À vos masques, prêts, cousez!
Le fléau appelle l’action. De plus en plus de gens de talent ont décidé de mettre leur savoir-faire, en temps de confinement, au service de la collectivité en fabriquant des masques.

Jackie Zegray est réalisatrice et directrice artistique dans le milieu de la télévision.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Dans la vie, Jackie Zegray est réalisatrice et directrice artistique dans le milieu de la télévision. Mais depuis quelques jours, elle déniche du matériel et fait ronronner sa machine à coudre.
J’ai toujours cousu pour le plaisir. Là, je le fais parce que je ne veux pas laisser les gens mourir. Je voulais m’impliquer.
À la fin mars, Jackie Zegray a répondu à l’appel de Couturières unies contre COVID-19!
. Une Coopérative montréalaise, Couturières Pop, avait lancé cet appel à l'action sur les réseaux sociaux.
Quelque 4500 personnes ont répondu présentes à cette mobilisation de l’aiguille.
Ils ne m’ont jamais rappelée. Ils devaient être submergés! Alors, j’ai décidé d’agir seule quand une de mes amies, qui travaille dans un hôpital, a lancé un cri d’alarme en disant qu’ils manquaient de masques. J’en ai fait un premier pour elle.
La réalisatrice a fait des recherches avancées sur les techniques de fabrication de ce type de matériel.
Elle a créé des prototypes qu’elle a soumis à un ami à la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).
Elle a trouvé miraculeusement le bon matériel en ces temps de contraintes commerciales, du polypropylène.
Son masque est composé d’une membrane de trois couches hydrofuges, d’un filtre et de deux couches, une intérieure et une extérieure.
Elle a commencé par les donner à ses amis qui travaillent en CHSLD et dans le domaine de la santé et maintenant elle offre ses services à la population en général.
Il y a vraiment une demande. Les gens veulent se protéger
, dit-elle.
Des gens comme Jacky, qui ont décidé de mettre leur talent et leur ingéniosité dans la fabrication des masques, il y en a de plus en plus.

Design d'un masque signé Pony
Photo : Radio-Canada
Il y a deux semaines, Simon April, 43 ans, ingénieur de formation et longtemps propriétaire de la ligne Encantados, des vêtements entièrement fabriqués au Québec, s’est dit qu’il fallait faire quelque chose de plus grand que soi
et contribuer au bien-être collectif.
L’idée, dit-il, c’est d’offrir une barrière complémentaire aux mesures existantes de distanciation physique.
Simon April a téléphoné à une copine designer, Gabrielle Laïla Tittley, alias Pony.
Je me suis dit qu’il fallait une signature artistique, un truc esthétique.
L’ingénieur a étudié des patrons de masques de l’Association de médecine de France et créé des prototypes et fait des tests. L’artiste s’est mise à dessiner.

Portrait de André-Anne LeBlanc qui produit elle-même des masques pour se protéger contre la COVID-19
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
André-Anne LeBlanc est marionnettiste de profession. Sa tournée nord-américaine de Scooby-Doo a été annulée, bien sûr.
Après quelques journées à faire le deuil de ce projet, elle s’est dit : Moi, je ne tournerai pas en rond chez nous et je vais mettre l’épaule à la roue
.
Les recherches, la création du filtre, du serre-nez, trouver les bons matériaux et hop! elle produit avec du matériel recyclé. Son objectif : un masque zéro déchet.
Et l’argent dans tout cela ?
André-Anne LeBlanc ne veut pas faire d’argent avec ses masques.
À la rigueur, si les gens veulent m’offrir une bouteille de vin, je ne dirai pas non. Mais l’objectif, c’est de les distribuer dans les CHSLD de mon quartier et supporter les travailleurs de la santé.
La compagnie spécialisée dans l'impression d'art sur vêtements Le Galeriste commencera la production des masques signés Pony la semaine prochaine.
Nous ne voulons pas faire de profit avec ça. On va les vendre à un prix qui nous permettra de remettre l’argent dans une autre production pour les distribuer gratuitement à ceux qui en ont le plus besoin
, explique-t-il.
Jackie vend ses masques 25 $. Elle a même développé un nom et un branding pour ses masques : ZMASQ.
Je ne ferai pas beaucoup d’argent avec ça, mais il faut payer le matériel. Le but, c’est d’aider.

Jackie Zegray
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Sur le trottoir, en face de chez Jackie, à plus de deux mètres de distance, je repense à ce passage dans La Peste d’Albert Camus, un ouvrage qui met en scène les réactions diverses des humains devant ce fléau.
Un des personnages, le père Paneloux, dit à un moment donné que la peste est aussi une grâce à certains égards, car elle permet aux hommes de faire des actes de charité.