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Devrions-nous tous porter des masques?

Une cinquantaine de personnes portant des masques descendent les escaliers.

L'heure de pointe dans le métro de Pékin, le 7 avril 2020

Photo : Reuters / Tingshu Wang

Depuis des semaines, les gouvernements et les agences de santé soutiennent que les masques ne sont pas utiles pour protéger la population contre le coronavirus et que seuls les malades et le personnel soignant doivent s’en servir. Mais, depuis quelques jours, on entend un nouveau discours. Que faut-il en penser? Les avis sont partagés.

1. Les masques sont-ils efficaces contre la COVID-19?

Alex Carignan, professeur au Département de microbiologie et d'infectiologie de l’Université de Sherbrooke, n’est pas convaincu du bien-fondé de l’idée d’imposer des masques au grand public.

Il y a une forte pression publique et médiatique [en ce sens], mais il n’y a aucune évidence scientifique pour supporter le port du masque dans la population, affirme-t-il.

Le risque, soutient le Dr Carignan à l’émission Par ici l’info, c'est que les gens l’utilisent comme une « recette miracle » et délaissent les mesures éprouvées, telles que la distanciation physique et le lavage des mains.

COVID-19 : tout sur la pandémie

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Une représentation du coronavirus.

De plus, souligne-t-il, la plupart des gens ne savent pas comment porter un masque adéquatement et le manipulent constamment, ce qui fait qu’ils sont plus à risque de se contaminer et de contaminer les autres.

Ça devient une arme à double tranchant [...] et ça donne aux gens qui le portent un faux sentiment de sécurité.

Une citation de Alex Carignan, professeur à l’Université de Sherbrooke
Une employée d'usine qui porte des vêtements de protection tient une pile de masques chirurgicaux.

Aucun État ni organisme ne préconise d'utiliser des masques chirurgicaux, dont on craint une pénurie.

Photo : afp via getty images / SAM PANTHAKY

Pour sa part, la Dre Cécile Tremblay, microbiologiste infectiologue au Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM) estime que le port du masque est « une mesure supplémentaire valable », dans la mesure où l’information sur le virus évolue et qu’on sait maintenant que des personnes asymptomatiques peuvent transmettre l’infection.

Cependant, ajoute-t-elle en entrevue avec Patrice Roy (Nouvelle fenêtre), on n’a pas vraiment d’études scientifiques qui ont démontré, au niveau d’une population donnée, que porter le masque ajoutait aux autres mesures qui avaient été prises.

2. Que dit la science?

Il existe des études sur les bénéfices du port du masque pour les travailleurs de la santé, mais pas pour la population en général. Et encore moins sur l’utilisation de masques faits maison.

Une recension de la littérature sur le sujet, parue dans la revue médicale The Lancet (Nouvelle fenêtre) le 20 mars 2020, souligne néanmoins qu’il existe une distinction essentielle entre l'absence de preuve et la preuve d'absence.

Comme les preuves suggèrent que la COVID-19 pourrait être transmise avant l'apparition des symptômes, la transmission communautaire pourrait être réduite si tout le monde, y compris les personnes infectées mais asymptomatiques et contagieuses, porte des masques faciaux, conclut l’étude.

L’hypothèse selon laquelle la maladie pourrait se transmettre par aérosols, dans l’air qu’expire une personne infectée, n'a pas encore été prouvée scientifiquement.

3. Que préconisent les autorités?

Une femme avec un masque passe à distance d'un banc public où est assise une autre femme qui regarde la ville de Toronto.

Le temps chaud qui régnait à Toronto le 2 avril 2020 a attiré les gens à l'extérieur malgré les avertissements du premier ministre qui demandait de rester à la maison afin d'empêcher la propagation de la COVID-19.

Photo : Radio-Canada / Evan Tsuyoshi Mitsui

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) ne conseille pas le port du masque par l’ensemble de la population, en particulier dans des espaces ouverts. L'utilisation généralisée de masques par des personnes en bonne santé dans le cadre communautaire n'est pas étayée par les preuves actuelles et comporte des incertitudes et de graves risques, écrit l’organisation dans un avis daté du 6 avril.

L’OMS ne préconise l’utilisation de masques que pour ceux qui présentent des symptômes de la COVID-19 ou qui s’occupent de personnes susceptibles d’être atteintes de la maladie.

Il n'y a actuellement aucune preuve que le port d'un masque (médical ou autre) par des personnes en bonne santé [...] peut les empêcher d'être infectées par des virus respiratoires, y compris la COVID-19.

Une citation de Avis de l’OMS

Au contraire, l’Organisation s’inquiète du faux sentiment de sécurité que pourraient avoir les porteurs de masques, qui pourraient en venir à négliger des mesures comme le lavage de mains et la distanciation sociale.

