poursuit-il, plaidant pour une gestion locale adaptée à la réalité de chaque région.

Selon lui, un des gros problèmes vient de la création de ces monstres que sont les CISSS et les CIUSSS, qui ne permettent pas de réagir rapidement et localement sur des situations d'urgence.

Je pense qu'il faudra faire un examen de conscience, une fois la pandémie passée, de tout ce qui est dysfonctionnel dans le réseau de la santé.

Une citation de Dr Alain Naud, médecin de famille et en soins palliatifs au CHU de Québec

Sans égard à la pandémie qui sévit actuellement, plusieurs médecins, dont le Dr Naud, ont déjà déploré des procédures administratives complexes pour l'accès aux médicaments contenus dans les trousses d'aide médicale à mourir.

Rationnement volontaire

Encore vendredi, les médecins n'avaient reçu aucune directive particulière pour économiser des sédatifs ou encore de suspendre l'aide médicale à mourir. À mon avis, ça ne pourrait pas arriver parce que c'est un service essentiel qu'on doit maintenir, souligne Alain Naud.

Des seringues remplies de médicaments dans une valise.

Contenu d'une trousse d'aide médicale à mourir.

Photo : Dr Alain Naud, médecin de famille et en soins palliatifs au CHU de Québec

Mais dans le contexte, et ne sachant pas quels sont les stocks, il a lui-même décidé de rationner les doses de propofol.

Le protocole depuis 4 ans veut qu'on ait 8 seringues de propofol au chevet du patient. On n'en utilise [généralement] que 2. Au lieu de 8 et d'en jeter 6, on en fait préparer actuellement 2, explique le Dr Naud. Même si on n'a pas reçu de directive, on contribue à notre façon.

Radio-Canada a tenté, sans succès, d'obtenir la liste à jour des médicaments à risque de pénurie auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux.

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