L'Agence de la santé publique du Canada suggère depuis le 5 avril de porter un masque en tant que « mesure additionnelle » lorsque les autres mesures de distanciation sociale sont difficiles à appliquer.

Avant cette date, la position de l’Agence était plutôt que seules les personnes présentant des symptômes devaient l’utiliser.

Le masque doit cependant être non médical, afin de réserver les masques médicaux au personnel des institutions de soins de santé.

Rien ne prouve que le port d'un masque non médical dans la communauté protège la personne qui le porte [...] Porter un masque non médical est une mesure supplémentaire que vous pouvez prendre pour protéger les personnes qui vous entourent, même si vous n’avez pas de symptômes.

Une citation de Agence de la santé publique du Canada
François Legault en conférence de presse.

François Legault a déclaré que les Québécois devraient se concentrer sur les autres mesures visant à éviter la propagation du coronavirus.

Photo : Radio-Canada

Du côté du Québec, il n’y a pas de directives claires.

Ça peut aider, d’ajouter un masque pour les citoyens, afin d’éviter de propager le virus, a soutenu le premier ministre François Legault lors de sa conférence de presse du 7 avril. Il a cependant rappelé que le port du masque sert à protéger les autres et non celui qui le porte.

C’est pas mal plus efficace de rester loin des autres personnes si on ne veut pas les contaminer, plutôt que de porter un masque.

Une citation de François Legault, premier ministre du Québec

La principale crainte est que les gens prennent des masques qui devraient être réservés au personnel médical.

Pour sa part, l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) souligne qu’il n’y a pas de consensus sur l’efficacité du port du masque pour prévenir les maladies respiratoires, mais qu’ils pourraient cependant avoir une certaine utilité pour limiter la projection de gouttelettes dans l’environnement.

Les masques [faits à la maison] pourraient aider à diminuer le risque de transmission du virus par les personnes asymptomatiques ou peu symptomatiques qui circulent dans des lieux publics où il est difficile d’éviter des contacts étroits avec les autres, écrit l’INSPQ, dans un avis publié le 7 avril.

4. Que recommande-t-on ailleurs?

Un homme dont le visage est couvert d'un masque en tissu tient un écriteau sur lequel est écrit « Masques pour le visage».

Marcos Hernandez vend des masques protecteurs faits maison à Los Angeles, aux États-Unis, le 4 avril 2020.

Photo : Reuters / Kyle Grillot

Aux États-Unis, les Centres de contrôle et de prévention des maladies, principale agence fédérale de protection de la santé publique, ont changé d’avis récemment et recommandent maintenant que les gens utilisent des masques en tissu pour se couvrir le visage quand ils sont dans des lieux publics où il est difficile de maintenir les mesures de distanciation. Le but est d’éviter la transmission par les personnes asymptomatiques.

Le président Donald Trump a d’ailleurs encouragé les Américains à fabriquer eux-mêmes leurs propres masques.

La position des autorités est semblable en France et en Allemagne, où l’on recommande le port de masques faits maison à l’extérieur comme mesure de précaution. Il n'y a « pas encore de preuve scientifique » qu'ils limitent la propagation du virus, mais cela « semble plausible », a estimé Lothar Wieler, président de l'Institut Robert Koch, l'établissement de référence en santé publique.

Le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) vient, lui aussi, de changer ses recommandations et a reconnu, le 8 avril, que l’utilisation de masques par l'ensemble de la population peut être une mesure efficace pour lutter contre le coronavirus.

L'utilisation de masques faciaux en public peut servir de moyen de contrôle à la source pour réduire la propagation de l'infection dans la communauté en minimisant l'excrétion des gouttelettes respiratoires des personnes infectées qui n'ont pas encore développé de symptômes ou qui restent asymptomatiques, est-il écrit dans la publication de l’ECDC, qui souligne tout de même qu’on ne sait pas dans quelle mesure l'utilisation de masques dans la communauté peut contribuer à une diminution de la transmission.

Des personnes portant des masques de protection sur leur vélo à Pékin le 7 avril 2020.

Dans les rues de Pékin, les masques sont omniprésents.

Photo : Reuters / Carlos Garcia Rawlins

En Asie, la situation est très différente. Dans des pays comme la Chine, la Corée du Sud, la Thaïlande ou le Japon, le port du masque par des personnes grippées est courant. Depuis le déclenchement de l’épidémie, les masques y sont omniprésents.

Dans un entretien publié par la revue Science (Nouvelle fenêtre), le directeur général du Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies, George Gao, avait d’ailleurs déclaré, le 27 mars dernier, que la grande erreur aux États-Unis et en Europe est que les gens ne portent pas de masques.

De nombreuses personnes sont asymptomatiques ou ne présentent pas encore de symptômes; avec un masque, on peut empêcher les gouttelettes qui portent le virus de s’échapper et d’infecter les autres, a-t-il ajouté.

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